Certains y voient un lièvre j’y distingue plutôt un miroir aux alouettes. En ce début mai 2024 la Royal Saudi Air Force persiste à présenter l’avion de combat français comme un potentiel contrat à venir, face à son concurrent européen de toujours mais également à un nouveau venu en provenance des États-Unis. Pourrait t-on ainsi voir prochainement le Dassault Aviation Rafale F4 l’emporter face aux Eurofighter EF-2000 Typhoon Tranche 4 et Boeing F-15EX Eagle II ? Permettez moi d’être sceptique.
Officiellement la compétition se poursuit, surtout depuis que Londres a obtenu de Berlin que celle-ci lève son véto à la vente du Typhoon Tranche 4 à la Royal Saudi Air Force. Dans ces conditions on peut aisément se demander à quoi cela rime que Ryad persiste à faire miroiter à Paris un potentiel contrat qui devient de plus en plus hypothétique. L’Arabie Saoudite possède déjà 70 Typhoon plus anciens et ces nouveaux exemplaires permettraient de rationaliser encore un peu plus sa flotte de chasse tout en assurant la succession des Panavia Tornado IDS arrivés en fin de carrière.
Pour autant le chiffre de 54 exemplaires du Dassault Aviation Rafale est toujours cité par les différentes sources internationales sur ce dossier saoudien. Un peu comme si les Saoudiens jouaient une étrange partie de poker menteur mêlée de billard à trois bandes. Trois bandes ? Oui, la première est donc l’Eurofighter EF-2000 Typhoon, la deuxième le Dassault Aviation Rafale, et la troisième ? Le Boeing F-15EX Eagle II évidemment. Car Washington DC compte bien entrer dans la danse et ne pas laisser les Européens se discuter entre eux le gâteau saoudien. Après tout la RSAF aligne bien actuellement un peu plus de 220 F-15C/D Eagle et F-15SA Saudi Eagle, pourquoi pas dans un avenir proche des F-15EX ?
Et Dassault Aviation dans tout ça ? Que dalle ! L’avionneur français n’a jamais réussi à imposer le moindre de ses avions de combat à l’Arabie Saoudite malgré de belles réussites dans le passé dans la région. Que ce soit en Égypte, en Irak, en Israël, ou encore en Jordanie on a volé Dassault ou Dassault-Breguet voire même on vole Dassault Aviation. Mais pas en Arabie Saoudite. L’aviation de combat de ce pays a toujours été chasse gardée des Américains et des Britanniques. Ce sont ces derniers qui ont permis aux consortium Panavia puis Eurofighter de s’y implanter.
Du temps des Mirage III et Mirage F1 les Saoudiens ont préféré respectivement les Lightning britanniques et F-5E/F Tiger II américains. Pourtant dans les années 1970 ils faillirent rompre avec cette triste habitude et acheter le Super Mirage 4000, mais c’était compter sans la piteuse diplomatie giscardienne. Donc non l’avionneur clodoaldien (ou altoséquanais, c’est au choix c’est cadeau !) n’a jamais réussi à s’imposer face aux Américains et Britannique dans cette partie du Moyen-Orient.
Alors pourquoi pourrait-on encore y croire ? D’abord parce que malgré sa filiation le Rafale ne ressemble à aucun de ses prédécesseurs. Il est unique. Il est capable de renverser la table et de s’imposer sur des marchés qui auraient dû lui être fermés. On en a eu la preuve avec la Croatie ou avec l’Indonésie et on devrait en avoir une autre très prochainement avec la Serbie. Pourtant l’Arabie Saoudite n’est aucun de ces pays et là encore n’oublions jamais que le principal fournisseur de pétrole de la planète demeure dans les mains de l’Amérique. Un de nos plus proches alliés diplomatiques et militaires certes mais aussi un très coriace concurrent sur de nombreux marchés d’armement, et notamment sur celui des avions de combat. Même si Joe Biden et Emmanuel Macron s’entendent bien ils ne se feront pas de cadeau sur ce dossier, d’autant que Richie Sunak et Olaf Scholz sont en embuscade.
Donc oui je suis sceptique sur les chances saoudiennes du Rafale. Pour autant je serais le premier à reconnaître mon erreur si l’avionneur altoséquanais (ça change de clodoaldien n’est-ce pas ?) venait à emporter le contrat.
Affaire donc à suivre.
Photo © ministère des Armées.
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9 Responses
La chance que pourrait avoir le Rafale dans ce dossier sont les relations exécrables entre Mohammed ben Salmane et Joe Robinette Biden.
Mon cher Arnaud,
Le plus important est dans les rumeurs « persistantes » .
