En aout 1942, l’US Navy reçu un premier lot de bombardier B-24D qu’elle rebaptisa PB4Y Privateer. Ces avions ne se distinguaient guère extérieurement des B-24 Liberator de bombardement de l’US Army Air Force que par leur charge offensive constitués de mines et de charges anti-sous-marine. Mais rapidement les marins américains comprirent que l’appareil était sous-motorisé pour des missions qui demandaient une endurance et une maniabilité supérieure à celle des bombardiers. C’est ainsi que dans l’urgence le Department of War ordonna à Consolidated de concevoir une version améliorée. Cette version était très différente de ses prédécesseurs.
Le PB4Y-1 ne se différenciait quasiment pas du Liberator hormis par ses nouveaux moteurs plus puissants, par un fuselage rallongé, et par des nacelles de mitrailleuses latérales dites en « bulbes ». Pour le reste il conservait l’aspect général du B-24D, y compris son fameux empennage double dérive. Le PB4Y-1 fit son premier vol en novembre 1942. Près d’un millier de ces avions furent construits. Ils furent utilisés en Atlantique Nord, mais également dans le Pacifique où leur rayon d’action faisait merveille dans la recherche et la poursuite des navires de guerre nippons. L’US Navy utilisa également une unité de Privateer en Méditerranée.
Dans le Pacifique les PB4Y-1 prirent rapidement le pas sur les Catalina dans les missions de lutte anti-sous-marine. A l’automne 1943 une nouvelle version fut mise en chantier par Consolidated-Vultee (nouvelle raison sociale du constructeur) sous la désignation de PB4Y-2. Celle-ci disposait outre l’armement classique des PB4Y-1 d’un radar de recherche et d’un système de localisation des sous-marins. Elle se reconnaissait au premier coup d’œil à son nouvel empennage monobloc. Près de 750 de ces avions furent construits jusqu’en 1945. La Royal Air Force testa en décembre 1943 un lot de quinze PB4Y-2 sous la désignation de Privateer Mk-I. Malgré les indéniables qualités de l’avion, le Coastal Command lui préféra le Short Sunderland. Les quinze avions furent rendus aux Etats-Unis qui les versèrent à l’US Marines Corps. Ces derniers utilisèrent leurs Privateer pour des missions au-dessus du Golfe du Mexique et dans la zone du Canal de Panama jusqu’à la fin des hostilités.
Les Privateer de la Navy et des Marines coulèrent ou endommagèrent environ une centaine d’U-Boots durant les opérations. La fin de la Seconde Guerre Mondiale ne signa pas pour autant la fin des opérations américaines sur Privateer. En effet ces avions demeurèrent les principaux appareils de patrouille maritime, de reconnaissance côtière, et de lutte anti-sous-marine des Etats-Unis durant la deuxième moitié des années 40, mais également pendant les opérations de la Guerre de Corée.
Lors de ce conflit un lot d’une trentaine de PB4Y-1 fut transformé en avions de guerre électronique et de reconnaissance à longue portée sous la désignation de PB4Y-2Q. Ces avions volaient loin derrière les lignes ennemies et devinrent rapidement des cibles de choix pour les chasseurs nord-coréens. Deux PB4Y-2Q furent d’ailleurs revendiqués (certainement à juste titre) par des jets de combat Mikoyan-Gurevitch MiG-15. Les Privateer laissèrent peu à peu la place aux P2V Neptune et au P4M Mercator au sein de l’US Navy.
Mais l’Amérique ne fut pas la seule nation à utiliser le Privateer. En effet en 1949, l’Aéronautique Navale reçu un lot de 34 PB4Y-2 pour des missions de patrouille maritime, de reconnaissance, et de lutte anti-sous-marine. Ces avions furent versés auprès de trois flottilles (8F, 24F, 28F) basés en métropole. Malgré tout les Privateer furent rapidement envoyés en Indochine afin de garantir la souveraineté française dans ses colonies asiatiques. Mais la puissance de feu exceptionnelle du Privateer fit de l’avion la canonnière volante préférée des états-majors français. Les Privateer français participèrent notamment aux raids de protection de la plaine de Diên-Biên-Phu, sans toutefois être basés dans la « cuvette ». Au moins deux Privateer français furent abattus par la résistance Viêt-Minh.
Les Privateer de la Royale participèrent quelques temps plus tard aux opérations liées à la Guerre d’Algérie. Ils aidèrent les corvettes et avisos de la Marine Nationale dans les missions d’arraisonnage des navires suspectés de trafics d’armes au profit du FLN. Les PB4Y-2 eurent même à user de leurs armes sur plusieurs de ces cargos. Mais les quadrimoteurs de l’Aéronautique Navale ne faisaient pas que des missions de patrouille maritime. Ils avaient aussi la charge de « suivre » les sous-marins soviétiques croisant en Méditerranée occidentale.
La mission la plus surprenante des Privateer français en Algérie fut celle qui consistait à illuminer les cibles pour les bombardiers opérants au-dessus des djebels. Les PB4Y-2 tiraient alors des roquettes au phosphore, ou larguaient des bombes fumigènes censées marquer les cibles pour les Douglas A-1 Skyraider de l’Armée de l’Air et pour les Vought F4U Corsair de l’Aéronautique Navale. Par ailleurs des Privateer ont participé à des bombardements classiques contre les positions de l’ALN avec des bombes incendiaires ou des charges au napalm. Durant cette guerre au moins quatre Privateer furent perdus. La France les retira du service en 1962, remplaçant ses Privateer par des Atlantic plus modernes, et surtout plus adaptés à ses missions de lutte anti-sous-marine.
Si le Privateer ne peut pas être considéré comme un avion de patrouille maritime révolutionnaire, il n’en demeure pas moins un exemple de ce que l’industrie américaine était capable de produire « dans l’urgence ». Si la plus part des avions conçu selon ce principe n’eurent de carrière opérationnelle que pendant les durées d’hostilité, le Privateer fait donc figure d’exception. Une carrière de vingt années prouve les qualités indiscutables de l’avion. En outre il permit à quelques pilotes de la Navy de défricher les concepts de guerre électronique. Quelques Privateer désarmés ont volés dans les années 80 et 90 en tant que bombardiers d’eau aux Etats-Unis et au Canada.
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