L’état-major de l’US Air Force tente de faire bonne figure en déclarant que désormais son ravitailleur en vol biréacteur peut opérer partout dans le monde. En fait si c’est géographiquement vrai c’est tactiquement faux puisque le Boeing KC-46A Pegasus demeure inapte au ravitaillement en vol sur au moins deux types d’avions différents. Le plus grave est quand cela concerne le Fairchild-Republic A-10C Thunderbolt, principal avion d’attaque au sol de l’arsenal des États-Unis. Pour l’autre avion l’urgence est moindre puisqu’il appartient à l’US Navy.
L’inaptitude au ravitaillement en vol de l’A-10C Thunderbolt II n’est pas nouvelle. Le Pentagone connait ce souci depuis un peu plus de trois ans puisqu’à l’été 2019 il a versé à l’avionneur Boeing une enveloppe de cinquante-cinq millions de dollars afin de corriger le défaut de perche de ravitaillement en vol du KC-46A Pegasus. Les essais avec le Warthog ont démontré que celle-ci est en effet trop rigide pour permettre les transferts de carburant à basse et moyenne altitude. Deux solutions existaient alors : obliger les pilotes d’avions d’attaque à monter en haute altitude pour se ravitailler ou revoir la flèche stabilisatrice de la perche du tanker. C’est cette seconde solution qui fut choisi par l’US Department of Defense, ses généraux estimant que les pilotes d’A-10C Thunderbolt II en mission sur le champ de bataille avaient besoin de ravitailleurs opérant à moyenne altitude.
Un peu plus de trois ans plus tard le défaut de rigidité de la perche n’est toujours pas corrigé et l’US Department of Defense commence à sérieusement le faire savoir à l’avionneur. Pour déminer la situation on demande donc à l’US Air Force de montrer les qualités de l’avion, soulignant au passage qu’il est capable de ravitailler tous les avions furtifs américains, y compris le Northrop B-2A Spirit. Comme si en 2022 ravitailler de tels avions d’armes avait quelque chose d’extraordinaire.
Il y a surtout un côté presque schizophrène à voir l’US Department of Defense presser Boeing pendant que l’US Air Force qui en dépend flatte les qualités de son avion.
En fait Boeing n’oublie pas que son ravitailleur en vol est présent sur plusieurs marchés extérieurs en concurrence avec l’Airbus DS A330 MRTT européen. Déjà que ce dernier le surclasse généralement haut la main si en plus désormais il apparait que l’avion n’est pas aussi efficace chez lui qu’espérer cela pourrait vite devenir tragique pour lui.
Aujourd’hui seuls Israël et le Japon l’ont commandé mais il se dit de plus en plus que l’Italie pourrait en acheter deux afin de renforcer ses KC-767 d’une conception très proche quoique plus ancienne. Dans le même temps des pays comme le Chili ou Taïwan sont considérés comme de sérieux potentiels acheteurs de l’avion.
On comprend de ce fait mieux que l’avionneur ait communiqué il y a quelques semaines sur la capacité du KC-46A Pegasus à ravitailler les avions de l’alliance Atlantique.
Surtout en parallèle du Fairchild-Republic A-10C Thunderbolt II c’est le Northrop-Grumman E-2D Advanced Hawkeye qui est aujourd’hui incapable d’être ravitaille en vol par le Boeing KC-46A Pegasus. Ironie de l’histoire le Grumman E-2C Hawkeye de plus ancienne génération lui semble apte à recevoir du carburant de sa part. Dommage que cette version disparaisse petit à petit de l’aéronavale américaine.
Vous l’aurez compris le Boeing KC-46A Pegasus ressemble de plus en plus pour l’US Air Force au sparadrap du capitaine Haddock.
Photo © US Air Force
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10 Responses
c’est dommage, je connais un constructeur qui avait du bon matos à proposer à l’us air force, il était allié à une grosse société américaine en plus pour le contrat à l’époque…
Pas de commentaire sur les armes des USA…..occupons nous des nôtres ….c est pas brillant ….balayonds devant notre porte ….
Bonjour, j’avoue avoir du mal à comprendre votre commentaire. Voudriez-vous que tous les articles du site ne concernent que l’aéronautique européenne voire française ? Merci de m’éclairer.
Scénario qui ressemble à celui de Boeing qui essaie de concurrencer l’A-320 avec du vieux matos qu’est le B-737
Bonjour. C’est vrai que, vu la taille encore conséquente de la flotte de A10, ça fait désordre.
Cependant, il y a une question d’ordre opérationnel que je me pose. Dans les missions, les A10 allaient-ils ravitailler auprès des KC135 ou KC10, ou bien allaient-ils un peu plus près auprès des KC130 (ce qui, en passant, rend la proposition d’Embraer avec son KC390 plutôt pertinente, à mon avis)? Qu’en dites-vous?
KC-10A Extender et KC-135R Stratotanker sont en effet adaptés aux opérations de ravitaillement en vol des A-10C.
Bonjour Arnaud. Merci d’avoir pris le temps de me répondre. Et merci à vous et à toute l’équipe de bénévoles (c’est à rappeler) pour l’animation de ce site.
Bien à vous
les A10 utilise un système de perche télescopique (sur le ravitailleur) typique de l’USAF (et utilisé par les pays ayant achetais des F16/F15/F35) qui n’est disponible que sur les « gros » ravitailleurs (KC10, KC135, KC46…). les KC130 utilise le système de tuyau souple et panier utilisé par l’US navy, l’USMC et les helicopteres (ainsi que quasiment tout les forces etranger sauf celle ayant F16/F16/F35). donc impossible de ravitailler un A10 avec un KC130.
Bonjour Val Venaut. Merci pour cette précision. J’aurai appris quelque chose aujourd’hui, c’est donc une bonne journée
Pas simple la mise au point. La Marine Nationale a acheté des Northrop-Grumman E-2D Advanced Hawkeye. Certes on ne les a pas encore mais sait-on comment ils seront ravitaillés ? Via un Rafale, un Phénix, un A400M ? Ca serait bête que l’A330 MRTT soit apte plus rapidement que le KC-46A 😉