Airbus A340 TLRA

Apparu au début des années 1990, l’Airbus A340 fut une petite révolution technologique à cette époque. En effet cet avion, qui possède plus de 60% de pièces communes avec son petit frère l’A330, était alors le premier et seul quadriréacteur conçu et réalisé par le consortium européen. Destiné à concurrencer directement le Boeing 747 il mit un certain temps à voir ses ventes décoller, en raison principalement d’une série d’accidents qui émaillèrent sa carrière. À l’instar des A320 et A330 le quadriréacteur était en effet un avion de ligne à commandes de vol électriques, un système alors peu répandu dans les compagnies aériennes et jouissant de ce fait d’une relative mauvaise réputation. Toutefois l’apparition, à la fin de cette même décennie, des versions A340-500 et A340-600 remit les compteurs dans le sens d’Airbus Industries. Il faut souligner que l’A340-600 demeurait début 2014 l’avion civil disposant du plus long fuselage jamais construit au monde, avec 75,30 mètres de long. Cet appareil particulièrement majestueux n’a  pourtant jamais vraiment rencontré de succès auprès des militaires.

L’Airbus A340 se présente sous la forme d’un monoplan à aile basse en flèche cantilever. De facture très classique l’appareil possède un empennage traditionnel et un train d’atterrissage trois points. Sa propulsion est assurée par des réacteurs franco-américain CFM56 ou britanniques Rolls & Royce Trent 556 suivant les séries. Comme tous les Airbus de deuxième génération l’A340 possède un cockpit biplace côte à côte largement informatisé et doté d’une avionique top niveau couplée à des commandes de vol électrique. La cabine passager permets l’embarquement de 263 à 440 personnes suivant le modèle et l’aménagement choisi. Le premier exemplaire de l’appareil, un A340-300 réalisa son vol inaugural le 25 octobre 1991.

Pour les forces armées et aériennes l’A340 ne peut représenter que deux alternatives : le transport de personnels ou le transport de hautes personnalités. Et dans ce second cas l’avion est bien plus gros, donc bien plus cher à l’achat qu’un Airbus ACJ, qu’un Boeing 737 BBJ ou bien sûr qu’un quelconque jet d’affaire. Bien que très imposant l’A340 demeure un avion de ligne et ne peut donc pas s’affranchir des pistes en dur, types tarmacs d’aérodromes ou d’aéroport. Cela fait que l’appareil ne peut pas être considéré comme un substitut au McDonnell Douglas C-17A Globemaster III américain.

Le client militaire de lancement de cette machine ne fut pas une des forces aériennes des pays membres du consortium Airbus Industries mais le petit état arabo-persique du Qatar. Pour ses transports prioritaires sa force aérienne fit l’acquisition en 1997 d’un A340-200 livrés directement sous la forme VIP. Cet aménagement si particulier fut réalisé en France par Air France Industries, qui devait par la suite devenir le principal sous-traitant d’Airbus Industries pour les transformations de ses A340 militaires. L’équipementier français réalisa ainsi la totalité des modifications de quadriréacteurs en avions de hautes personnalités.
Au sein de l’Emiri Wing l’A340-200 a remplacé un vieux Boeing 707-320 alors utilisé pour cette mission de prestige.

Par la suite Airbus vendit son quadriréacteur pour des missions de transport de hautes personnalités à des pays aussi divers que l’Algérie, l’Allemagne, l’Arabie Saoudite, Bahreïn, Brunei, l’Égypte, l’Italie, la Jordanie, la Libye, ou encore la Thaïlande.

Au sein de la Luftwaffe le seul et unique A340-300 remplit beaucoup plus que de simples missions de transports des hautes personnalités civiles et militaires du pays. En effet à bord de cette machine on trouve tout un équipement électronique permettant à la Chancelière allemande de mener divers types d’opérations militaires. À l’image des deux Boeing VC-25A de l’US Air Force l’A340 allemand semble bel et bien doté d’une liaison sécurisée type Link-16 permettant les transmissions avec les appareils de combat de l’OTAN en temps réel. De ce fait l’A340-300 de la Luftwaffe est tout autant un poste de commandement avancé qu’un simple avion de transport prioritaire. Entré en service en 2007 cet avion a remplacé deux Tupolev Tu-154M hérité de l’ancienne République Démocratique d’Allemagne, et transformés à la va-vite en 1995.

En dehors de ces pays qui utilisent leurs A340 militaires pour des missions liées aux hautes personnalités on retrouve une force aérienne ayant fait le choix, en 2006, de l’A340-200 pour du transport de personnels et de fret dans un cadre stratégique ou humanitaire. Ce client si particulier, c’est l’Armée de l’Air. En effet la France possède au sein de l’Escadron de Transport ET-3/60 Estérel sis sur la BA-110 de Creil, au nord de Paris, deux avions de ce type. Pour des raisons purement pratiques ces deux appareils sont stationnés, avec les A310-300, sur une zone sécurisée de l’aéroport international de Paris-Roissy Charles de Gaulle. Ces appareils ont permis la mise à la retraite des obsolètes Douglas DC-8-72CF datant des années 1970. Acquis en leasing auprès de la compagnie aérienne portugaise TAP ils ont la capacité d’être transformés en moins de quatre heures en avions de transport de fret, pour une capacité marchande de quarante tonnes. Tirant les enseignements de la guerre contre le terrorisme l’Armée de l’Air les a dotés de systèmes de protection antimissile passif par leurrage thermique.

Les deux A340-200 de l’Armée de l’Air sont intensivement utilisés par la France pour des liaisons aériennes entre la métropole et les départements et territoires d’outre-mers, comme par exemple la Guyane française, la Réunion, ou encore Tahiti. Bien entendu Djibouti et le théâtre d’opération afghan font partis des destinations privilégiées de ces machines. Ces deux avions sont également utilisés par la France pour des missions à caractère humanitaire pour le transport mixte de personnels et de charges de fret, comme lors du terrible séisme qui frappa l’île d’Haïti à la fin de l’année 2009. Il est prévu que l’Armée de l’Air adapte ses A340-200 au kit Morphée, un matériel permettant la prise en charge médicalisée de blessées et de malades lourdement appareillées. Jusque là il était emporté uniquement par quatre Boeing C-135FR de transport stratégique. Dans la nomenclature militaire française les A340-200 sont désignés TLRA, pour Transport à Long Rayon d’Action. Ceux ci ne sont pas ravitaillables en vol. Par la suite ces avions ont été déployés en Afghanistan, au Kosovo, et début 2013 au Mali pour soutenir l’opération Serval, puis quelques mois plus tard en Centrafrique.

Avec, en 2018 à peine une grosse dizaine d’avions en service dans des forces aériennes on ne peut pas vraiment parler de réussite commerciale auprès des militaires pour le quadriréacteur européen. Toutefois l’avion a permit d’imposer un peu plus Airbus sur un marché des avions de ligne militaire, jusque là totalement géré par les constructeurs américains avec Boeing en tête d’affiche. D’autant que l’A340 permettra peut être un jour d’ouvrir la voie à des commandes militaires pour l’A380.