A partir du milieu des années 20, Sikorsky se lança dans la construction d’hydravions pour le transport de passagers au-dessus de l’Atlantique. Il réussit même le tour de force de rivaliser avec les meilleurs industriels britanniques et français, alors véritables maîtres de l’hydraviation. Le succès des hydravions Sikorsky intéressa rapidement les militaires américains et c’est ainsi que naquit le JRS, un des meilleurs serviteurs de l’US Navy durant la Seconde Guerre mondiale.
Tout commença en mai 1935, quand les équipes de Sikorsky firent voler le prototype de l’hydravion de ligne S-43. Il s’agissait alors d’un appareil bimoteur à aile haute cantilever disposant d’une vaste cabine pouvant accueillir entre 12 et 15 passagers dans un confort remarquable. Le nouvel appareil reprenait les lignes générales du quadrimoteur S-42, le légendaire Clipper de la Pan-Am, un des hydravions de ligne les plus connus et les plus appréciés du moment. Le S-43 reçu donc tout naturellement le surnom de « Baby Clipper » parmi les équipages qui volèrent dessus. Outre la coque qui se trouvait sous l’intrados de la cabine, le S-43 disposait de deux flotteurs fixes aux extrémités des ailes. Par ailleurs Sikorsky eut l’idée d’intégrer un train d’atterrissage rétractable sur les flancs de l’hydravion, faisant ainsi de lui un véritable amphibie.
Dès la première année d’exploitation les commandes furent importantes, non-seulement aux États-Unis mais également en Europe et au Japon. Pourtant, il fallut attendre la fin de l’année 1936 pour que l’appareil enregistre sa première commande militaire. A cette époque, l’US Navy recherchait un hydravion susceptible de remplir des missions de transport de passagers et de liaisons pour les hautes personnalités entre les États-Unis et l’archipel d’Hawaï, ou entre les États-Unis et les Caraïbes. C’est donc tout naturellement qu’elle se tourna vers Sikorsky.
Après avoir testé le S-42 quadrimoteur, elle essaya le S-43 bimoteur. Ce dernier lui semblait totalement apte aux missions données. De plus le S-43 était moins coûteux à l’achat, et moins gourmand en carburant. Les appareils réceptionnés par les marins américains étaient tous strictement aux standards des appareils civils, à l’exception de leur livrée militaire. Ils reçurent la désignation de JRS sans toutefois être baptisés. Les équipages qui allaient voler dessus ne tardèrent pas à l’appeler par son sobriquet civil : Baby Clipper.
La commande de JRS porta sur 11 appareils qui furent versés pour dix d’entre eux à diverses unités de la Navy pour des missions de servitude et de liaisons et pour le dernier à l’état-major du corps des Marines pour des missions de transport VIP (Very Importante People, haute personnalité) au départ de Washington-DC. Le JRS des Marines déjaugeait depuis le fleuve Potomac.
Lors de l’entrée en guerre des États-Unis, le 7 décembre 1941, tous les JRS étaient encore en service, et l’un d’eux se trouvait d’ailleurs à Pearl Harbor pendant l’attaque japonaise. Il fut miraculeusement épargné par les bombardiers et les chasseurs nippons. Souhaitant renforcer ses unités de transport de passagers et de liaisons océanique la Navy procéda à la réquisition de huit S-43 civils qu’elle redésigna JRS-1. Ces appareils, tout comme les JRS d’origines, participèrent à la guerre en transportant les état-majors mais également des passagers militaires entre les États-Unis et l’Angleterre ou la zone Pacifique. Trois de ces hydravions furent perdus lors du conflit, certainement abattus par la chasse ennemie. L’épave de l’un d’eux fut repérée au large des côtes sud-ouest de l’Irlande quelques jours après son départ des États-Unis Les JRS furent retirés du service en octobre 1945, soit quelques semaines seulement après la fin des hostilités.
L’US Army Air Corps (plus tard US Army Air Force, USAAF) acquis de son côté en 1937 un lot de cinq S-43 qu’elle désigna OA-8 et qu’elle affecta à des missions d’observation, de reconnaissance côtière, mais aussi de sauvetage en mer. Les appareils furent tous basés dans le sud du pays, et opérèrent principalement en soutien des unités basés dans les Caraïbes et à Cuba. Les OA-8 n’étaient pas armés.
Après Pearl Harbor l’USAAF commanda à Sikorsky la construction de sept autres de ces machines qu’elle désigna OA-11. Cette fois-ci ces avions emportaient des armes, à savoir une charge de mines ou d’armes de profondeurs pour une masse de 450kg et fixés sous l’intrados de l’aile. Les OA-11 disposaient en outre de deux mitrailleuses de 12.7mm tirant par les hublots.
Ces avions furent basés dans le Pacifique, mais montrèrent des qualités de vol très médiocres et furent rapidement désarmés et remis à des missions d’entraînement. Les OA-8 et OA-11 furent remplacés dans leurs missions opérationnelles par le Consolidated OA-10.
Lors de l’invasion de la France en mai 1940 les autorités allemandes saisirent de leurs côté deux des quatre S-43 utilisés par Air France et les cédèrent à la Luftwaffe. Ils furent repeints et transformés en appareils de transport postaux. Ils restèrent ainsi en service une année avant d’être transférés pour des opérations de formations pour les futurs équipages d’hydravions. Leur sort final n’est pas connu.
Même si les versions militaires du S-43 n’ont pas connu d’heures de gloire particulières, ils ont au moins le mérite d’avoir été un des premiers maillons dans la chaîne continue de livraisons de matériels militaires par Sikorsky à l’US Navy.
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