L’US Air Force lève (un peu) le voile sur ce que sera son futur chasseur de 6ème génération.

Avec cet article nous entamons les enquêtes d’AvionsLégendaires, des articles réalisés suite à des recherches de plusieurs semaines voire plusieurs mois sur un sujet très précis : ici le futur chasseur américain de 6ème génération. L’US Air Force, la DARPA, et les trois grands avionneurs américains travaillent actuellement à définir ce que sera le successeur des F-22 Raptor et F-35 Lightning II. Pour l’instant ce futur avion tient en trois mots-clefs : furtif, hypersonique, et intelligent. À n’en pas douter il devrait révolutionner le monde aéronautique à l’horizon 2045-2050.

En fait les Américains font preuves depuis quatre ou cinq ans d’un réalisme mêlé d’un surprenant pragmatisme dans leur approche de leurs positionnement mondial sur l’échiquier aéronautique de défense. Ils savent qu’ils sont premiers, devant leurs alliés Européens mais surtout leurs adversaires Chinois et Russes. En outre ils ont clairement compris que cette place leur sera contestée, et pas par ceux que l’on pourrait croire. L’industrie aéronautique américaine craint actuellement l’expansion de son homologue chinoise, et dans une moindre mesure russe. Elle sait que l’industrie européenne est en pointe mais qu’elle ne représente pas un danger réel puisque les pays dont elle dépend sont de vieux (et souvent) indéfectibles alliés de Washington.

N’y a t-il pas un antagonisme à voir Boeing, Lockheed-Martin et Northrop-Grumman travailler main dans la main sur un programme visant au final à ne fournir qu’un seul et unique avion à l’US Air Force ? En fait non car ils ne planchent que sur une définition globalisée de ce que sera ce futur avion. Mais surtout les bureaux d’étude les plus confidentiels de ces trois géants (type Skunk Works chez Lockheed-Martin) œuvrent ici sous la coupe des militaires américains. Car il ne faut pas s’y méprendre c’est bien la DARPA et l’US Air Force qui mènent la danse, et sûrement pas les trois avionneurs. Eux ne sont là que parce qu’ils mettront la touche finale : la définition des prototypes et l’usinage des avions de série. Mais le gros du travail aura été fait en amont.
Plus que jamais les ingénieurs militaires prennent le pas sur leurs homologues du secteur privé. Et dans un pays comme les États-Unis c’est une petite révolution… depuis la fin de la guerre froide.

Pour celles et ceux qui l’ignoreraient la DARPA est la Defense Advanced Research Projects Agency. Comme son nom l’indique elle est en charge des projets les plus avancés et donc secrets de la défense américaine. Contrairement à une idée reçue elle ne travaille pas uniquement avec l’US Air Force mais également avec les autres branches du Pentagone. En fait elle les chapeaute littéralement, ce qui aux États-Unis n’a jamais eu de cesse de la faire détester par les complotistes de tous poils.
Pour un domaine qui nous intéresse elle est à l’origine de la plus part des grands projets d’avions furtifs, et ce dès Have Blue et Tacit Blue. Le Bird of Prey est également un de ses bébés technologiques.

Comprenons-donc que ce futur chasseur américain de 6ème génération devra d’ici 25 à 30 ans succéder aux actuels Lockheed-Martin F-22 Raptor et F-35 Lightning II. Outre le fait d’avoir le même constructeur ces deux modèles d’avions ont en commun une signature radar très faible. Leur successeur sera donc comme eux un avion furtif. Mais on parle désormais d’une furtivité accrue. Bien entendu il n’aura aucune aspérité, toutes les charges de combat seront emportés en soute et à la différence du Lightning II il ne devrait pas posséder de capacité d’emport sous voilure.
La furtivité avant tout ? Oui et non.
Oui car doctrinalement l’Amérique n’envisage plus ses raids aériens du futur sans une totale maîtrise des trois dimensions et donc une capacité de pénétration extrêmement renforcée par la furtivité. C’est certainement là un des points sur lesquels les Américains restent les plus vagues.

