Halberstadt C.V

À bien des égards la Première Guerre mondiale fut une période de faste pour la construction aéronautique internationale. Même si de nombreux avionneurs disparurent une fois la paix revenue ils avaient pour beaucoup marquer leur temps avec parfois plusieurs aéronefs et souvent seulement un ou deux. Le constructeur allemand Halberstadt fut de ceux là avec notamment un avion de reconnaissance apparu un peu tardivement dans le conflit mais qui connut une belle carrière dans les années 1920, hors d’Allemagne. Il s’agit de l’Halberstadt C.V.

À la fin de l’année 1917 l’avionneur Halberstadt présenta à l’Idflieg, l’Inspektion der Fliegertruppen, son prototype d’avion de reconnaissance armée C.III. Doté d’un moteur Benz Bz.IV à six cylindres en ligne d’une puissance de 200 chevaux et armé de deux mitrailleuses de calibre 7.92 millimètres, l’une tirant en position de chasse et l’autre sur affût mobile arrière, ce C.III était parfaitement dans l’ère du temps. Une commande pour cinquante exemplaires fut passée et les premiers exemplaires entrèrent en service en janvier 1918. Malheureusement après la livraison du sixième avion de série la Luftstreikräfte l’annula. Le moteur Bz.IV était trop capricieux. L’avionneur fut sommé de revoir sa copie. Ainsi naquit le C.V.

Il reprenait les grandes lignes du C.III mais avec une voilure légèrement redessiné et un empennage affiné. Le moteur Benz Bz.IV laissa la place à un Bz.IVü de 220 chevaux jugé plus fiable. Les pilotes allemands l’essayèrent et en conclurent que le contrat initialement signé pour le C.III pouvait être reporté sur ce C.V. Quarante-quatre exemplaires furent ainsi produits, et les premiers entrèrent en service en avril 1918. Deux cent huit avions supplémentaires furent construits sur un contrat de quatre cents. Avant que la fin des hostilités ne stoppe sa production l’Halberstadt C.V démontra de bonnes qualités intrinsèques. Sa charge de bombes de 50 kilogrammes en faisait un avion adapté aux missions de harcèlement des troupes françaises et britanniques. On put croire que l’Armistice du 11 novembre allait tuer sa carrière. Ce n’est que partiellement vrai.

Biplan d’envergure égale à ailes décalées construit en bois et toile l’Halberstadt C.V était un avion aux formes assez ramassées, caractéristiques des appareils de reconnaissance armée de la seconde moitié de la Première Guerre mondiale. Son moteur à six cylindres en ligne Benz Bz.IVü entraînait une hélice bipale en bois. Une mitrailleuse LMG 08/15 Spandau de calibre 7.92 millimètre était synchronisée au pas de l’hélice tandis qu’une arme similaire était installée sur affût mobile arrière et opérée par l’observateur. La charge de bombes était fixée en intrados de fuselage. Les deux membres d’équipage prenaient place à bord d’un poste de pilotage biplace en tandem à l’air libre.

Dès la signature de l’Armistice des Halberstadt C.V furent essayés par des pilotes belges, britanniques, et français spécialement missionnés pour cela. Et leurs comptes-rendus furent sans appel : c’était là un des meilleurs avions allemands de son temps. Des appréciations qui furent pour beaucoup dans la volonté de pays comme l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, et la Pologne d’en récupérer. Ils furent acquis gracieusement, au titre des dommages de guerre. Et c’est ce dernier pays qui les engagea en premier au feu. En effet la méconnue guerre russo-polonaise qui se déroula entre février 1919 et mars 1921 vit les Polonais engager leurs C.V contre les troupes de la toute jeune URSS. Ce conflit frontalier résultat de blancs dans les attributions du traité de Versailles quand aux limites des deux pays. À Moscou Lénine entendait agrandir son territoire, aux détriments de la Pologne. Les Halberstadt C.V remplirent aussi bien des missions de reconnaissance que d’attaque au sol.

De leur côté les trois états baltes utilisèrent leurs Halberstadt C.V respectifs pour des missions de surveillance frontalières et de reconnaissance côtières. Certains furent d’ailleurs modifiés en hydravions à flotteurs L’Estonie et la Lettonie les conservèrent jusqu’en 1928 pour la première et 1930 pour la seconde. Il est à signaler que la Suisse en a aussi fait voler au moins quatre exemplaires, s’agissant d’avions capturés durant la Première Guerre mondiale après des atterrissages de fortune sur son territoire. Ils ne servirent que quelques années seulement.

L’Halberstadt C.V donna naissance à deux sous versions qui ne dépassèrent pas le stade expérimental. Le C.VII possédait un moteur Maybach Mb.IV de 245 chevaux et le C.IX un Hiero H de 230 chevaux. Ces gains de puissance ne furent pas jugés pertinents par la Luftstreikräfte qui ne donna pas suite. Aujourd’hui au moins un Halberstdadt C.V est connu pour être parvenu jusqu’à nous. Il est préservé dans la halle Bordiau, au musée royal de l’Armée et d’Histoire militaire de Bruxelles.