Le terme voilure tournante est généralement assimilé, à tort, exclusivement aux hélicoptères. Pourtant il existe d’autres types de machines à voilures tournantes, tels les méconnus girodynes. Ces derniers sont des hybrides entre avions et hélicoptères. S’ils conservent les mouvements verticaux et la sustentation d’un hélicoptère la traction est assurée par un ou plusieurs moteurs comme sur un avion. C’est la formule qui a été choisi par Eurocopter au début des années 2000 pour son surprenant démonstrateur technologique X3.
Au tout début du 21ème siècle les responsables d’Eurocopter cherchèrent à développer une technologie permettant d’allier la souplesse d’emploi des hélicoptères au rayon d’action et à la vitesse des avions turbopropulsés. L’idée en fait était à terme de concurrencer le Bell-Boeing CV-22 Osprey américain.
Cependant pour des raisons budgétaires évidentes l’hélicoptériste franco-allemand n’avait pas les moyens de construire une machine aussi grosse.
C’est ainsi que naquit un des programmes européens parmi les plus surprenants depuis bien longtemps : l’Eurocopter X3. Pour les ingénieurs des deux pays il fallait désormais trouver parmi le catalogue de l’entreprise l’appareil qui allait servir de cellule. Ni trop volumineux pour éviter de nécessiter des propulseurs trop puissants et gourmands, ni trop petit pour permettre aux ingénieurs d’essais de pleinement réaliser les vols d’essais. Car là était le secret du X3 : ce n’était déjà alors qu’un démonstrateur technologique et surtout pas une machine préfigurant un futur aéronef de série.
Le choix se porta alors l’AS-365N3 Dauphin 2 comme base de travail pour la cellule. Les ingénieurs décidèrent de prélever également le rotor à cinq pales de l’EC155, la dernière version civile de la famille Dauphin. Afin toujours de réduire les coûts de recherches le système complet de transmissions fut prélevé sur l’hélicoptère de transport moyen EC175 alors en cours lui aussi de développement. Quant aux propulseurs les ingénieurs allemands et français sélectionnèrent le turbomoteur Rolls-Royce / Turboméca RTM322 d’une puissance unitaire de 1700 chevaux, celui-là même dont était alors doté le NH90 Caïman européen. Pour le reste, soit environ 35% de la machine l’Eurocopter X3 faisait appel à des pièces et éléments spécialement pensés pour lui.
Extérieurement le X3 ne peut pas cacher sa parenté avec le Dauphin 2. Néanmoins les différences demeurent importantes. À commencer par l’empennage double dérive, les ailes renfermant les deux hélices à cinq pales ainsi que le rotor principal. En fait le plus impressionnant de l’appareil se cache dans la boite de transmission des deux turbomoteurs RTM322 qui entraînent à la fois ce rotor mais aussi donc les deux hélices tractives. En ce qui concerne le train d’atterrissage, il demeure identique à celui de l’AS-365N3. L’équipage composé d’un pilote d’essais et d’un copilote-ingénieur prend place classiquement à l’avant du girodyne. Un second ingénieur d’essais peut prendre place dans un siège spécialement équipé à l’arrière du pilote.
C’est dans cette configuration, sous l’immatriculation civile F-ZXXX, que l’Eurocopter X3 a réalisé son premier vol le 6 septembre 2010 depuis le centre d’essais de la Base Aérienne 125 d’Istres-le-Tubé dans le sud de la France. Dès lors les essais en vol furent confiés à une équipe mixte Eurocopter et Direction Générale de l’Armement.
Dans les semaines qui suivirent le girodyne enchaîna les records. Le 12 mai 2011 il réalisé un vol à 80% de ses capacités réelles qui le porta à 430 km/h. Quelques jours plus tard il était l’une des grandes vedettes de l’édition 2011 du Salon du Bourget. Un an plus tard Eurocopter alla même narguer les constructeurs américains sur leur propre terrain : le X3 fut présenté durant deux mois, en juin et juillet 2012, sur le territoire des États-Unis. C’est pourtant dans la soute d’un avion cargo russe qu’il traversa l’Atlantique. L’étonnante voilure tournante européenne fut testée par des pilotes américains.
Mais c’est indubitablement le 7 juin 2013 que l’Eurocopter X3 entra dans la légende. Après avoir atteint l’extraordinaire vitesse de 483 km/h en phase descendante son pilote réussit à tenir 472 km/h en vol horizontal à l’altitude de 10 000 pieds (environ 3050 mètres) durant plus de deux minutes. Une vitesse digne du fameux Supercopter.
C’est au terme de 199 vols d’essais, représentant un total de 155 heures de vol, que l’Eurocopter X3 vit sa carrière s’arrêter. Ses capacités hors du commun, son hyper manœuvrabilité, ses possibilités de montée et de descentes dans des incidences rarement atteintes allaient s’avérer primordiales pour les ingénieurs d’essais d’Airbus Helicopters, la nouvelle raison sociale de son constructeur.
Le 17 juin 2014 ce prototype rejoignit le Mirage IVP et les deux Concorde (dont le prototype) dans le hall éponyme au Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget en proche banlieue parisienne. Désormais le X3 trône auprès des machines qui ont marqué l’aventure et l’histoire de l’aviation.
Si l’Eurocopter X3 n’eut une carrière que d’à peine trois ans et demi, elle fut très riche. Les enseignements de son utilisation n’ont pas fini d’être retenus. Il faut savoir qu’en français son nom se prononce « X-Cube ».
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