La Turquie va t-elle vendre (massivement) son TF Kaan à l’Arabie Saoudite ?

Ankara pourrait bien être à l’aube d’un des plus beaux coups de l’industrie aéronautique du siècle. Les autorités turques ont annoncé que des pourparlers ont été engagé autour d’un potentiel contrat de cent avion de combat de nouvelle génération TAI TF Kaan. Le client annoncé, la Royal Saudi Air Force, pourrait ainsi au début de la décennie prochaine retirer du service ses chasseurs McDonnell-Douglas F-15C/D Eagle. L’Arabie Saoudite s’est dite intéressée également par d’autres aéronefs de l’avionneur turc.

La révélation de ces négociations entre Ankara et Ryad intervient moins d’un an après le premier vol du prototype du TF Kaan. Rappelons que durant les dernières années cet avion annoncé furtif était désigné TF-X. Fin décembre 2024 une délégation officielle saoudienne est venue en visite officielle auprès du complexe militaro-industriel turc. Ses dirigeants se sont dits très impressionnés par le TF Kaan et ont immédiatement parlé d’un marché potentiel de cent avions, à condition que les livraisons débutent dès 2030.

Sachant que la Türk Hava Kuvvetleri doit réceptionner ses exemplaires en premier à partir du premier semestre 2028 la demande de la Royal Saudi Air Force n’a rien d’extravagante. Même si le contrat semble aller dans la bonne voie certains y voient un coup de pression sur le future administration Trump après le refus de l’administration Biden de vendre à l’Arabie Saoudite le Lockheed-Martin F-35A Lightning II. Pourquoi une telle option ? Parce qu’il y a un précédent. Le Dassault Aviation Rafale F4 français n’a t-il pas récemment servi de lièvre aux Saoudiens pour faire revenir les Allemands dans le droit chemin autour des Eurofighter EF-2000 Typhoon Tranche 4 ? Ici cela pourrait (malheureusement pour les Turcs) être le même scénario.

N’allons pas porter la poisse à Turkish Aerospace Industries car au final son TF Kaan semble bien avoir de solides arguments à faire valoir sur ce dossier. En premier lieu la Turquie est un allié des États-Unis, membre de l’OTAN, et donc lui acheter des avions de combat ne risque pas de placer Ryad sous la menace de la loi CAATSA. Ensuite le TF Kaan semble de plus en plus capable de tenir la dragée haute aux avions de combat des éventuels ennemis de l’Arabie Saoudite. Plus on en apprend sur lui et plus on comprend que les ingénieurs turcs ont fait du bon boulot avec lui. Enfin un client comme la Royal Saudi Air Force, habituellement chasse gardée des Américains et des Britanniques, lui ouvrirait forcément des portes un peu partout dans le monde. N’oublions pas que des pays comme l’Azerbaïdjan et la Malaisie ont déclaré depuis quelques mois l’observer de près.

Outre le TF Kaan l’industriel TAI pourrait bien placer deux modèles d’aéronefs supplémentaires. Son tout nouvel hélicoptère de combat T929 ATAK 2, qui a lui volé pour la première fois en 2023, ainsi que son drone d’attaque et de surveillance Aksungur semblent particulièrement intéresser les Saoudiens.

Quel que soit la finalité de ces négociations elles démontrent un changement de paradigme en cours dans l’industrie aéronautique de défense. Face aux réticences diplomatiques de certains pays européens des nations émergentes comme la Corée du Sud ou la Turquie pourraient savoir tirer leur épingle du jeu.

Affaire (forcément) à suivre.

Photo © TAI