En 1905 le Japon gagna une guerre territoriale contre la Russie, raflant au passage une large part de l’extrême-Orient de ce pays. Il s’agissait de la Mandchourie russe. Vingt-six ans plus tard il attaqua et envahit la partie sud de ce territoire, appartenant cette fois à la Chine. Dans les deux cas les conflits furent rapides et… sanguinaires, les armées nippones ayant largement le dessus sur leurs adversaires. En 1932 fut établi le Mandchukuo un état fantoche d’un peu plus d’un millions et cent trente milles kilomètres carrés qui regroupait donc les anciennes Mandchourie chinoises et russes, le tout évidemment sous administration impériale japonaise. Durant ses treize ans d’existence ce pays eut même sa propre force aérienne, la Manshū Teikoku Kūgun, qui alignait quasi exclusivement des avions et hydravions d’origine japonaise. Durant trois années ses missions de reconnaissance tactique reposèrent sur un seul et unique modèle : le biplan Nakajima Ki-4 Alder.
C’est à l’été 1931 que l’état-major de l’armée impériale japonaise émit une fiche programme relative au développement d’un nouvel appareil de reconnaissance destiné au remplacement du Kawasaki Type 88 alors en dotation.
Les avionneurs Mitsubishi et Nakajima y répondirent avec chacun un appareil différent. Quand le premier proposait d’adapter le K3M qu’il avait conçu pour la formation intermédiaire des pilotes de la marine impériale le second avança un avion totalement nouveau… ou presque ! En effet son aéronef reprit le fuselage d’un avion alors en cours de développement également pour l’aéronavale sous la forme du chasseur biplace NAF-1
Les deux avions reçurent les désignations de Mitsubishi Ki-7 et Nakajima Ki-4 dans la nouvelle nomenclature japonaise. Un prototype et un avion de présérie furent commandés à chaque fois.
Extérieurement le Nakajima Ki-4 était tout ce qu’on pouvait trouver de plus académique pour l’époque. C’était un biplan de construction mixte en bois entoilé, contreplaqué, et feuilles de métal. Il était doté d’un train d’atterrissage classique fixe et d’un poste de pilotage biplace en tandem à l’air libre, le mitrailleur-observateur prenant naturellement place à l’arrière. Le Ki-4 était animé par une version locale du fameux Wright R-1820 Cyclone américain à neuf cylindres en étoile appelé Nakajima Ha-8 Hikari au Japon. Celui-ci entraînait une hélice bipale en bois. Son armement se composait de trois mitrailleuses britanniques Vickers de calibre 7.7 millimètres, deux synchronisées tirant donc en position de chasse et la troisième sur affût mobile arrière. Jusqu’à dix bombes légères de cinq kilogrammes chacune pouvait être emportées sous fuselage et sous le plan inférieur de voilure.
Il réalisa son premier vol le 6 mai 1933.
Face à un Mitsubishi Ki-7 totalement bricolé à partir du K3M le Nakajima Ki-4 n’eut aucun mal à enlever le marché. Une forte consolation après l’échec de l’avionneur avec le chasseur NAF-1. Une commande officielle fut passée pour 380 exemplaires. Cinquante-sept furent assemblés par Tachikawa.
Les premiers exemplaires de série entrèrent en service en mars 1934. L’aviation impériale japonaise les déploya immédiatement au Mandchukuo mais aussi le long des frontières communes avec la Chine et l’Union Soviétique. Cette dernière comptait alors bien récupérer la Manchourie russe et harcelait donc les forces nippones. Sur le continent les Nakajima Ki-4 n’opéraient qu’avec leur pleine charge de bombes légères, assurant parfois bien plus des missions d’attaque au sol et d’appui tactique que de pure reconnaissance armée.
Début 1938 l’avionneur Tachikawa fonda au Mandchukuo la société Mansyu. Son rôle était alors de produire des avions et hydravions, et éventuellement même d’en développer de zéro, pour les stricts besoins de cet état. C’est ainsi qu’une de ses premières fonctions fut de construire sous licence locale un lot de cent vingt-six Nakajima Ki-4 pour les besoins de la Manshū Teikoku Kūgun. Strictement identiques aux exemplaires assemblés dans l’archipel ceux-ci furent mis en œuvre dès l’automne 1938 contre la résistance locale tandis que les Ki-4 de l’aviation japonaise se concentraient sur les forces chinoises indépendantes.
Pourtant en 1940 l’apparition de nouveaux avions de reconnaissance au Japon, comme le Mitsubishi Ki-15, força le Nakajima Ki-4 à changer de rôle. Désarmés et dotés d’une double commande la majorité des exemplaires encore en état de vol se transformèrent en avions d’entraînement initial et intermédiaires. De leur côté les Ki-4 de Mandchukuo continuaien de surveiller et de harceler la résistance locale et les forces chinoises. Pourtant quelques semaines avant l’attaque japonaise contre les États-Unis à Pearl Harbor la majorité des Ki-4 présents dans l’état fantoche furent eux-aussi désarmés et affectés à des missions d’entraînement.
Quand les services officiels américains, désormais entrés en guerre contre l’empire du Japon, établirent la liste de leur nomenclature le Nakajima Ki-4 n’était plus un avion de reconnaissance armée mais un simple biplan d’entraînement. Il reçut donc logiquement un nom de code sur la base d’un arbre, à savoir Alder, en français l’aulne.
Il n’était alors pas rare que ces biplans servent également au remorquage des cibles volantes et/ou des planeurs de sélection en vol. Finalement le Mandchukuo retira du service l’ensemble de ses Ki-4 fin 1942 et le Japon à l’été 1943. Ils étaient alors obsolètes.
Avion robuste et bien pensé le Nakajima Ki-4 Alder connut une carrière finalement assez riche pour un avion d’arme. Elle fut cependant plus discrète comme avion école. Au moins deux exemplaires furent également utilisés comme hydravions à flotteurs pour des reconnaissances côtières, sans grand résultat.
Aucun Ki-4 n’est parvenu jusqu’à nous.
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