L’une des technologies les plus impressionnantes de l’histoire aéronautique est sans nul doute celle consistant à faire décoller et atterrir des avions de combat à la verticale. Et dans cette course entre l’est et l’ouest, entre le Pacte de Varsovie et l’OTAN c’est un pays de ce second bloc qui l’emporta. L’industrie britannique mit au point dès le début des années 1960 le révolutionnaire P.1127 Kestrel qui préfigurait les futures machines de série. Seulement voilà il fallait désormais penser à des avions d’entraînement avancé et de transformation opérationnelle destinés à former les futurs pilotes appelés à voler sur ce type de machines. C’est ainsi qu’apparut le Hawker-Siddeley Harrier T.2 et ses successeurs.
Lorsque le 1er avril 1969 le Hawker-Siddeley Harrier GR.1 entre en service opérationnel dans la Royal Air Force il existe un gros souci pour les militaires britanniques : les pilotes doivent se former directement sur monoplaces. Alors pour tenter d’aider quelques biplaces d’entraînement Hawker Hunter T.7 sont mis à disposition des escadrilles de Harrier GR.1. Mais entre les deux avions les différences sont bien trop flagrantes et jamais le Hunter ne pourra servir à transformer les futurs pilotes. Il est alors demandé à Hawker-Siddeley de développer une version d’entraînement avancée du Harrier GR.1.
Officiellement désigné Harrier T.2 ce nouvel avion est alors ni plus ni moins qu’un Harrier GR1 modifié à la va-vite par l’ajout d’une seconde place. Plusieurs équipements sont déposés, comme l’armement ou encore le radar. Résultat le nouvel avion ne peut voler que de jour et par beau temps. Mais l’essentiel est là : en septembre 1969 l’avionneur Hawker-Siddeley fait voler le prototype du premier jet d’entraînement à décollages et atterrissages verticaux.
Les premiers exemplaires de série entrent en service quelques semaines plus tard en janvier 1970. Et dans la foulée apparait le Harrier T.2A doté du même réacteur Pegasus Mk-102 que le Harrier GR.1A. À la différence du Harrier T.2 ce nouvel avion peut emporter un armement minimaliste mais bien réel : des roquettes en paniers et des bombes lisses d’exercices. Et à chaque fois qu’un Harrier monoplace apparait un biplace d’entraînement avancé le suit. C’est ainsi que lorsque la Royal Air Force met en ligne ses Harrier GR.3 elle reçoit le Harrier T.4 et sa sous-version simplifiée Harrier T.4A inapte aux entraînements au tir.
À l’été 1978 la Royal Navy fait l’acquisition de six exemplaires sous la désignation Harrier T.4N. En fait ils sont très similaires aux Harrier T.4 mais permettent de former les pilotes destinés à voler sur les nouveaux Sea Harrier FRS.1. Ils sont suivis en 1993 des Harrier T.8, les premiers biplaces d’entraînement spécialement conçus à la demande de la Fleet Air Arm. Ces nouveaux avions sont destinés à former les pilotes évoluant alors sur le très modernisé Sea Harrier FA.2. De l’avis général d’ailleurs les Harrier T.8 sont les plus évolués de tous les avions d’entraînement à décollages et atterrissages verticaux développés au Royaume-Uni. Ils sont même capable d’emporter et de tirer des missiles air-air AIM-9 Sidewinder.
Les Harrier T.8 de la Royal Navy ont tous été optimisé pour l’emploi au «Big Jump», le tremplin spécialement adapté à l’entraînement aux opérations sur porte-avions.
Mais les Harrier d’entraînement ne servent pas que dans les rangs de la Royal Air Force et de la Royal Navy. Au Royaume-Uni la société QinetiQ en emploie quelques exemplaires, principalement des Harrier T.8 réformés pour des soutiens aux essais en vol et aux essais d’armement, notamment dans le cadre du programme de soutien britannique à l’avion de combat furtif américain Lockheed-Martin F-35B Lightning II. Comme quoi cette technologie ancienne peut encore servir même pour les plus modernes avions.
À l’export aussi l’avion connait une petite carrière. L’un des plus emblématiques utilisateurs est l’Indian Navy qui met en service en fin 1983 un lot de Sea Harrier FRS.51 ainsi que des Harrier T.60, dérivés des Harrier T.4N de la Royal Navy. Comme pour les avions de la marine britanniques ceux de la marine indienne permettent non seulement d’apprendre à voler sur des jets à décollages et atterrissages verticaux mais également à opérer sur porte-avions. C’est bien souvent à bord de leurs Harrier T.60 que les pilotes indiens appontent pour la première fois. Ils servent aussi longtemps que les Sea Harrier FRS.51.
L’autre grande version est le TAV-8A Harrier destiné à l’US Marines Corps et construite à seulement huit exemplaires. Comme les Harrier T.2 de la RAF ils ne sont pas destinés à être armés et seulement à former les futurs pilotes d’AV-8A Harrier en service dans les rangs de cette force américaine. Une autre version d’export a été conçu comme TAV-8S Matador pour les besoins de l’aéronavale espagnole. Quand dans les années 1990 celle-ci vend ses avions d’attaque AV-8S à la marine thaïlandaise elle en profite pour se séparer aussi de ses deux derniers TAV-8S qui du coup prennent eux-aussi le chemin de l’Asie.
En 2019 la quasi totalité des Hawker-Siddeley Harrier T.2, ou de ses versions dérivés, ne vole plus. Pourtant cet avion est et restera comme le premier jet d’entraînement de l’histoire pouvant décoller à la verticale. Un véritable pan de l’histoire aéronautique sans lequel les autres versions de la famille Harrier n’auraient pu exister. De manière assez surprenante pourtant cet avion n’a pas grand chose à voir avec le McDonnell-Douglas TAV-8B Harrier II américain.
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