Face à la riposte de l’Ukraine la Russie éloigne du front une partie de ses Tu-95 Bear.

Dans cette «opération spéciale de dénazification» le mot d’ordre désormais de l’aviation stratégique russe c’est : «courage, fuyons» ! Depuis environ un mois la contre-offensive ukrainienne ne se fait plus uniquement au sol, dans la boue et la neige, mais aussi dans les airs grâce à des attaques de drones Baykar Bayraktar TB.2 contre des installations militaires ennemies. Et cela fonctionne tellement bien qu’un groupe d’au moins six bombardiers Tupolev Tu-95 Bear a récemment quitté sa base d’Engels-2 pour réapparaître à l’autre bout de l’immensité du territoire russe. Ces grands quadrimoteurs à turbopropulseurs sont ainsi à l’abri des avions sans pilote frappés des marquages ukrainiens.

Le souci avec le Tupolev Tu-95 Bear c’est que ça n’est pas un Sukhoi Su-30 Flanker-C ou même un Su-35 Flanker-E, c’est un avion symbolique de la supposée puissance aérienne russe. Mais surtout c’est un avion finalement assez rare avec à peine plus de quarante exemplaires encore en dotation, les derniers d’une machine qui remonte tout de même aux années 1950. Par comparaison les États-Unis alignent aujourd’hui un peu plus de soixante-dix Boeing B-52H Stratofortress contemporains du Tu-95 Bear.
Surtout nous sommes dans une société de l’hyper médiatisation et de la connaissance numérique : même la Russie de Vladimir Poutine ne peut plus cacher ses avions au reste du monde. Les quelques Tu-95 Bear encore en service sont bien connus des passionnés d’aviation et encore plus des experts aéronautiques et des spécialistes des services de renseignement.

Aussi quand entre la toute fin décembre 2022 et ces deux premiers jours de janvier 2023 on découvre que six d’entre eux ont quitté leur habituelle base d’Engels 2 à 550 kilomètres de la frontière ukrainienne on peut se poser des questions. Mais alors quand ces mêmes avions resurgissent comme par miracle à 6000 kilomètres de là sur la base d’Ukrainka dans l’Extrême-Orient russe le doute n’est plus permis : la Russie les a évacué de la menace des drones de combat ukrainiens.
Sur le papier les Tupolev Tu-95 Bear du 184e régiment de bombardiers lourds sont stationnés à Engels-2 depuis le début des années 1960. C’est un véritable reliquat de la guerre froide. Pourquoi alors les envoyer à Ukrainka où les installations du 182e régiment de bombardiers lourds sont notoirement connues pour être trop exigües ? La seule réponse possible réside dans l’urgence de redéployer ces avions loin du front.
N’oublions pas qu’à deux reprises, les lundis 5 et 26 décembre 2022, des raids aériens menés sans doute les deux fois par des Baykar Bayraktar TB.2 ukrainiens, ont détruit des installations d’Engels-2. Au moins deux voire trois bombardiers Tu-95 Bear ont été atteints par les bombes des avions sans pilotes de l’aviation ukrainienne.

Trois jours après la seconde attaque, le jeudi 29 décembre 2022, un autre drone d’origine turque mais porteur des marques de nationalité de l’Ukraine était descendu par la DCA russe aux abords de la base du 184e régiment de bombardiers lourds. Bizarrement c’est dès le lendemain que les premiers mouvements de Tupolev Tu-95 Bear ont été observés.
Mais au fait pourquoi les forces ukrainiennes ciblent t-elles Engels-2 et pas une autre base plus proche de leur territoire ? Car c’est de là que décollent les bombardiers stratégiques russes qui tirent, depuis l’espace aérien souverain russe, les missiles de croisière qui quasi quotidiennement frappent les populations civiles ukrainiennes. Contre le terrorisme d’état de Moscou les autorités de Kyiv n’ont eu d’autres choix que d’aller riposter en territoire ennemi.

Sous bien des aspects le Tupolev Tu-95 Bear a des allures de dinosaure volant.

Quelque soit l’explication que Moscou fournira pour la disparition d’Engels-2 et la réapparition à Ukrainka de ces six Tupolev Tu-95 Bear le mal est fait : c’est une catastrophe en terme de communication. C’est surtout la preuve qu’en plus d’être incapable d’obtenir la supériorité aérienne au-dessus de l’Ukraine la Russie ne réussit même pas à la garantir dans son propre espace aérien. Elle préfère donc mettre à l’abri ses avions loin de la portée de l’aviation ukrainienne. Ce conflit est aussi une guerre de l’information, et sur ce plan là Moscou semble la perdre de jour en jour.
Affaire à suivre.

Photos © Organisation du Traité de l’Atlantique Nord.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

2 Responses

  1. Bonjour et bonne année,
    vous indiquez que les frappes sur la base d’Engels ont sans doute été réalisées avec des Bayraktar TB.2
    Selon d’autres sources il s’agirait de drones de reconnaissance TU-141 modifiés,
    Pourriez-vous nous indiquer ce qui vous fait plutôt penser à ces drones turcs ?
    Merci

    1. Le Tupolev Tu-141 modifié, c’est l’argument numéro 1 des « médias » proches de Moscou. Bizarrement il suffit de voir avec la com’ officielle du ministère ukrainien de la défense pour voir qu’elle parle bien des drones MALE fournis par la Turquie.

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