Hormis une agriculture principalement destinée à subvenir aux besoins indigènes l’île de Formose ne possède quasiment aucune ressource naturelle. C’est ce qui explique que depuis le milieu des années 1960 le régime chinois républicain se soit tourné massivement vers l’industrie et notamment les hautes technologies. À Taïwan l’aéronautique n’y fait pas exception même si elle repose principalement sur de la sous-traitance et des productions uniquement dédiées au marché intérieur. Dans ce cadre l’avionneur AIDC a su développer des avions souvent parfaitement adaptés aux besoins de la Republic Of China Air Force.
L’exemple le plus récent est l’avion d’entraînement avancé T-5 Yung Yin.
Au début des années 2000 l’état-major de la Republic Of China Air Force indiqua qu’elle devrait rapidement se doter d’un avion d’entraînement avancé destiné à maintenir pilotes à un niveau de formation cohérent avec ses avions de combat. Malheureusement pour lui les acquisitions récentes de Dassault Aviation Mirage 2000-5 avaient passablement réduit les capacités financières de la défense taïwanaise. Celle-ci ne pouvait pas répondre favorablement aux attentes des aviateurs, obligés de se satisfaire de leurs AIDC AT-3 Tsu Chiang alors déjà vieillissants.
Durant pratiquement toute la première décennie du vingt-et-unième siècle les généraux de la ROCAF harcelèrent littéralement leurs autorités ministérielles afin de les faire craquer. Ce qu’elles firent en 2009 en décidant, à contre-cœur, de lancer le programme AJT. Cet Advanced Jet Trainer devait donc permettre d’ici la fin de la décennie 2010 de remplacer les jets d’entraînement.
Cherchant absolument à gagner en crédibilité internationale le gouvernement taïwanais ouvrit le programme AJT aux avionneurs étrangers, en le fermant cependant à ceux en provenance de Chine ou de Russie. Ce qui, diplomatiquement parlant, se comprend parfaitement.
Un temps l’acquisition du Korean Aerospace Industries T-50 Golden Eagle sud-coréen fut envisagée tout comme celle de l’Alenia-Aermacchi M-346 Master italien. Une production sous licence locale fut même envisagée par le gouvernement de Taipei avant finalement de faire machine arrière et de revenir à ses vieilles habitudes : l’achat d’un avion de conception et de production locale.
En 2015, soit six ans après le lancement du programme AJT, aucun avion n’avait encore été choisi. Pis même l’avionneur AIDC hésitait entre deux formules : la modernisation en profondeur des AT-3 Tsu Chiang existant ou le développement d’un nouvel avion. C’est la ROCAF qui a sa manière précipita le choix au début de l’année 2016.
En effet elle indiqua qu’elle souhaitait que le futur appareil puisse remplir les missions dites LIFT (pour Lead-In Fighter Trainer) en remplacement des deux tiers des Northrop F-5F Tiger II. Seuls les biplaces de transformation opérationnelle servant au profit des chasseurs monoplaces F-5E Tiger II et des avions de reconnaissance tactique RF-5E Tigereye seraient maintenus en service. Cette fois donc AIDC n’avait plus le choix, et devait proposer une nouvelle machine.
L’urgence était là. Les généraux de la ROCAF exigeaient désormais que l’ensemble de la flotte soit pleinement opérationnelle au plus tard en 2026, soit dix ans plus tard. Les designers et ingénieurs taïwanais ne devaient donc pas mollir. D’autant que plusieurs responsables politiques revenaient à la charge avec l’idée d’un assemblage sous licence locale du M-346 Master italien.
Afin de gagner du temps le nouvel avion, désigné officiellement XT-5 Yung Yin, allait disposer d’une architecture générale très proche de celle du chasseur F-CK-1 Ching-Kuo.
Pour la motorisation elle fut confiée au Honeywell F124, assemblé localement par le motoriste ITEC.
Extérieurement le nouvel avion d’entraînement ne pouvait en effet pas nier sa parenté avec le chasseur indigène. Pourtant il faisait appel à de nouvelles technologies comme les matériaux composites légers, présents à hauteur de 10% de sa cellule, ou encore un poste de pilotage tout écran totalement numérique. Malgré une esthétique digne d’un avion de combat le XT-5 Yung Yin a été pensé purement pour la formation avancée et ne dispose donc que d’un armement finalement assez limité puisque seuls deux points d’emports sous voilure furent installé, aucun armement interne ni point d’emport central.
Officiellement dévoilé au monde en septembre 2019 le prototype réalisa son premier vol le 10 juin 2020.
Malgré la crise pandémique du Covid-19 les équipes d’AIDC tenaient bon. Les essais en vol se déroulaient sans trop de difficultés et le T-5 Yung Yin tenait ses engagements. De son côté la Republic Of China Air Force s’engagea à acquérir soixante-cinq exemplaires.
L’usinage des premiers exemplaires de présérie débuta à la fin de l’année 2021 et le tout premier lot d’avions fut accepté au service en décembre 2022 pour une entrée en service au 1er janvier 2023. Ces dix exemplaires allaient permettre avant tout de former les instructeurs depuis Chihhang Air Base dans le sud-est de Formose.
Les premiers élèves pilotes taïwanais doivent commencer leur formation sur AIDC T-5 Yung Yin à partir de 2024, une fois tous les formateurs transformés sur ce nouvel avion. Le nouvel avion permettra ainsi de fournir des pilotes aptes ensuite à passer sur les chasseurs multi-rôles Lockheed-Martin F-16V Viper en service depuis l’automne 2018.
Bien que penser pour le marché intérieur taïwanais l’avion est proposé à l’international sous la désignation de T-5 Brave Eagle. Ses chances d’exportations sont néanmoins considérées comme faibles au regard du reste des productions d’AIDC.
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