Et non car l’absence de point d’emport sous voilure renforce l’impression de fluidité des lignes du futur avion. D’ailleurs la vue d’artiste reproduite ci-dessus n’est rien moins qu’une vue d’artiste, sûrement pas une préfiguration de ce futur chasseur de 6ème génération.
En fait plus cet aéronef sera lisse et plus aisément il pourra dépasser la vitesse de Mach 5 nécessaire pour que l’on parle d’aéronef hypersonique. Oui oui vous avez bien lu, cinq fois la vitesse du son. Ou si vous préférez environ 6120km/h. Environ car le ratio Mach et km/h est relatif à l’altitude à laquelle vous vous trouvez. Le Mach n’est pas une vitesse constante.
Sauf qu’aujourd’hui en 2019 Mach 5 c’est impossible à atteindre pour un avion de combat piloté, mais pas pour un avion sans pilote. En effet depuis une petite dizaine d’années la DARPA, l’US Air Force, et Boeing travaillent sur le programme du drone expérimental X-51 Waverider largué en plein vol par un avion-porteur Boeing NB-52H Stratofortress.

Ça tombe bien car ce drone expérimental a déjà atteint Mach 5. Pour cela il n’a pas de turboréacteur ou de pulsoréacteur mais bel et bien un bon vieux statoréacteur. Ou plutôt une de ses évolutions . Le statoréacteur en France on connait bien, c’est comme ça qu’à volé après-guerre le Leduc 0.22 mais aussi plus proche de nous les missiles ASMP et ASMP-A porteurs de l’arme nucléaire aéroportée.
En fait le X-51 Waverider dispose d’un scramjet, c’est à dire un superstatoréacteur capable d’obtenir une combustion interne à vitesse supersonique.

Pour autant concevoir un chasseur de 6ème génération capable de voler aussi vite ne sera pas une chose aisée. Et les trois grands avionneurs ne seront pas de trop. En fait Mach 5 c’est pas impossible à tenir dans un cockpit, c’est juste très difficile. Mais si dans les années 1960 quelques fous furieux ont réussi aux commandes de leurs North American X-15 à tenir ces vitesses, de brillants ingénieurs devraient réussir soixante plus tard à trouver une solution. Sauf que d’accord le X-15 ne préfigurait nullement un avion de combat. D’ailleurs objectivement il ne préfigurait pas grand chose d’autre que la conquête spatiale.

Cinq fois la vitesse du son pour un pilote c’est donc possible, la furtivité on connait aujourd’hui. Mais il reste le troisième critère : l’intelligence… artificielle. Et là l’expression fait encore peur. Car elle véhicule tout un tas d’à priori et d’idées reçues largement véhiculés par la science-fiction et les complotistes.

Pour les militaires américains c’est là la nouvelle frontière technologique, celle qui fera la différence avec les Chinois et les Russes. Intégrer une intelligence artificielle, pour faire simple un super ordinateur qui penserait par lui-même et assisterait le pilote dans certaines phases de la mission. Pour autant peu de chances qu’il ressemble à une grosse poubelle bleue et blanche et parlent en émettant des bips. Mais l’analogie n’est pas totalement stupide.
Car l’IA embarquée dans ce futur chasseur de 6ème génération devrait bien être une sorte de copilote virtuel. Pour autant l’être humain devrait théoriquement avoir le dernier mot, ce sera lui ou elle qui sera aux commandes de l’avion et de la mission, enfin si tout se passe bien…

Alors d’accord à une échéance de trente ans toute ma prose ressemble furieusement à de la mauvaise littérature d’anticipation, sauf qu’elle repose uniquement sur des informations données au goutte-à-goutte par la DARPA et l’US Air Force depuis plusieurs mois. Des petits cailloux qui mis bout à bout donnent un schéma. Et ce schéma c’est ce futur avion de combat qui n’existe même pas officiellement puisque le Pentagone n’a pas encore lancé de programme visant à un avion de combat pour l’horizon 2045-2050. Pourtant nous savons toutes et tous qu’il existera.
Notre ligne éditoriale n’a pas évolué d’un iota : les faits, rien que les faits, et toujours les faits. Ce sont là nos seules sources possibles. C’est pourquoi cette première enquête n’a rien d’une œuvre de SF et tout d’un travail factuel.

