L’effondrement du système communiste au début des années 1990 amena de nombreux pays à revoir leurs dotations en matériels de défense. Les nations qui relevaient jusque là du joug de Moscou durent se lancer dans divers programmes visant à pérenniser leurs moyens de combat, et cela fut d’autant plus vrai dans le domaine aérien. C’est pourquoi plusieurs programme industriels furent mis en chantier, dont l’un des plus ambitieux eut lieu en Roumanie avec l’aide d’Israël : le chasseur Aerostar LanceR.
La chute du dictateur Nicolae Ceausescu à Noël 1989 entraina la fin du régime communiste et du rattachement de la Roumanie à la sphère d’influence soviétique. À cette époque la Fortele Aeriene Romane disposait d’environs 350 avions de combat : une grosse vingtaine de MiG-29 Fulcrum fraîchement livrés, une quarantaine de MiG-23 Flogger en service depuis une dizaine d’années, et surtout des dizaines et des dizaines de MiG-21 Fishbed. Le nombre exact d’avions de ce type en dotation dans l’arsenal roumain était mal connu car ces avions faisaient jusque là de fréquents allers-retours vers les ateliers du constructeur soviétique. En fait le MiG-21 était le seul des trois à être réellement adapté aux différences climatiques roumaines. À cela il fallait ajouter environ quatre-vingt-dix IAR-93 de fabrication locale développés conjointement avec l’industrie yougoslave.
Des tentatives furent amorcés afin d’acquérir de nouveaux MiG-29 Fulcrum, considérés alors comme un des plus modernes chasseurs au monde mais la déliquescence de l’économie roumaine stoppa nette les pourparler. La Russie post-soviétique venait de découvrir l’économie de marché.
Pourtant en 1992 l’industriel israélien Elbit Systems proposa à la Roumanie de l’aider à moderniser sa flotte de MiG-21, ou au moins une partie. Il s’agissait d’y ajouter une avionique occidentalisée, de revoir à zéro sa motorisation, et d’y intégrer un armement externe originaire de l’état hébreu. La Roumanie qui cherchait alors à se rapprocher de l’OTAN saisit la balle au bond. Au passage Elbit proposait d’en faire de même dans un second temps avec les MiG-29 roumains.
L’accord officiel entre Israël et la Roumanie fut signé en 1993. Le futur avion serait désigné LanceR, le R majuscule signifiant retrofitting. Ce n’est pas l’avionneur national I.A.R. qui fut choisi par Elbit mais Aerostar. Ce constructeur était jusque là connu surtout pour avoir fabriqué sous licence une partie importante des avions d’entraînement Yakovlev Yak-52 destinés aux forces du Pacte de Varsovie. L’année 1994 permit de choisir les cent onze avions qui seraient modernisés.
Il s’agissait de quatr-vingt-dix-sept monoplaces MiG-21M/MF/MF-75, et quatorze biplaces de transformation opérationnelle MiG-21UM.
Trois sous-versions de l’Aerostar LanceR étaient alors prévues. En premier lieu on trouvait le LanceR A destiné à l’attaque au sol et à la reconnaissance armée pour un total de soixante-et-onze machines. Ensuite les quatorze LanceR B biplaces d’entraînement avancé et de transformation opérationnelle, et enfin vingt-six LanceR C de chasse pure destinés à la défense aérienne et à l’interception.
Fondamentalement les travaux menés sur les futurs LanceR A et Lancer B ne furent pas particulièrement poussés, hormis une partie de l’avionique pour les second d’entre-eux. Les avions furent déposés de zéro, et leur armement revu et corrigés.
La première escadrille d’Aerostar LanceR A fut déclarée opérationnelle en juillet 1997 tandis que les premier LanceR B l’étaient quelques semaines plus tard en septembre.
C’est véritablement sur les vingt-six futurs LanceR C que le travail d’Elbit et d’Aerostar se précisa. Jusque là les MiG-21 roumains étaient employés pour la défense aérienne à l’aide de deux missiles air-air R-13 (ou AA-2 Aphid selon l’OTAN) à guidage infrarouge. Désormais les LanceR C allaient pouvoir emporter quatre Python 3 plus modernes de facture israélienne.
L’avionique Elbit permettait en outre aux LanceR C de voler de jour comme de nuit en formation serrée. Le premier d’entre-eux arriva en unité en 1999, et le dernier en 2003.
Dès lors que la Fortele Aeriene Romane eut sa pleine dotation en Aerostar LanceR C elle put retirer du service l’intégralité de ses MiG-23 encore en service. Ces avions connaissaient alors un taux de disponibilité frôlant les 15%. Leur retrait du service fut donc un véritable ouf de soulagement pour la défense roumaine. Même l’OTAN leur refusait la participation aux exercices européens.
Alors que les LanceR A et B étaient porteurs de camouflages chatoyants les LanceR C évoluaient eux dans une livrée grise plus discrète.
À partir de 2005 la flotte des Aerostar LanceR A connut de fréquentes périodes d’interdiction de vol. Les travaux menés par Elbit s’étant souvent limité au minimum dessus ces avions commençaient à accuser le poids des ans.
Sept ans plus tard pour des raisons budgétaires la flotte fut réduite drastiquement. Tous les LanceR A furent retirés du service tandis que les quatorze LanceR B furent modernisés afin de préparer au mieux au passage sur LanceR C.
En 2012 la Fortele Aeriene Romane n’alignait donc plus que quarante Aerostar LanceR. Mais surtout elle ne faisait plus voler aucun MiG-29, le programme SnipeR similaire au LanceR ne réussit jamais à démontrer ses capacités. La Roumanie qui s’occidentalisait de plus en plus cherchait alors à acquérir des avions de facture américaine ou européenne. Et son choix se porta sur des General Dynamics F-16MLU Fighting Falcon rachetés de seconde main auprès du Portugal. Au fur et à mesure des livraisons de ces avions la flotte de LanceR se réduisait de manière drastique.
Ainsi à l’été 2020 la Fortele Aeriene Romane n’alignait plus que vingt-huit Aerostar LanceR. Il s’agissait de vingt monoplaces et de huit biplaces, ces derniers étant aptes aux missions air-air grâce à des missiles R-60 (ou AA-8 Aphid selon l’OTAN) de facture soviétique hérités des MiG-29. Les LanceR C sont avant tout des chasseurs de défense aérienne et ils sont fréquemment employés pour identifier les avions hostiles s’approchant de l’espace aérien souverain roumain.
La Roumanie compte conserver ses LanceR jusqu’en 2026, sauf si d’ici là ses moyens financier lui permettent de les remplacer totalement.
Véritable avion de combat de transition l’Aerostar LanceR est souvent considéré comme la version la plus évoluée du MiG-21 Fishbed soviétique. Bien qu’Aerostar ait modernisé quatre de ces avions pour le compte du Mozambique l’absence de l’avionique israélienne ne les classe pas parmi les LanceR. Aucun d’entre-eux n’a donc été vendu à l’export.
Pour autant cet avion n’est pas dénué de défauts comme en atteste le retrait précipité des LanceR A.
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