Actuellement quand on parle aviation au Canada on pense forcément centenaire de l’ARC. Il y a deux jours nous vous révélions l’existence du programme HADES visant à fournir à partir du Bombardier Global 6500 une plateforme pouvant remplacer les Beechcraft RC-12 Guardrail de reconnaissance en dotation dans l’US Army. L’occasion était trop belle pour vous proposer une petite rétrospective des avions canadiens que celle-ci utilisa dans le passé ou fait actuellement voler dans ses rangs. L’US Air Force et l’US Navy ne sont par contre pas traitées ici.
En fait si on excepte le mythique avion d’entraînement élémentaire DHC-1 Chipmunk tous les avions à moteurs à pistons ou à turbopropulseurs conçus par De Havilland Canada puis par Bombardier ont volé ou vole encore sous les couleurs de l’US Army. Certains ont même fait la guerre avec elle.
La première fois que l’US Army vola sur avion canadien fut avec l’avion de brousse DHC-2 Beaver, lequel reçut la désignation de L-20A et L-20B. Au total 974 exemplaires furent produit pour elle et utilisés principalement comme avion de liaison et parfois d’observation. En 1962 ils reçurent les désignations d’U-6A et U-6B Beaver. Il est à noter d’ailleurs qu’au cours de cette même année 1962 apparut dans l’arsenal de l’US Army l’U-1A de transport léger et de soutien aux opérations polaires, lequel était en fait un DHC-3 Otter. Quelques dizaines servirent, bien moins donc que le Beaver.
Les De Havilland Canada U-1A Otter et U-6A/B Beaver avaient pleinement leur place dans l’arsenal aérien de l’US Army en ce début des années 1960. Ils ne dépareillaient pas vis-à-vis des bimoteurs légers Beechcraft U-8F Seminole et Cessna U-3A Skyknight pas plus que des monomoteurs légers Helio U-10A Courier et Piper U-7A Super Cub. En fait ils s’inscrivaient parfaitement dans la logique d’emploi de ces avions. Il faut dire que dans l’inconscient collectif de nombreux passionnés d’aviation l’US Army ne pouvait à côté de ses hélicoptères posséder que des avions légers. Il n’y avait là rien de moins faux ! Car comme d’autres aviations terrestres aujourd’hui celle des États-Unis faisait alors voler des avions de transport tactique, et l’un d’eux était de facture canadienne.
Et c’est le De Havilland Canada DHC-4 Caribou qui marqua durablement l’histoire de l’US Army. Apparu en 1961 d’abord sous la forme d’un lot de 56 exemplaires appelés AC-1 Caribou, puis CV-2A à l’automne 1962, une seconde série améliorée fut désignée CV-2B. Un total de 103 exemplaires de ce bimoteur à capacités ADAC servit jusqu’au milieu des années 1980. Dans l’armée américaine le CV-2A/B Caribou réussit le tour de force de devenir plus populaire que les vieux Douglas C-53 Skytropper offerts par l’US Air Force. Devant les réussites nombreuses du CV-2A/B Caribou il fut logique que l’US Army achète la version évoluée du DHC-4, sous la forme du DHC-5 Buffalo. Seulement voilà comme avec l’Otter vis-à-vis du Beaver les commandes de Buffalo furent bien moindres que celles de Caribou. Quatre exemplaires seulement furent acquis, désignés CV-7A. Les Buffalo furent principalement employé pour des missions à l’intérieur des États-Unis.
Ce ne fut pas le cas des De Havilland Canada U-1A Otter, U-6A/B Beaver, et CV-2A/B Caribou qui connurent le feu… au Vietnam. Plusieurs d’ailleurs y furent perdus en opération. Pour l’US Army ces avions représentaient souvent des gages de robustesse et de rusticité. Exactement ce qu’elle réclamait alors aux avions canadiens !
