L’apparition durant la Seconde Guerre mondiale des premiers hélicoptères réellement modernes en Allemagne nazie et aux États-Unis poussa après-guerre l’industrie aéronautique américaine à étudier un concept totalement nouveau : les aéronefs à décollages et atterrissages verticaux. Dans les années 1950 on envisageait alors largement que quinze à vingt ans plus tard tous les avions pourraient décoller et atterrir comme des hélicoptères, s’affranchissant alors des contraintes structurelles que représentaient les pistes. L’une des options technologiques envisagées alors était la conversion, c’est à dire l’utilisation d’hélice qui par translation étaient appelée à devenir des pales. L’un des premiers avions réellement réussis dans ce domaine fut un prototype conçu par un tout petit bureau d’étude : le Doak VZ-4.
En 1955 l’US Army présenta officiellement une fiche programme destinée à rechercher un aéronef léger permettant de valider le concept technologique de convertiplanes. Celui-ci était alors des plus abstraits, reposant sur des principes essentiellement connus de quelques ingénieurs et des enfants lisant des bandes dessinées de science-fiction. Il fallait désormais passer à la réalité. Les militaires américains reçurent une quinzaine de propositions très différentes, marquant ainsi un véritable intérêt de la part des avionneurs. Seuls quatre furent retenus.
Ceux-ci étaient Doak, Fairchild, Ryan, et Vertol. Moins connu des quatre constructeurs la société Doak était en fait un bureau d’études conçu durant la Seconde Guerre mondiale par Edmund R. Doak Junior. Il était alors numéro 2 de l’avionneur Douglas mais voulait également développer pour son compte ses propres projets.
Les quatre prototypes commandés étaient alors désignés Doak Model 16, Fairchild Model 224-1, Ryan Model 92, et Vertol Model 76. Chaque avionneur avait décidé d’étudier une piste différente de ses concurrents.
L’équipe d’Edmund R. Doak Junior avait choisi l’option du double rotor caréné d’extrémité de voilure. Afin d’épouser au maximum les concepts du convertiplane ce double rotor se devait d’être basculant. Pour autant le Doak Model 16 ne possédait qu’un seul et unique turbomoteur : un Avco-Lycoming YT53 de 840 chevaux. Il était installé dans le fuselage, derrière de le poste de pilotage biplace en tandem.
Afin de réduire les coûts de développement de son Model 16 Doak réutilisa des éléments prélevés sur d’autres avions. Les sièges provenaient de deux chasseurs North American F-51D Mustang tandis que plusieurs équipements électroniques et hydrauliques provenaient d’un avion d’entraînement avancé Lockheed T-33A T-Bird. Tous deux étaient des appareils réformés. Le train d’atterrissage fixe du Model 16 avait été prélevé sur l’avion personnel d’Edmund R. Doak Junion : un monoplan de tourisme Cessna 182 Skylane.
Au cours de son assemblage le Model 16 reçut la désignation officielle de Doak VZ-4. Il fut pris en compte par l’US Army qui procéda aux premiers essais statiques aux côtés des équipes de l’avionneur. Dès le roulage l’avion expérimental se révéla manœuvrable.
C’est le 25 février 1958 qu’il vola pour la première fois depuis les installations du constructeur à Torrance dans le sud de la Californie. Il ne s’agissait alors que d’un décollage, vol stationnaire, et atterrissage à la verticale. Il fallut attendre le 5 mai 1958 pour voir la première translation entre vol vertical et horizontal, c’est à dire le premier véritable vol inaugural de la machine
Au total l’US Army et Doak réalisèrent cinquante heures d’essais en vol sur ce prototype dont dix-huit furent exclusivement employées pour des décollages-atterrissages verticaux et des vols stationnaires. À l’issue de ce laps de temps le Doak VZ-4 quitta Torrance pour être transféré à Edwards AFB où il fut pris en compte par la NASA.
En ce mois de mars 1963 une seconde vie débutait alors pour le Doak VZ-4. Une nouvelle phase d’essais allait débuter. Désormais ils étaient destinés à enrichir la connaissance générale sur les convertibles. Des ingénieurs de constructeurs comme Bell, Douglas, ou encore Northrop assistèrent aux essais californiens de l’avion expérimental.
En fait l’US Army avait changé son fusil d’épaule et ne voyait plus dans l’avion à décollages et atterrissages verticaux une machine idéale. L’hélicoptère lui semblait plus adapté.
Sur dix années, entre 1963 donc et 1973, la NASA se servit du VZ-4 comme plateforme pour les essais de translations. Un total de quarante-neuf heures de vols fut réalisé à cette occasion.
Bien que biplace en tandem le VZ-4 vola surtout comme monoplace.
À l’issue de cette période l’avion expérimental fut rendu à l’US Army qui le cloua au sol dans un musée. C’est l’US Army Air & Transportation Museum de Fort Eustis en Virginie qui présente cette machine si particulière. Il voisine avec un de ses «concurrents» : le Ryan VZ-3 Vertiplane. Le Doak VZ-4 a été repeint selon le schéma qu’il arborait avant de rejoindre la NASA.
Véritable laboratoire volant de l’avion convertible le Doak VZ-4 fut riche en enseignements tant pour l’US Army que plus tard pour la NASA. Sa technologie n’est pas unique puisqu’en France le Nord N.500 Cadet vola sur le même concept.
Il est à signaler que le VZ-4 était réputé agréable à piloter, notamment à basse vitesse. Pour autant il était fragile. Les pales de ses rotors avaient une espérance de vie de trois heures de vols seulement. C’est dire si elles furent souvent changées. Pour la petite histoire l’atelier où cet avion a été assemblé accueille aujourd’hui une partie de la zone d’assemblage des hélicoptères Robinson.
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