Durant un quart de siècle l’hélicoptère biturbine Sikorsky MH-53J Pave Low III a représenté la quintessence des opérations spéciales de l’US Air Force. Grâce à lui les commandos américains ont pu s’infiltrer loin derrière les lignes ennemis pour libérer des otages ou simplement renseigner le Pentagone sur celles et ceux qui voulaient nuire à l’Amérique. Autant dire que leur succession allait être tout sauf une sinécure. Il aura fallu une machine d’exception pour assurer cette fonction, un aéronef qui malgré quelques défauts a su conquérir le cœur de ses équipages autant que celui des forces spéciales américaines : le Bell-Boeing CV-22 Osprey.
Au sein du programme du Bell-Boeing V-22 Osprey l’US Air Force a toujours été une sorte de vilain petit canard. Alors que l’US Marines Corps et l’US Navy avaient une vision à chaque fois bien claire de ce que devaient être leurs futures applications respectives du convertiplane elle restait dans le flou, révélant juste que le caractère spécial de la machine. En gros l’US Air Force expliquait que son CV-22B serait adapté aux opérations spéciales mais sans trop rentrer dans les détails.
Beaucoup plus complexe que le MV-22B de l’US Marines Corps le Bell-Boeing CV-22B Osprey était en effet appelé à devenir une machine spécialisée dans les opérations d’infiltrations et d’exfiltrations des forces spéciales américaines. L’US Air Force pensa même un temps le débaptiser afin de le renommer Combat Osprey montrant ainsi une sorte de filiation avec le Lockheed MC-130H Combat Talon II. Finalement l’idée en resta au stade de projet et le CV-22B conserva son appellation commune. Pourtant il était désormais clair que les missions dévolues à ces convertiplanes ne figureraient pas parmi les plus médiatisées.
Parmi les équipements spécialement dédiés à cette version on retrouve actuellement un FLIR de dernière génération couplé à une caméra infrarouge. Le CV-22B Osprey dispose également d’un radar cartographique AN/APQ-186 pour les vols à basse et très basse altitude. Bien sûr il posséde tout l’arsenal défensif contre les menaces air-air et sol-air comme les systèmes AN/AAQ-24 et AN/ALQ-21. Niveau armement deux mitrailleuses Gatling type M134 Minigun de calibre 7.62 millimètres ont été installées de part et d’autres du fuselage, en mode gundoor.
Penser pour voler loin derrière les lignes ennemies et en revenir le CV-22B a été conçu pour emporter en soûte mais aussi sur des points d’emport externe des réservoirs additionnels de carburant.
C’est en mars 2006 que le 71st Special Operation Squadron a réceptionné et mis en service ses premiers Bell-Boeing CV-22B Osprey. Pas question cependant d’envoyer alors ces avions sur les théâtres d’opérations extérieures ou sur des missions clandestines. Le 71st SOS est avant tout une unité d’entraînement avancé et de transformation opérationnelle. Les pilotes et équipages doivent désapprendre tout ce qu’ils connaissent des hélicoptères avant de rejoindre les convertiplanes. À la différence profonde avec les MV-22B de l’US Marines Corps les cinquante CV-22B de l’US Air Force sont avant tout appelés à voler avec les moteurs basculés en version avion. La formation à la translation est donc essentielle au sein du 71st SOS.
Le 8th Special Operations Squadron devient en mars 2009 la première unité officiellement opérationnelle sur CV-22B, ouvrant la voie à son entrée en première ligne. Le vide laissé fin septembre 2008 par la mise en retraite du dernier Sikorsky MH-53M Pave Low IV est donc vide comblé.
La plus part des missions des Bell-Boeing CV-22B Osprey de l’US Air Force étant encore couvertes par le Top Secret américain il nous est difficile de les aborder. Certaines ont pourtant transpiré dans les médias et ouvrages de référence comme par exemple la traque du terroriste islamiste Oussama Ben Laden entre 2010 et 2011 en Afghanistan et au Pakistan ou encore les évacuations de ressortissants américains et européens au Soudan du Sud en décembre 2013. Le Pentagone a aussi reconnu des soutiens ponctuels à l’opération Barkhane menée par la France au Sahel entre 2014 et 2022. Pourtant la carrière du convertiplane n’est pas exclusivement tournée vers la menace djihadiste.
Elle se dessine aussi en Europe autour des accords de défense notamment avec la Norvège et le Royaume-Uni. Les appareils du 7th Special Operations Squadron sont d’ailleurs stationnés à l’année sur la base anglaise de RAF Mildenhall.
En 2020 les convertiplanes des opérations spéciales américaines sont retournés en Afrique afin d’appuyer l’intervention en Somalie.
L’année 2022 a été marquée par la découverte d’un grave problème mécanique, appelé «engagements d’embrayages durs». Il a même conduit à l’atterrissage en urgence d’un exemplaire dans un parc national norvégien. Suite à quoi l’ensemble de la flotte des Bell-Boeing CV-22B Osprey a été temporairement immobilisée sans pour autant que l’US Marines Corps ou l’US Navy ne prenne une décision similaire.
Les vols ont repris à la fin de l’été.
Avion ô combien utile aux opérations spéciales américaines le Bell-Boeing CV-22B Osprey est aujourd’hui la version la moins connue du V-22. De par son avionique de pointe et ses missions dédiées elle est aussi sans doute la moins aisée à exporter.
En savoir plus sur avionslegendaires.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.