Et aujourd’hui alors ? Des avions De Havilland Canada, puis Bombardier et même Viking, volent encore dans les rangs de l’US Army. Et certains ont des rôles dignes du programme HADES. Le premier, et non des moindres, est le De Havilland Canada DHC-6 Twin Otter qui vola de 1976 à 2013 sous la forme de l’UV-18A comme avion de soutien aux Golden Knight, l’équipe parachutiste de représentation de l’armée américaine. Les quatre exemplaires furent remplacés cette année là par un nombre identique d’UV-18C bien plus modernes. Ce sont en fait des Viking Twin Otter 400 à peine militarisés. Les UV-18A et UV-18C ne servent qu’à l’entraînement et aux répétitions des paras d’élite américains, jamais à leurs représentations. Pour ça ils ont d’autres avions…
L’un des avions les plus mystérieux de l’arsenal de l’US Army est canadien. Il dérive directement de l’avion de ligne régional DHC-7 Dash 7. En 1980 trois exemplaires furent acquis comme avions de reconnaissance électronique sous la désignation De Havilland Canada RC-7A. Onze ans plus tard ils virent leur désignation modifiée en O-5A puis encore un an après en EO-5B. Réalisant des missions d’espionnage électronique le long des frontières d’états considérés comme ennemis des États-Unis ils arboraient une livrée faisant penser à des avions civils. Ils ont été retiré du service en 2017. Pourtant en ce début d’année 2024 quatre EO-5C volent encore et sont régulièrement déployés en Asie afin de surveiller les agissement de la Corée du Nord, et sans doute aussi de la Chine. Opérant sous contrôle de l’US Army ils ont été aperçu il y a quelques années dans le Golfe, au plus fort de la guerre contre l’autoproclamé État Islamique.
Forcément après le De Havilland Canada DHC-7 Dash 7 vient forcément le Bombardier Dash 8. Si chez nous c’est un avion bombardier d’eau capable de mener des missions secondaires de transport de personnels dans l’US Army ses deux versions ont des rôles assez différents. Les onze exemplaires du RO-6A Saturn Arch remplissent des fonctions de reconnaissance électronique et d’espionnage aéroporté au plus près des frontières nord-coréennes et iraniennes. Ils figurent parmi les Dash 8 les plus profondément modifiés. À côté les deux C-147A ont remplacé d’autres «avions étrangers», les Fokker C-31A Troopship construits aux Pays-Bas. Comme les UV-18C ils volent aux profits des Golden Knight… lors de leurs représentations officielles.
Vous remarquerez que les UV-18A/C et les C-147A n’ont pas de nom de baptême alors même que les UV-18B de l’US Air Force sont eux officiellement appelés Twin Otter. Il en est de même pour les EO-5C dont le gros des missions est classé top secret, comme d’ailleurs les RO-6A qui eux sont appelés Saturn Arch. Comme quoi il n’y a pas vraiment de règles.
Quoiqu’il en soit vous en savez désormais un peu plus sur les avions canadiens qui ont volé ou vole toujours dans l’US Army, et ce avant même que le Bombardier Global 6500 n’ait été sélectionné pour être la base du programme HADES.
Photos © Army Transportation Museum Library et US Department of Defense.
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5 Responses
Bonjour Arnaud. Impressionnant sachant que le Congrès américain souffre généralement du syndrome NBH (Not Built Here) quand vient le temps d’autoriser l’achat de matériel militaire étranger. Dans la liste des avions canadiens utilisés par l’US Army il y a un petit oubli, soit le jet Bombardier Challenger 650 du programme ARTEMIS. Il y aurait au moins deux de ces discrets avions espions qui volent à la frontière orientale de l’Europe pour surveiller les troupes russes au profit de l’OTAN et de l’Ukraine.
ARTEMIS n’est pas une omission de ma part, c’est juste qu’officiellement les deux avions en question ne sont pas opérationnels. J’ai longuement hésité à les intégrer mais comme le Pentagone les considère encore comme des avions de présérie j’ai choisi de les laisser de côté. Sans doute ai-je eu tort.
Il n’y a pas de souci ! Pour des avions de pré-série, ils sont particulièrement actifs car ils ont effectué des centaines de missions depuis le déclenchement de la guerre Ukraine/Russie.
Je me réfère à ce qu’en dit le Pentagone. Rien de plus.
Le nombre de Beaver est impressionnant, les américains l’ont donc adoré?