C’est un des plus beaux succès de l’industrie aéronautique européenne. Le 9 octobre 1987 volait l’hélicoptère militaire EHI EH-101 conçu par les constructeurs Agusta et Westland. Il devait alors préfigurer le futur de la voilure tournante en Europe, à un époque où les constructeurs nationaux étaient encore la norme. Ce consortium European Helicopter Industries est même considéré comme précurseur de celui qui allait devenir son grand concurrent : Eurocopter.
En effet en cette fin d’année 1987 l’industrie aéronautique européenne est balbutiante et encore uniquement civile. Airbus fait figure de cas à part autour de ses biréacteurs gros-porteurs A300 et A310 alors en service et le prototype de son révolutionnaire A320 qui a réalisé son premier vol en février de la même année. Dans le domaine des voilures tournantes les programmes européens n’existent en fait pas encore, en tous cas pas au sens où on l’entend aujourd’hui. Aérospatiale en France, Agusta en Italie, M.B.B. en Allemagne de l’Ouest, et Westland au Royaume-Uni sont globalement concurrents malgré l’Anglo-French Helicopter Agreement.
En fait dès 1984 l’accord entre Agusta et Westland est signé pour un hélicoptère militaire gros porteur dédié au transport de troupes, à la lutte anti-sous-marine, et aux recherches et sauvetages en mer. L’EHI EH-101 est né.
Un an plus tard les quatre constructeurs européens se voient confier par l’OTAN un programme de développement d’un hélicoptère d’assaut conjoint. Les Britanniques n’y croient pas, le voyant logiquement comme concurrent de l’EH-101 et donc d’une certaine manière redondant. Ils claque la porte de la NATO Helicopter Management Agency. L’industriel néerlandais Fokker a entre-temps rejoint le groupe de travail. Agusta de son côté n’a aucun souci à jouer sur les deux tableaux.
C’est ce qui explique que si en 2022 Agusta a disparu, de même que son alliance avec Westland, leur maison mère Leonardo puisse assembler à la fois l’héritier de l’EH-101, alias AW.101 Merlin, et le descendant du programment atlantiste connu aujourd’hui comme NH-90 Caïman. Ce dernier est d’ailleurs développé conjointement avec Airbus Helicopters, son principal concurrent sur le Vieux Continent… mais aussi ailleurs dans le monde.
Et 35 ans après ce vol inaugural dire que l’AW.101 Merlin est un succès est un doux euphémisme. S’il a échoué à transporter le Président des États-Unis sous la forme d’un VH-71 Kestrel demeuré sans suite il a su néanmoins s’imposer en Amérique du nord. Sa sous-version CH-149 Cormorant est l’hélicoptère standard de recherches et de sauvetages au sein de l’Aviation Royale Canadienne. Il y a remplacé le Sikorsky CH-124 Sea King.
En fait prendre le relais du «roi des mers» est sans doute ce que le Merlin fait de mieux puisque même la version britannique de l’hélicoptère lui laisse souvent la place, notamment bien sûr au Royaume-Uni. Il s’est même payé le luxe d’assurer la relève du Westland Commando.
Aujourd’hui des Leonardo AW.101 Merlin volent aussi bien en Afrique grâce à l’Algérie et au Nigeria qu’en Asie via l’Arabie-Saoudite, l’Indonésie, le Japon, et le Turkménistan que bien entendu en Europe où ses deux pays concepteurs l’utilisent ainsi que le Danemark, la Norvège, la Pologne, et le Portugal. À la fois seul hélicoptère lourd et seul triturbine produit en Europe actuellement l’AW.101 est un hélicoptère haut de gamme.
C’est également une des machines les plus impressionnantes de ce premier quart de 21e siècle. Il y a même fort à parier qu’il sera encore en production cinquante ans après son premier vol, c’est à dire dans quinze ans.
Affaire donc à suivre.
Photos © Leonardo.
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Une réponse
Petite correction Arnaud le Merlin au Canada (CH-149 Cormoran) à remplacer le CH-113 Labrador une version du CH-46 Sea Knight de Boeing.Le CH-124Sea King a été remplacé par le CH-148 Cyclone une version militaire du S-92 de Sikorsky.