Face à l’intérêt décroissant de la Fuerza Aérea Argentina pour l’avion de transport IA 35 Huanquero, la Dirección Nacional de Fabricación e Investigación Aeronáutica (DINFIA) dut en interrompre prématurément la production et préleva une cellule non complétée sur la chaîne d’assemblage qu’elle transforma en bimoteur turbopropulsé provisoirement nommé IA-35T Bastan. Produisant déjà sous licence le Morane-Saulnier MS.760 Paris, la DINFIA eut le réflexe de se tourner vers le motoriste français Turboméca et son turbopropulseur Bastan, d’où le nom provisoire du prototype. Conservant la bi-dérive de l’Huanquero, mais avec des ailes entièrement redessinées et une porte latérale plutôt que ventrale, ce nouvel avion conçu par Hector Eduardo Ruiz pouvait accueillir 12 passagers. Doté de deux turbopropulseurs Turboméca Bastan IIIA de 850 CH de puissance unitaire, il effectua son premier vol en février 1962. Renommé IA-35T Constancia, il effectua sa première sortie publique à Buenos Aires au mois de mai suivant, puis adopta plus tard sa dénomination définitive, soit le IA-50 Guarani du nom d’un peuple amérindien vivant dans le nord de l’Argentine.
L’expérience acquise avec ce premier prototype permit de développer une version plus évoluée à dérive simple et motorisée avec des Turboméca Bastan VIA plus puissants, soit le Guarani II qui effectua son premier vol en avril 1963. Satisfaite des performances de cette dernière version, la DINFIA procéda à l’assemblage de deux avions de pré-production, dont le premier roula hors de l’usine en octobre 1964. Les réservoirs internes du Guarani II pouvaient contenir 1 910 litres de carburant, avec l’option d’ajouter des réservoirs externes en bout d’ailes de 340 litres chacun. La cabine réaménagée pouvait embarquer jusqu’à 15 passagers.
Dans l’espoir d’attirer l’attention internationale à l’égard du Guarini II et susciter des commandes à l’export, la DINFIA décida d’exhiber le premier appareil de présérie au Salon international de l’aéronautique et de l’espace de Paris-Le Bourget en 1965. Non conçu pour des vols transocéaniques, l’appareil fut doté d’un réservoir additionnel en cabine pour porter son autonomie en vol à 10 heures. Première traversée de l’Atlantique par un avion de conception sud-américaine, le vol se fit par étapes avec escales à Rio de Janeiro et Recife au Brésil, Dakar au Sénégal, Las Palmas aux îles Canaries et finalement Madrid avant le dernier saut vers Paris. L’équipage était constitué des pilotes Rogelio Balado et Andres Arneodo, du navigateur Roberto Mela ainsi que du concepteur du Guarani, Hector Eduardo Ruiz. Suite au Salon du Bourget, l’appareil fut soumis à des examens au Centre d’essais en vol d’Istres, avant de regagner l’Argentine en février 1966.
La Fuerza Aérea Argentina (FAA) avait entre-temps commandé 20 exemplaires du Guarani II. Les deux appareils de présérie furent aménagés pour respecter les spécifications de la FAA et entrèrent en service dès 1966. En novembre 1968, un de ces deux appareils effectua un vol entre la Patagonie et la Base Aérea Teniente Benjamín Matienzo, une des stations argentines de recherche en Antarctique. Malgré l’aspect promotionnel de ce vol, la FAA constata rapidement que le Guarani II était peu adapté aux rigueurs du climat antarctique et aux pistes sommairement aménagées de la Patagonie. La FAA fit plutôt l’acquisition d’avions canadiens DHC-6 Twin Otter parfaitement à l’aise dans ces environnements extrêmes. Les Guarani II de la FAA remplirent plutôt des missions de transport de hauts gradés entre les bases militaires ainsi que de personnel diplomatique œuvrant dans les ambassades argentines en Amérique du Sud. Un certain nombre d’appareils dotés de caméras allemandes Zeiss furent affectés à la photographie aérienne. Enfin, deux autres furent spécialement équipés pour le calibrage des aides à la navigation.
Suite à l’obtention de la certification du Guarani II par l’US Federal Aviation Administration, la DINFIA espérait bien décrocher des commandes civiles hors de l’Argentine, mais des avions compétiteurs visaient également le même créneau de marché des petits transporteurs régionaux, soit le canadien DHC-6 Twin Otter, l’américain Beechcraft 99 Airliner et bientôt le brésilien Embraer EMB-110 Bandeirante tous dotés du réputé turbopropulseur Pratt & Whitney Canada PT6A. Causant le décès de ses six passagers, l’explosion d’un Guarani II peu de temps après son envol à Córdoba en mars 1969, ne fit rien pour susciter la confiance d’éventuels clients.
La DINFIA n’eut guère plus de succès auprès de l’Armada Argentina, malgré le prêt d’un appareil Guarani II à des fins d’évaluation. La marine nationale lui préféra le Beechcraft King Air pour remplacer ses vieux Beechcraft C-45 Expeditor. L’assemblage d’un nouveau lot d’une quinzaine d’exemplaires fut tout de même lancé en 1970, suite à l’intérêt manifesté par des agences gouvernementales fédérales et les provinces de Córdoba, La Rioja, Catamarca, Entre Rios, Corrientes et Formosa. Le gouvernement fédéral aménagea un de ces appareils en avion ambulance et deux autres destinés à la Policía Federal Argentina et au Servicio Penitenciario Nacional. L’entreprise étatique Lineas Aereas de Entre Rios (LAER) opéra également deux Guarani II pour effectuer des liaisons commerciales entre les communautés de la province d’Entre Rios et vers Buenos Aires.
Espérant toujours susciter davantage d’intérêt pour le Guarani, la DINFIA songea pour un temps à développer une nouvelle version plus grande avec cabine pressurisée, mais abandonna l’idée pour se concentrer sur d’autres projets, dont la mise en production de l’avion d’attaque au sol lA-58 Pucara. Après une petite quarantaine d’appareils assemblés, le dernier Guarani II fut livré en janvier 1975. À compter de 1990, la FAA commença à retirer graduellement ses Guarani II du service actif, le dernier quittant les rangs de l’armée de l’air lors d’une cérémonie tenue à Paraná le 7 janvier 2007. L’ultime vol de cet appareil fut en direction du Museo Nacional de Aeronáutica de Argentina à Morón où il est dorénavant exposé. Bien qu’ignoré à l’étranger, le Guarani II sillonna le ciel de l’Argentine pendant une quarantaine d’années de bons et loyaux services.
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