Hélicoptériste majeur de l’histoire de l’aviation, grâce notamment à son universel UH-1 Iroquois l’industriel Bell Helicopters a toujours su produire des machines de qualité tant pour les marchés militaires que civils. Parmi ces derniers figure un très élégant appareil conçu dans les années 1970 spécifiquement pour concurrencer les machines produites en Europe par Agusta et Aérospatiale. Désigné Bell 222 il fut pourtant un total échec sur le marché militaire.
C’est au cours de l’année 1974 que le constructeur annonça son intention de produire le premier hélicoptère léger américain biturbine à vocation civile. Devant les avancées réalisées en Europe les ingénieurs et designers de Bell eurent l’idée de frapper fort en tentant d’imposer un nouveau style. Le nouvel hélicoptère allait donc être plus aérodynamiques que ses prédécesseurs, et faire appel à des avancées technologiques de premier plan. Il fut décidé de le désigné Bell Model 222.
Les équipes travaillèrent assez vite, d’autant qu’elles s’appuyaient sur une motorisation déjà existante, le turbomoteur Avco-Lycoming LTS 101, celui là même qui équipait les Aérospatiale AS-350 Astar vendus sur le marché nord-américain. Le prototype du Bell Model 222 fut officiellement présenté au public en mai 1976, alors qu’il n’avait pas encore volé.
Extérieurement il tranchait avec ce qui se faisait alors. Disposant d’un esthétique soignée, il se présentait sous la forme d’un hélicoptère léger biturbine construit intégralement en métal. Il disposait d’un rotor principal bipale usiné en métal et fibre de verre, une grande première pour un hélicoptère américain civil de l’époque. Mais surtout ce qui sautait alors aux yeux était son train d’atterrissage tricycle escamotable en lieu et place des traditionnels patins. Pour le reste l’appareil était de facture assez académique avec sa cabine permettant l’accueil de six à sept passagers et son rotor anticouple classique. Le prototype du Bell Model 222 réalisa son premier vol le 13 août 1976.
Souvent présenté alors comme une réponse américaine à l’Aérospatiale SA-365 Dauphin 2 le nouvel hélicoptère Bell ne fut certifié par la Federal Aviation Administration qu’en décembre 1979. Dès lors sa carrière commerciale pouvait commencer, d’abord aux États-Unis puis dans le reste du monde.
Il est d’ailleurs intéressant de remarque que commercialement il fut rapidement appelé simplement Bell 222.
D’abord cantonné à des rôles d’hélicoptères d’affaire, il réussit petit à petit à intéresser certains services de police américains comme celui de la ville d’Austin au Texas ou encore celui de Duluth dans le Minnessota.
Malgré cela le Bell 222 peinait à décoller sur le marché parapublique, son prix exorbitant le rendait nettement moins attractif qu’un Écureuil ou qu’un Long-Ranger. Mais surtout le Bell 222 était jugé trop petit pour les missions militaires qu’il visait : recherche et sauvetage en mer ou évacuation sanitaire. Même l’US Army s’en désintéressa. En fait un seul Bell 222 militaire, un appareil vendu en 1990 à l’Albanie pour des missions de transport de hautes personnalités et utilisé jusqu’en 2012.
Néanmoins en 1981 l’hélicoptériste vit une possibilité de donner naissance à une version militaire du Bell 222. L’US Army venait de lancer le programme ACAP, pour Advanced Composite Airframe Program. Celui-ci concernait l’étude et la faisabilité d’un hélicoptère militaire dont la cellule ferait massivement appel aux matériaux composites. Le programme ACAP représentait en fait une partie du plus vaste programme LHX, pour Light Helicopters Experimental visant à fournir dans les années à venir un hélicoptère de reconnaissance et de combat permettant le remplacement rapide des Bell AH-1 Cobra , OH-58A et B Kiowa, et des Hughes OH-6 Cayuse en service dans les rangs de l’armée américaine. L’hélicoptère proposé par Bell était un Model 222 profondément repensé et désigné Bell 292. Il vola pour la première fois le 30 août 1985.