Illustration © US Air Force.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

13 Responses

  1. Les ingénieurs militaires prennent le pas sur leurs homologues du secteur privé car avec le bilan du programme F-35 le Pentagone a décidé que désormais c’était à lui de dicter la conduite d’un projet et d’imposer ses conditions.

    1. Toujours intéressant VoltaireFR d’en remettre une couche dans le bashing anti F-35, toutes les raisons sont bonnes.

      1. Les rapports du Pentagone sont accablants pour le F-35, que vous l’admettiez ou pas.
        Et les services U.S. ont des soucis matériels, opérationnels et également de recrutement. Les nouveaux pilotes évitent cet avion qui ne les fait pas rêver mais pas du tout alors qu’ils sont de la génération des tablettes et des smartphones..

        1. Bonjour,
          sans aller aussi loin que VoltaireFR, on ne peut pas nier tout les problèmes qu’à connus le F35, dont certains particulièrement ridicules.
          On peut il me semble dire de manière raliste que le développement du F35 ne c’est pas fait sans encombre. Et si à la fin l’avion est enfin opérationnel, ils se sont retrouvé dans un premier temps avec un grand nombre d’avions fabriqués et volant sans pour autant avoir résolus les problèmes qu’ils l’affectaient.

          Je ne vais pas juger de l’efficacité de l’appareil au combat, chaque pays et chaque constructeur affirmant que ses appareils sont supérieurs aux autres.

          Par contre, si on est d’accords qu’un programme militaire qui ne dépasse pas ses budgets est très rare, là le dépassement et le coût explosetout les records. C’est quand même un problème pour un avion produit en grande quantité et qui doit remplacer des appareils plutôt bons marchés (F16 surtout) et légers (pour des avions US, tout est relatif).
          Les difficultés de mise en service et de coût du couple F22 / F35 sont criantes si on compare au couple F15/F16.

          Dans cette optique, dans son premier message, les écrits de VoltaireFR n’ont rien d’aberrant et il me semble qu’on peut envisager que les dépassements de coûts des derniers programmes d’avions de combats US pourraient ne pas être étrangers à la main mise par l’appareil d’État sur le futur programme d’appareil. de 6° génération.

  2. Mais tu n’en as pas marre de nous rabattre les oreilles avec tes amis yankees? On est français, parles nous d’aéronautique française.

    1. En même temps Dutertre si notre ligne éditoriale vous dérange, faites donc comme vos autres coreligionnaires trolls et allez voir ailleurs si on n’y est ! Zut ça commence à bien faire à la fin vos pétages de plombs !!!

      1. Je pige pas, t’es pas sensé être un « gauchiste macroniste anti-américain » Arnaud ?
        Je m’y perd moi :'(.

        Blague à part : merci pour l’article, je commençais à m’y perdre avec toutes ses micro-infos qui apparaissent de ça et là.

  3. Une éjection à mach 5 ça se passe comment ?
    Et moi qui croyait que les avion de chasse du futur serait des avions sans pilote tel le Boeing Airpower Teaming System.

  4. Il me rappelle  » firefox : l’arme absolue » ,mais lui pouvait atteindre mach 6 !!!
    Et il pouvait lire les pensées du pilote .

  5. A l’heure où l’Europe avance ses pions avec l’annonce des programmes multinationaux FCAS et Tempest, il n’était pas saugrenu de voir poindre la réponse US. Ce faisant, la nouvelle est tout de même énorme, car ces derniers se veulent un cran plus ambitieux encore, avec -l’article y fait la part belle- l’espoir d’un chasseur hypersonique et pensant. Rien que ça (!)
    Furtif, on s’en doutait 😉 .

