Pour de nombreux aérophiles et spécialistes de l’histoire aéronautique c’est là la quintessence des avions de chasse à moteur à pistons. Le Hawker Sea Fury a réalisé son premier vol le 21 février 1945, c’est à dire il y a pile-poil 80 ans. Conçu pour la Fleet Air Arm il volera également sous les marquages de nationalité de neuf pays étrangers, participant même à la fin des années 1950 à la renaissance de la Luftwaffe. Il fait aujourd’hui le bonheur de chanceux propriétaires privés et la joie des spectateurs de meetings aériens.

Pourtant ce mercredi 21 février 1945 le premier vol de l’avion de chasse passa quasi inaperçu, et pour cause. La Seconde Guerre mondiale était toujours d’actualité. En Rhénanie-Palatinat la ville de Worms est en feu : la Royal Air Force y déverse 936 tonnes de bombes, dont de nombreuses incendiaires. On dénombrera 239 morts et plus de 200 disparus, principalement des civils. Au même moment dans le Pacifique, au large de l’île d’Iwo Jima le porte-avions américain USS Bismark Sea est coulé par des bombardements japonais, le coup de grâce venant de deux kamikazes qui se font exploser sur son pont d’envol. Un total de 318 marins américains meurent ce jour là. Donc non le premier vol d’un chasseur britannique, aussi prometteur soit-il, n’est pas du tout la priorité des actualités de l’époque.

Pourtant le Hawker Sea Fury va apporter beaucoup à la Royal Navy en général et à sa Fleet Air Arm en particulier. Il va permettre de remplacer très rapidement après la guerre les chasseurs qui en ont été hérités, Vought Corsair et Supermarine Spitfire notamment. En Corée il deviendra l’un des cauchemars de la chasse ennemi, réussissant même à tenir tête aux Mikoyan-Gurevitch MiG-15 Fagot pourtant théoriquement bien supérieurs. Car le secret du Sea Fury est là : en plus d’être hyper manœuvrant c’est le chasseur à moteur à pistons le plus rapide de son temps. Et même de tous les temps avec une vitesse de croisière de près de 700 kilomètres heures dans sa version Sea Fury FB Mk-11. En vitesse pure à 5500 mètres d’altitude il atteint les 740 kilomètres heures, normalement alors réservés aux jets. C’est le nec plus ultra des chasseurs «à hélice». Avec un tel palmarès il n’est pas étonnant qu’il ait connu le succès commercial.

Australiens, Canadiens, ou encore Néerlandais l’achètent pour ce qu’il est : un chasseur embarqué. Eux aussi le feront opérer depuis un pont d’envol de porte-avions. En seconde main il fait le bonheur, depuis le plancher des vaches des pilotes irakiens et pakistanais. En 1959 la toute jeune Luftwaffe achète huit exemplaires biplaces désarmés qu’elle emploie comme remorqueurs de cibles. Pourtant Hawker reconnaîtra avoir subit un échec cuisant avec la Marine Nationale qui lui préfère le Vought AU-1 Corsair américain.

Pas de doute les designers britanniques avaient du talent.

Aujourd’hui plusieurs Hawker Sea Fury volent encore. Après avoir bander les muscles entre les années 1970 et 1990 incluses face à des Grumman F8F Bearcat lors de courses, notamment à Reno en Californie, ils volent de manière beaucoup plus pépères. Ce sont des avions vedettes de meetings aériens. Par contre il est fréquent que des commentateurs peu regardants sur la vérité historique les désignent comme avions de la Seconde Guerre mondiale. Ce qu’ils ne sont pas ! À 80 ans le Sea Fury n’a rien perdu de son charme et de sa musculature saillante. C’est un avion ça, un vrai !

Photos © Royal Navy Historic Flight Library.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

11 réponses

  1. J’adore cet avion. Il fait partie de l’apogée des avions à moteur à piston. J’ai eu la chance de le voir au sol et en vol comme de nombreuses personnes. C’était l’exemplaire de Christophe Jacquard, aux couleurs de la marine australienne et basé sur l’aérodrome de Dijon-Darois. Malheureusement cet avion à été vendu en 2022 à un nouveau propriétaire canadien.

