Peu de machines dans l’histoire de l’aviation ont connu un succès équivalent au Lockheed C-130 Hercules. Le quadriturbopropulseur américain a été vendu à des forces aériennes sur tous les continents, pendant et après la Guerre Froide. Mais l’utilisateur numéro un demeure l’Amérique qui possède des Hercules dans plusieurs modèles différents aussi bien au sein de l’US Air Force, l’US Navy, l’US Coast Guard, voire l’US Marines Corps. Parmi ces modèles si particuliers figurent les EC-130, des avions destinés (comme leur désignation l’indique) à la guerre électronique, pour des missions parfois très éloignées les unes des autres.
C’est en 1971, en pleine Guerre du Vietnam, que l’US Air Force rechercha un nouvel avion pour ses missions de renseignement électronique, de guerre psychologique, de brouillage des émissions radars, d’écoute, et d’accompagnement électronique des raids aériens. A cette époque ces missions étaient remplies par une douzaines de types d’avions différents, allant du frêle et fragile Cessna O-1 Bird Dog au lourd bimoteur Fairchild C-119 Flying Boxcar. Pour des raisons financières l’état-major américain décida de concentrer toutes ces missions autour d’un même aéronef. Le C-130 Hercules était parfait pour cela.
Les premiers avions de ce type entrés en service arrivèrent en unité fin 1972. Il s’agissait de huit C-130E transformés à la va-vite pour la guerre électronique. Ils furent désignés EC-130E Commando Solo. Ces avions transportaient à bord un véritable mini studio de télévision, mais aussi une régie permettant de diffuser en direct des programmes de propagande. Un dispositif de brouillage des émissions radios et télés était également embarqué. Les Commando Solo avaient aussi la possibilité de larguer des milliers de tracts sur des zones urbaines à très basse altitude. Par la suite une trentaine d’autres Commando Solo furent acquis par l’US Air Force. Depuis octobre 1999 les plus anciens EC-130E de ce type ont été remplacé par des EC-130J Commando Solo II. À la différence de leurs prédécesseurs ces appareils, basés sur le C-130J Super Hercules, peuvent être ravitaillés en vol.
Toutefois la nomenclature américaine est telle que l’EC-130E existe aussi sous la désignation d’ABCCC (pour Airborne Battlefield Command & Control Center, centre de contrôle et commandement aérien du champ de bataille) un appareil destiné, comme son nom l’indique, à servir de poste de commandement avancé pour les opérations de guerre. Toutefois ces avions sont entrés en service trop tard pour prendre part aux opérations asiatiques. Mais à l’instar des Commando Solo au moins deux ABCCC ont participé aux opérations aériennes de la Grenade. Par la suite des avions de ce type ont menés des actions en Arabie Saoudite et Irak, en Somalie, au Kosovo, puis en Afghanistan et de nouveau en Irak à partir de 2003. En 1995 les EC-130E ABCCC ont remplacé les derniers Boeing EC-135 Combat Lightning.
En 1980 l’US Air Force a reçu une nouvelle version de guerre électronique de l’Hercules, l’EC-130H Compass Call dont le rôle principal est de brouiller toutes émissions radios et radars sur le champ de bataille et en milieu urbain. En 1998 la moitié des Compass Call fut renvoyé en usine afin d’être modifié pour pister et identifier les téléphones portables et certains appareillages type GPS. En 1999 l’US Air Force a validé le concept au Kosovo en traquant certains criminels de guerre serbes. Par la suite ces avions sont intervenus en Afghanistan afin de rechercher les terroristes d’Al-Qaïda et les soldats talibans. En 2008 l’US Air Force a commandé dix EC-130J-30 (donc en version rallongée) destinés à remplacer les plus anciens Compass Call. Ces avions volent depuis 2012.
Si les Commando Solo et les ABCCC servent pour le compte de l’US Air Force Special Operation Command, l’état-major des forces spéciales, les Compass Call eux appartiennent à l’instar des chasseurs et bombardiers américains à l’Air Combat Command.
De 1975 à 1998 l’US Navy a également disposé de quelques Hercules de guerre électronique, des EC-130Q TACAMO (TAke Charge And Move Out) destinés à servir de relais communication entre les sous-marins en plongée et les bases navales, les différents états-majors américains, la Maison Blanche, et même les Boeing VC-25A de transport présidentiel. Ces avions étaient reconnaissables à leurs antennes filaire qui « traînaient » derrière l’avion. Ravitaillables en vol les EC-130Q étaient les avions de l’aéronavale américaine qui demeuraient le plus longtemps en vol. Ces avions furent particulièrement actifs lors des événements de novembre 1989 qui conduisirent à la fin de la Guerre Froide et à l’effondrement du Pacte de Varsovie et de l’empire soviétique. Malgré d’excellentes capacités en vol les EC-130Q furent retirés du service entre 1997 et 1998 pour être remplacés par les Boeing E-6A Mercury, les plus gros avions de l’US Navy.
Mais l’Hercules de guerre électronique le plus surprenant est certainement l’EC-130V, un avion radar de type AWACS dérivé directement du HC-130H et utilisé entre 1982 et 1997 par l’US Coast Guard. Celui ci disposait du radôme AN/APY-2 qui équipait alors les Boeing E-3B en service dans l’US Air Force et servait à surveiller l’espace aérien et maritime du Golfe du Mexique, dans lequel les États-Unis mènent une guerre contre les trafiquants de drogue depuis la fin des années 70. En 1997 l’EC-130V a été retiré du service au profit des RU-38 Condor et du Lockheed P-3AEW utilisé par l’US Customs Office, les douanes américaines. Toutefois l’EC-130V ne fut pas ferraillé puisqu’il rejoignit l’US Air Force Material Command, dans un centre d’essais, où il fut rebaptisé NC-130V. Cet avion a volé jusqu’en 2007 pour divers essais de matériels.
Officiellement aucun EC-130 n’a été exporté, toutefois au moins quatre pays utilisateurs d’Hercules ont modifiés localement certains de leurs avions de transport en plate-forme de guerre électronique : l’Égypte, la Grèce, l’Iran, et Israël. En 2008 la Grèce semble avoir retiré du service ses deux C-130H modifiés, les remplaçant par des Embraer R-99 directement conçus pour ces missions.
Le secret qui entoure les missions de ces avions est parfois si important qu’il est très difficile d’obtenir des informations sur les équipements des avions, et sur leurs missions exactes. En tout état de chose, gageons que Lockheed-Martin et le Pentagone disposent d’avions à même de défendre les intérêts américains un peu partout dans le monde. Peu d’EC-130 sont visibles par le grand public. Toutefois un très bel EC-130Q est exposé à NAS-Pensacola en Floride, au siège de l’US Naval Air Museum.
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