Et bien entendu le fait que si le contrat doit capoter, tous les cierges que nous brûlons en pensée n’auront servis à rien.
D’abord, pourquoi vendre aux Saouds? Ce ne sont pas les clients les plus vertueux du monde, et en prime ils sont une chasse gardée des US, et du royaume Britannique…
Et bien par ce qu’il faut y croire.
Le consortium Eurofighter est un peu plombé par ses dissensions et le F15, même remis au goût du jour, est un élément clef de l’adversaire désigné des Saoudiens.
Et malgré la paix des braves avec l’Iran, le royaume est sur ses gardes.
Il ne faut pas se priver du fait que si l’Égypte peut se payer le Rafale, c’est parce que le royaume veille au grain et finance l’armée Égyptienne.
De plus, la politique locale n’est pas tant celle du pays que celle, bien plus personnelle, de son monarque. Et le « moment rafale » au moyen Orient, c’est pas une légende : Jordanie, Irak… On est loin des déconvenues des années 2000!
Il y a un paramètre qui devrait entrer en ligne de compte, au delà du jeu diplomatique, ce sont les capacités de production des usines de Dassault et de leurs sous traitants. Seront ils capables de relever le défi pour des livraisons dans des délais acceptables pour les clients? Au rythme actuel de production, 54 avions représentent 18 mois de production….
Bonjour Arnaud, Staff et passionnés.
Acheter un avion de combat n’est pas comme acheter une petite voiture. Elle survient à la suite d’évaluations économiques, militaires, industrielles et politiques complexes.
Ce sont des coûts énormes, même pour un État riche comme l’Arabie Saoudite. Il est donc juste que nous essayions de tirer le meilleur parti de ces dépenses.
Le Rafale F4, avion d’exception, est certainement un excellent choix. Mais le Typhoon Tranche 4 et le Boeing F-15EX Eagle II disposent également de grandes capacités.
La différence pourrait être faite par la possibilité d’une collaboration à la production d’un avion de génération 4+. Avec la perspective de rejoindre un programme de sixième génération. Possibilité déjà exclue pour GCAP.
La France pourrait donc jouer une carte importante avec une collaboration industrielle, peut-être également étendue au programme SCAF ( si les Allemands le permettent ).
Et avoir plus de choix permet aussi de baisser le prix. Comme quand on achète une petite voiture….
Je ne serais pas pessimiste sur le Rafale.
Évidemment, en tant qu’Italien, j’espère que le Typhoon sera choisi.
Traduit avec Google
« l’avionneur altoséquanais (ça change de clodoaldien n’est-ce pas ?) »
J’ai toujours préféré « francilien », bien plus rassembleur
J’ai du mal à imaginer que la présence du Rafale dans les candidats ne soit guère plus qu’un moyen de négocier les autres contrats à la baisse.
il faut avouer que les chances du rafale sont minces dans ce dossier, les enjeux politiques depassent les capacites de l’avion ainsi que ses performances.
il faudrait un sacre coup de poker pour que le rafale sorte vainqueur dans cette lutte, avec surement d’enorme contrepartie demande a la France en echange de l’achat de « quelques » rafales.
Bonsoir, je pense que la possibilité d’un contrat est bien réelle. Déjà, Dassault ne ŕépondrait pas en envoyant un devis (le Japon était soi-disant intéressé par le Rafale il y a 4-5 ans mais c’était pour mettre la pression pour négocier le F35 et M. Trappier n’était pas dupe). En plus, le comportement Allemand fait peur à l’Arabie Saoudite. Le seul prétexte pour ne pas perdre la face serait d’exiger un délai de livraison impossible à tenir par Dassault. Pour moi, l’Arabie Saoudite va commander du Rafale et du Typhoon comme le Qatar il y a quelques années.
1/ c’est loin d’être perdu car il est habituel que les saoudiens prennent une deuxième source en plus de jets US, 2/ de plus ces pays fonctionnent par créneau de négociations exclusives, donc actuellement c’est le Rafale qui dispose du créneau après celui de l’EF 3/ les investissements sur l’EF ne portent plus beaucoup sur la version export actuel mais sur une nouvelle version plus future. Donc pour moi, tout dépend de l’urgence du besoin saoudien ?
Un élément important, d’ordre politique celui-là, milite cependant en faveur de l’avion français : si les relations entre MBS et Macron n’ont pas toujours été sans nuages, le Prince héritier pourrait néanmoins vouloir marquer par l’octroi d’un contrat si emblématique à la France la nouvelle posture d’indépendance du Royaume vis à vis de Washington, qu’il titille par ailleurs en faisant mine désormais de se rapprocher du « Sud global ».