  2. Et encore une fois cela se verifie, les britanniques savent dessiner les meilleurs avions ou les pires. Le Fury est finement dessiné, c’est une vrai réussite. Un faux air de Bearcat mais plus affiné. La démo du combo Seafury / Hunter est superbe avec un 1er passage pleine balle aile dans aile….et les vortex de bouts d’aile.

  3. Bonjour, je vais en faire hurler beaucoup, mais je trouve une certaine ressemblance entre le Sea Fury et….le FW190. Ligne très proche, énorme moteur et casserole d’hélice, hélice gigantesque….

    1. Il se peut en effet que Hawker se soit inspiré du génial FW-190 pour sa conception, le Royaume-Uni en avait capturé un dès 1942, mais Hawker avait déjà les bases avec le Hawker Typhon et Tempest.

  4. Je crois que je vais aussi en faire huler Cris Top mais avant cet article je n’avais jamais entendu parler de lui. Je suis plus passionnée par les avions récents que ceux aussi vieux.

    1. Salut Arnaud, Rebecca et les Passionnés,
      Oui, Rebecca, tu vas nous mettre en « Fury », nous les Cris Top, comme tu l’écris…, et Christophe, ton serviteur….!
      En effet, comme je n’écris pas suffisamment d’articles, je me permets de les remettre en lumière quand je peux….Mdr ! Et ici, comme c’était le cas aussi tout récemment pour l’article d’Arnaud « Les Derniers Chipmunk d’Europe » (Chipmunk pour les anglophones et Tamias, véritable nom scientifique, pour les autres ….clin d’œil à Arnaud), je vous ai déjà brièvement présenté le Fury lors de son passage au meeting aérien 2024  » Le Temps des Hélices » à La Ferté-Alais (photo de couverture notamment pour les plus attentifs, puis un paragraphe agrémenté d’une belle photo en statique, accompagné d’une moto ancienne, puis en vol, et enfin une photo de sa superbe hélice auréolée de sa non moins superbe casserole rouge…) .
      Envoutante machine volante que voilà, dans son magnifique habillage bicolore vert bianchi et gris anthracite, auréolé de ses » bandes d’invasion », alors même comme le rappelle aussi Arnaud, c’est un avion d’après-guerre (la 2ème évidemment)…..Celui-ci est encore équipé de son Bristol Centaurus XVIIC original, un 18-cylindres en double étoile développant au bas mot 2480 ch, accouplé à une hélice 5 pales produite par Dowty Rotol. D’un poids maxi de 5,7 tonnes pour 4,2 tonnes à vide, le Sea Fury file sans broncher à 600 km/h pour une vitesse maximale proche de 740 km/h. Cet exemplaire immatriculé F-AYSF, qui a appartenu fut un temps aux ailes armées iraquiennes, est la propriété du collectionneur italien Stefano Landi depuis 2019; il était piloté à La Ferté par Bruno Ducreux de la société AéroRestauration Service (ARS) basée à Dijon-Darois, qui a entrepris une révision en profondeur de la « bête » à son arrivée en Septembre 2023. C’est un avion qui dégage une puissance et bestialité qui vous hérissent le cuir chevelu…enfin plus celui d’Arnaud…!

      Bonne relecture !
      Passionnément,

      https://www.avionslegendaires.net/2024/07/actu/un-passionne-a-la-decouverte-du-meeting-de-la-ferte-alais-2024/

        1. Oui, je m’en doute, mais l’Essentiel est en dessous ! Et là, je n’ai pas de doute ….
          Passionnément,

  5. Bonjour,
    Le Sea Fury est-il une création de à à z, ou bien ce serait une « suite » du Tempest ? Même si ce dernier n’était pas un chasseur embarqué.
    Je trouve la ressemblance forte avec le Tempest mk II.
    Merci.

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