Durant les quinze premières années de la guerre froide, deux constructeurs américains se livrèrent une guerre commerciale sans merci visant à la dotation du Strategic Air Command en bombardiers de tous types. Boeing et Convair n’eurent de cesse de développer et de produire des avions sans cesse plus évolués et performants les uns que les autres, jusqu’à ce que ce soit finalement le premier d’entre eux deux qui subsiste. Même lorsqu’ils n’étaient pas sélectionnés les avions en questions étaient bien souvent de véritables joyaux technologiques, à l’instar notamment du très surprenant Convair XB-46.
En juillet 1945 alors que le Japon était la seule puissance de l’Axe encore en guerre contre les Alliés, l’état-major américain fit savoir qu’il recherchait un nouveau bombardier destiné à mener des frappes en profondeur. Celui-ci devait permettre à terme de remplacer définitivement les quadrimoteurs Boeing B-17 Superfortress et Consolidated B-24 Liberator qui avaient faits leurs preuves en Europe et dans le Pacifique. Boeing et Convair se lancèrent dans la partie, bientôt rejoints par North American.
Si l’avant-projet de ce dernier n’entrait pas exactement dans le cadre du cahier des charges de l’US Army Air Force, il avait la particularité d’être bien plus avancé que les deux autres. Alors que Boeing et Convair n’en étaient encore qu’au stade des plans et ébauches de planches à dessins, l’avion de North American avait déjà atteint le stade du prototype. C’est la raison pour laquelle il fut immédiatement commandé en série par les Américains, et ce malgré des qualités intrinsèques en matière de rayon d’action pour le moins discutables. Il s’agissait du B-45 Tornado, le premier bombardier à réaction américain.
Malgré l’existence de cette commande le contrat courait encore. Boeing et Convair avaient donc toutes leurs chances de l’emporter. Pour Convair, l’avion avait été désigné XB-46 tandis que son concurrent était le Boeing XB-47. Les deux avions n’avaient pas grand chose en commun, quand le premier disposait d’une aile cantilever le second avait une aile en flèche. Les ingénieurs de Convair semblaient largement inspirés par les travaux allemands sur l’Arado Ar 234 qui vola sous les couleurs de la Luftwaffe.
Extérieurement, le Convair XB-46 se présentait sous la forme d’un monoplan à aile haute cantilever construit intégralement en métal. L’avion possédait un fuselage de section ovale se terminant par un empennage classique. Il disposait également d’un train d’atterrissage tricycle escamotable. Sa propulsion était assurée par quatre turboréacteurs General Electric TG-180 montés deux par deux dans des nacelles de voilures, et développant chacun une poussée de 1815 kg. Le cockpit pressurisé avait été pensé pour accueillir trois membres : un pilote, un copilote, et un navigateur-bombardier. Ce dernier disposait d’un habitacle largement vitré dans le nez de l’avion. Niveau armement le XB-46 emportait en soute un peu plus de neuf tonnes de bombes conventionnelles et/ou nucléaires. C’est dans cette configuration que le Convair XB-46 vola pour la première fois le 3 avril 1947.
Dans un monde d’après-guerre où l’équilibre des nations était chancelant avec la montée en puissance de l’URSS le tout nouveau Strategic Air Command se devait de disposer rapidement de nouveaux bombardiers à même de faire peser la menace nucléaire sur Moscou. C’est pourquoi les programmes des XB-46 et XB-47 étaient ultra-prioritaires pour les militaires américains.
Fin 1947, la toute nouvelle US Air Force rendit son avis, en commandant en série l’avion de Boeing. Le Convair XB-46 malgré de bonnes qualités, notamment en matière de vitesse de croisière à haute altitude avait payé une architecture jugée trop classique par les généraux américains. En outre son incapacité à se défendre contre d’éventuels chasseurs ennemis était ressentie comme une faiblesse grave. C’était l’époque où les bombardiers disposaient de mitrailleuses et de canons mitrailleurs sous l’empennage, et commandés électriquement depuis le poste de pilotage. Des armes que l’on pensait alors avoir la capacité de protéger les avions contre la chasse ennemie.
Malgré son échec le Convair XB-46 demeure un modèle du genre. Développé en très peu de temps il sut parfaitement s’adapter à son cahier des charges. Il demeure en outre un des avions militaires les plus élégants de son temps. Il est aussi la preuve que les bombardiers stratégiques n’étaient pas forcément des machines taillés à la serpe et à l’esthétique douteuse.
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