Après la Crise des missiles de Cuba l’une des plus grandes préoccupations des états-majors américains était de pouvoir riposter en cas d’attaque nucléaire de la part de l’URSS. Il était évident que les soviétiques utiliseraient une doctrine d’emploi de la bombe atomique similaire à celle des États-Unis : frapper en priorité les centres du pouvoirs et les principales installations militaires. C’est dans cet optique que les officiels du Pentagone cherchèrent à disposer d’un avion suffisamment volumineux pour pouvoir emporter un état-major complet durant un laps de temps supérieur à douze heures. C’est ainsi qu’apparu le Boeing E-4 Nightwatch.
Dans les années 60 cette question de la réactivité de commandement se posa de telle manière que l’on transforma en hâte quelques ravitailleurs Boeing KC-135 en poste de commandement volant EC-135. Ils disposaient encore des perches de ravitaillement en vol. Le résultat ne fut pas à la hauteur des attentes de l’US Air Force qui lança officiellement un plan d’achat en 1971 pour deux premiers avions. Deux constructeurs se positionnèrent : Boeing et son quadriréacteur de ligne 747-200B et Lockheed avec le C-5A. Malgré que ce dernier soit en service au sein de l’US Air Force depuis quelques mois ce fut l’avion de ligne de Boeing qui fut choisi. Il reçut alors le code d’E-4A, et la désignation de Nightwatch. Les termes du contrat prévoyait de modifier profondément la cellule de l’avion. Le Boeing E-4A vola pour la première fois le 13 juin 1973.
L’E-4A se présentait extérieurement comme un 747 largement militarisé. Sa principale modification résultait dans l’installation d’un dôme sur l’extrados avant du fuselage. Ce dôme abrite une multitude d’antenne et de récepteurs. Le fuselage du E-4A est hérissé de 46 antennes divers. Rapidement il apparut aux généraux de l’US Air Force que la plus grande lacune de cet avion était son autonomie. Il ne pouvait rester en vol que seize heures …
Il fut donc décidé de renvoyer les deux avions chez Boeing afin d’y adjoindre un réceptacle de ravitaillement en vol. Les résultats furent tels que la nouvelle version, désigné E-4B fut commandée à deux exemplaires supplémentaires. Parmi les équipements dont disposent les Nightwatch, figurent des systèmes de communications HF, MF, VHF et UHF ; mais également une protection contre les interférences d’origine électromagnétiques, une cabine totalement isolé de toutes radiation extérieur, et un système de communication par satellites. Depuis 1995 les E-4B disposent d’une communication encryptée directement rattaché aux deux Boeing VC-25A du Presidential Flight. Au sein de l’US Air Force les E-4B sont connu sous l’initiale d’AABNCP (Advanced AirBorne National Command Post, ou poste de commandement national aéroporté moderne) et sont basés à Offut-AFB au Nebraska aux côtés des avions-espions Boeing RC-135. Les E-4B servent au sein du 1st ACCS, une composante du très prestigieux et pourtant très secret 55th Wing.
Parmi les faits d’armes les plus importants des Nightwatch figurent l’alerte prise par l’un d’eux au-dessus de l’Europe lors de la chute du Mur de Berlin en novembre 1989. Un E-4B pris alors le relais de toutes les bases militaires de l’OTAN et se prépara en attente d’une éventuelle réaction d’agressivité de la part de Moscou. Les E-4B, avions traditionnellement discrets, ont connu un véritable baptême médiatique en août 1990 lorsque les armées irakiennes de Saddam Hussein envahirent le Koweït. Deux E-4B furent déployés en Arabie Saoudite dans l’attente que l’US Air Force ait le temps d’installer une base de commandement complète. Par la suite les E-4B ont tous participé à des missions au-dessus de l’Adriatique lors des opérations menés par les États-Unis et leurs alliés européens dans les conflits qui ont suivit l’éclatement de la Yougoslavie.
Au matin du 11 septembre 2001 le 55th Wing a fait, pour la première fois de son histoire, décoller les quatre Boeing E-4B. Ces appareils ont tous pris la direction du Moyen-Orient suite aux attaques terroristes massives qui venaient de frapper la côte est américaine. Les E-4B ont par la suite participé aux opération aérienne dans le cadre de Deliberate Force au-dessus de l’Afghanistan.
En août 2005 un E-4B a été mis à la disposition de la FEMA (Federal Emergency Management Agency, agence fédérale de gestion des urgences) suite au passage du cyclone Katrina sur le sud des États-Unis. L’exceptionnelle violence du phénomène, conjugué avec la totale désorganisation des moyens de secours locaux, fit que le gouvernement fédéral demanda l’aide militaire. Un E-4B fut immédiatement envoyé sur zone et dès que cela fut possible, il se posa à New-Orleans IAP afin d’y établir sa base. Cet avion fût relevé au bout de cinq jours par un second appareil du même type. Les spécialistes de la FEMA purent utilisé le formidable outil de commandement qu’est l’E-4B, et ce en en toute liberté.
En novembre 2005 l’US Air Force, tirant les enseignement de Katrina, demanda à ce que les quatre avions soient modifiés au standard E-4C, en y incluant entre autre un système de communication fédéral unique. Cependant ce nouveau standard n’a jamais été vraiment développé, le Pentagone se concentrant sur le futur E-10. Mais les équipements de communications ont bien été modifié. En fin d’après midi du 15 avril 2013 deux E-4B ont pris les airs, l’Amérique venait de nouveau d’être frappée en son cœur par le terrorisme, cette fois ci lors du marathon de Boston. Les deux avions ont regagné leur base quelques heures plus tard.
Désormais pleinement apte à la gestion des crises humanitaires et sanitaires l’E-4B Nightwatch est un appareil issu totalement de la Guerre Froide mais qui a su trouver sa place dans le monde d’aujourd’hui. Aucun de ces avions n’ont bien entendu été exporté. Le remplacement de ces machines devra néanmoins se poser assez rapidement, leurs cellules accusant le poids des ans.
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