    Je laisserai de côté l’IA, en soi son utilisation existe déjà dans de nombreux domaines industriels, et je ne trouve pas sot de l’intégrer à un avion de chasse pour -par exemple- optimiser les paramètres de vol, proposer des options au pilote, gérer / trier les menaces, pointer les cibles, anticiper les pannes, et globalement soulager sa charge de travail ; bref une sorte de super-copilote comme cela a été évoqué. Cela ne me semble absolument pas empreint de science-fiction, vu que déjà, à l’heure actuelle, les avions récents intègrent ce genre d’aides au pilotage avec un certain degré d’automatisation.

    Niveau vitesse, par contre, sans dire que cela soit un pari impossible pour un appareil de taille chasseur, nous nous doutons tous ici qu’il y aura d’énormes contraintes à solutionner pour dépasser le stade de l’avion à réaction ultrarapide conventionnel qu’ont représenté les SR71 et Mig 25 / 31, et qui se heurte peu ou prou au mur de Mach3 (entre autres : limites physiques des turboréacteurs et d’échauffement cinétique de la cellule). Au-delà, on entre dans le domaine des avions-fusées tels le X15, des missiles ou des avions sans pilotes, bien trop éloignés des avions de chasse et trop contraignants / spécifiques pour envisager d’en équiper une force aérienne.
    Atteindre ces vitesses pour un appareil piloté ne sera pas impossible en soi, surtout à l’horizon de plusieurs décennies, toutefois il s’agirait là pour le nouvel appareil d’une capacité extrêmement ponctuelle, pour ne pas dire rarissime, car rappelons-le il lui faudrait évidemment pouvoir réaliser les missions de base des appareils actuels, où dans 95% des cas la vitesse est un facteur secondaire.

    Quand on voit ce petit appareil sans pilote qu’est le X51, le seul actuellement capable de tenir ces vitesses, on constate d’emblée qu’il tient plus du missile que de l’avion de chasse : en effet, il ne sait faire que voler vite. Tributaire d’un avion porteur, utilise un super-stato (uniquement), vole évidemment en ligne droite, autonomie de quelques minutes… donc très limité, et en l’état bien incapable de voler (longtemps) en subsonique et de manœuvrer tel un avion de chasse.
    Bref la capacité hypersonique du futur chasseur devra -ainsi que ses contraintes- se greffer au cahier des charges plus classique qui définit les avions de chasse actuels, sans en impacter les capacités opérationnelles. Une plus-value indéniable et ambitieuse par rapport à la concurrence mondiale si l’oncle Sam y parvient, mais qui nécessitera de gros efforts de R&D.
    Sur le papier, c’est une gageure, et je suis très curieux -voire même excité ^^- à l’idée de découvrir ce que les majors de l’aviation militaire US nous pondront comme prototypes.
    Propulsion mixte ? Utilisation du plasma ? Plafond quasi-spatial ? La machine à fantasmes est lancée !…

  6. Bonjour,
    sans vouloir vous vexer, Arnaud, puisque vous affirmez que cet article ( et le vos articles en général) se basent sur des faits, et que l’article résulte d’une enquête de plusieurs semaines ou mois, je vous suggère humblement de citer vos sources.
    Personnellement, vous lisant depuis des années, je sais que vos articles sont sérieux sur le fonds.
    Mais citer vos sources permetrai de valider la véracité de l’article par le lecteur, alors que sans sources rien ne permet de différencier un article ayant demandé beaucoup de travail de recherche d’un article reposant sur des affirmations gratuites.
    Cordialement

  7. Est-ce qu’un avion hypersonique a un sens? Cela ressort plus de la recherche que du pragmatisme de la mission de combat? Vos avis?

  8. J’ai vu un prototype ayant une aile double comme un biplan dont les extrémités d’ailes se refermeraient et se rejoindraient.
    Je ne sais si une telle configuration permettrait de réduire les turbulences.
    Mais si on imagine que l’engin puisse en très peu de temps changer cette configuration, d’un biplan horizontal à une configuration des mêmes bi-ailes orientées verticalement alors l’engin serait capable de virer de bord très rapidement.
    Il faudrait pouvoir modifier le profil de l’aile à volonté.

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