Bien que les essais démontrèrent les bonnes qualités du Bell 292 les travaux du concurrent, Sikorsky, sur son S-75 allèrent à un meilleur train. Surtout ce dernier prenait déjà les traits d’un hélicoptère de combat tandis que le Bell 292 ressemblait plus à un appareil civil modifié. Au final c’est le Sikorsy S-75 qui fut déclaré vainqueur. Cependant l’histoire nous a démontré que l’appareil qui en fut dérivé, le RAH-66 Comanche, n’eut pas du tout le succès escompté.
En 1991 le constructeur développa une version destiné au transport vers les plateforme de haute mer, doté d’équipements spécifiques mais aussi pour l’évacuation sanitaire et certaines missions de police. Doté de deux turbomoteurs Rolls-Royce 250C légèrement plus puissants cette version fut désignée Bell 230.
Il est à remarquer que l’Aviacion Naval Ecuatoriana a fait l’acquisition du seul et unique Bell 230T, une version expérimentale de reconnaissance maritime et de surveillance des côtes dotés d’un radar de nez, d’un FLIR amovible, et d’un sonar à immersion de petite taille. Désarmé cet appareil peut néanmoins servir à la traque des sous-marins étrangers.
En fait elle préfigurait la dernière évolution de cette machine, le Bell 430, un appareil conçu en 1995 et destiné à gommer toutes les erreurs faites sur le Bell 222. Ses concepteurs espéraient clairement le placer sur des marchés jusque là fermer à cet appareil : ceux des forces aériennes et aéronavales. Et ils faillirent réussir. En effet en 2000 un hélicoptère de ce type fut vendu à la Fuerza Aérea Dominicana afin de servir d’hélicoptère de liaisons et de transport de haute personnalités, en remplacement d’un Dauphin 2 utilisé jusque là et accidenté. Mais à l’usage le Bell 430 s’avéra trop onéreux pour les finances dominicaines et l’appareil fut revendu en 2007. Sa mission fut en partie reprise par un Bell 412. L’autre client militaire était aéronavale équatorienne qui en 2008 fit l’acquisition de deux Bell 430 destinés à des missions de liaisons, d’entraînement à l’appontage, et de soutien aux opérations spéciales. Bien qu’habituellement désarmés ces appareils peuvent emporter une mitrailleuse de sabord dans le cadre de la lutte contre les trafics de narcotiques et contre le terrorisme. De ce fait ils peuvent être embarqués à bord de navires de la marine équatorienne. Ils servent aux côtés du Bell 230T.
Mais incontestablement c’est la télévision qui a rendu célèbre cet hélicoptère. Au milieu des années 1980 la série culte américaine Supercopter (« Airwolf » dans sa version originale) allait populariser le Bell 222. Dans ce programme de science-fiction l’hélicoptère avait été très profondément transformé afin de le rendre supersonique et capables d’évolutions dont l’appareil est en fait incapable : looping et tonneaux complets. Confié à une agence américaine ultra-secrète le Supercopter devait combattre les ennemis de l’Amérique avec un armement hors du commun. Les pilotes étaient incarnés par les acteurs Jan-Michael Vincent alors surtout connu pour quelques westerns de série B et par Ernst Borgnine un des grands seconds rôles d’Hollywood des années 1950 à 1980. La série a connu un succès énorme dans de nombreux pays dont la France. Il est à signaler que l’hélicoptère employé dans les trois premières saisons (sur un total de quatre) s’est écrasé en 1991 en Allemagne lors d’un vol sanitaire.
Hélicoptère techniquement réussi le Bell 222 (mais aussi ses successeurs) était taillé pour le marché civil américain, mais absolument pas pour celui de l’export militaire. Trop cher, et finalement trop luxueux cet appareil se heurta très vite à ceux contre qui il avait été conçu et qui le surpassèrent. Néanmoins sans le savoir Bell avait développé un hélicoptère qui allait demeurer dans les mémoires. Au total ce sont 375 exemplaires qui ont produits, Bell 292 et 430 compris entre 1979 et 2009 année de l’arrêt de la chaîne de production.
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