Habituellement les avions d’entraînement ne sont pas des appareils dédiés à obtenir une carrière marquant l’histoire de l’aviation. Bien sûr comme pour toutes règles il existe des exceptions et on pourrait citer les De Havilland Tiger Moth britanniques, North American T-6 Texan et Lockheed T-33 T.Bird américains, ou encore le Fouga CM.170 Magister français. Avant eux un petit biplan connut son heure de gloire avant de retomber dans un incompréhensible oubli : l’Aeromarine Type 39.
C’est en 1917 que l’US Navy chercha à acquérir un biplan d’entraînement de base pour à la fois ses pilotes d’avions et d’hydravions. Elle émit un cahier des charges qui fut envoyé à toutes les entreprises du domaine aéronautique présentes sur le sol américain. Asse étrangement bien peu y répondirent et c’est la société Aeromarine Plane and Motor Company sise dans le New Jersey qui le remporta avec son Type 39. À cette époque cette entreprise était déjà sur les tablettes de l’US Signal Corps et de l’US Navy pour sa fabrication sous licence américaine du bombardier léger britannique Airco D.H.4.
De conception très académique l’Aeromarine Type 39 était un biplan d’envergure inégale construit en bois et toile. Dans sa configuration avion il possédait un train classique fixe se terminant par un patin de queue tandis que dans sa configuration hydravion il disposait de deux flotteurs en lieu et place des roues. L’élève pilote et son instructeur prenaient place dans un double cockpit séparé à l’air libre. Sa motorisation était assurée par un Hall-Scott A-7 à quatre cylindres en ligne d’une puissance de 90 chevaux. Ce moteur entraînait une hélice bipale en bois. Il réalisa son premier vol en octobre 1917 et fut rapidement commandé à hauteur de deux cents exemplaires.
L’Aeromarine Type 39 entra en service dans l’US Navy en mars 1918. Par un protocole qui existe toujours de nos jours sur des avions d’entraînement comme le McDonnell-Douglas T-45C Goshawk ou l’ultramoderne Beechcraft T-54 Marlin II l’US Marines Corps eut accès à la formation sur ce nouveau biplan. Les deux forces de l’US Department of Navy disposaient d’un unique avion sous marquages de l’aéronavale. Très rapidement les instructeurs estimèrent que le moteur Hall-Scott A-7 présentait des problèmes de lubrification, notamment lors des phases de vol en configuration hydravion. La remontée de leurs informations fit qu’une nouvelle commande soit passée pour un changement de motorisation. Surtout l’état-major de l’US Navy voulait tester une nouvelle architecture : un flotteur central unique et deux petits flotteurs annexes. Cette évolution apparut au cinquante-et-unième Type 39.
Désormais donc on parlait d’Aeromarine Type 39A pour les cinquante premiers appareils à moteurs Hall-Scott A-7 et de Type 39B pour les suivants. Sur ceux ci le changement de flotteur entraîna un léger agrandissement de l’empennage. Dans le même temps le nouveau moteur redessinait totalement l’avant de l’aéronef. Il s’agissait d’un Curtiss OXX-3 à huit cylindres en V d’une puissance de 100 chevaux. Il avait déjà fait ses preuves sur l’hydravion à coque Curtiss Type F.
L’Aeromarine Type 39 aurait pu faire toute sa carrière dans l’ombre, comme la majorité des avions et hydravions d’entraînement de l’époque s’il n’avait pas été choisi en 1921 pour assurer la formation des pilotes d’aviation embarquée. À ce titre, et entre les mains du pilote de l’US Navy Godfrey de Courcelles Chevalier, il fut le tout premier avion à apponter sur un porte-avions américain. C’était l’USS Langley et cela eut lieu le 26 octobre 1922 sur un Type 39B. Le navire croisait à la vitesse de dix nœuds à ce moment là. L’aviateur n’eut pas le temps de goûter sa célébrité qu’il se tua moins d’un mois plus tard dans le crash d’un Vought VE-7. Après ce vol historique les Type 39B appelés à opérer sur ce bâtiment de guerre en portaient le nom sur le flanc du fuselage, une tradition qui perdura là aussi assez longtemps dans l’aéronavale américaine.
Finalement l’US Navy conserva ses Aeromarine Type 39 encore jusqu’à l’été 1926, les remplaçant par des Consolidated NY-1 nettement plus modernes. Une dizaine de Type 39B fut brièvement utilisée en 1925 afin de tester l’entraînement aux décollages et atterrissages depuis la neige, notamment en Alaska. Après son service actif le Type 39 connut une carrière civile durant laquelle plusieurs exemplaires furent repeints selon des schémas de livrées de la Première Guerre mondiale pour les besoins d’Hollywood. Il n’était alors pas rare de croiser un tel biplan aux couleurs de l’Allemagne impériale.
De manière assez surprenante un seul exemplaire seulement est aujourd’hui préservé, au musée du Old Rhinebeck Aerodrome dans l’état de New York.
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