En guise de compte à rebours vers la célébration du centenaire de l’Aviation royale canadienne (ARC) en avril prochain, je vous propose à chaque mois un album photo des aéronefs utilisés par cette force aérienne au fil des ans. Après ceux illustrant les avions de brousse, les aéronefs de formation, les avions de patrouille maritime et les hélicoptères, l’album de janvier porte sur les avions de transport.
Deuxième dans le monde en termes de superficie, le Canada est un pays de la taille d’un continent. De l’Atlantique au Pacifique, les Canadiens vivent dans six fuseaux horaires distincts. La distance à vol d’oiseau entre les capitales provinciales de St. John’s à Terre-Neuve et de Victoria sur l’île de Vancouver est d’un peu plus de 5000km. C’est sensiblement la même distance entre St. John’s et Vienne en Autriche ! Située à plus de 4000km d’Ottawa et à seulement 817km du Pôle Nord, Alert est la communauté la plus nordique au monde. On y retrouve une station météorologique et une base des Forces armées canadiennes où vivent moins d’une cinquantaine de braves qui sont approvisionnés annuellement par un pont aérien nommé Opération Boxtop. Pas étonnant que l’ARC se soit doté d’une flotte conséquente d’avions de transport. Aussi, le déploiement de troupes canadiennes à l’étranger dans le cadre de la Deuxième Guerre mondiale, de la Guerre de Corée, de l’OTAN ainsi que lors de missions de maintien de la paix de l’ONU ont de tout temps sollicité les capacités de transport de l’ARC.
Pourtant, durant la période d’Avant-guerre (1924-38) la capacité de transport de l’ARC se limitait essentiellement aux avions de transport léger Fairchild FC-71 et Bellanca Pacemaker également utilisés comme avions de brousse. Pour renforcer ces maigres moyens, l’ARC fit l’acquisition d’une flotte d’avions amphibies Grumman Goose dont les premiers exemplaires furent livrés tout juste avant la guerre.
Durant la Deuxième Guerre mondiale (1939-45), le nombre d’avions de transport de l’ARC va bondir. Conscient de l’inadéquation de ses moyens, l’ARC va réquisitionner des bimoteurs Boeing 247D civils et en commander d’autres. S’ajouteront également des bimoteurs De Havilland DH.90 Dragonfly ainsi que les appareils Lockheed Electra, Electra Junior et Lodestar. Également utilisé pour la formation, c’est toutefois le Beechcraft Expeditor qui deviendra le principal bimoteur léger de transport. Pour le transport lourd, les Douglas Dakota de l’ARC déployèrent leurs ailes tant sur les fronts européen qu’asiatique. Fait intéressant, une petite flotte de bombardiers Boeing B-17 Flying Fortress spécialement aménagés en avion de transport au long cours assuma à compter de 1943 le service postal trans-atlantique essentiel au bon moral des troupes déployées sur le front. Enfin, le Noorduyn Norseman devint le principal monomoteur de transport de l’ARC qui l’exploita également comme avion de brousse.
L’évolution de la flotte des avions de transport de l’ARC durant la Guerre froide (1946-91) sera phénoménale. Passant des traditionnels moteurs à pistons aux turbopropulseurs, puis aux réacteurs, on assiste à une véritable révolution technologique. Aux valeureux Dakota s’ajouteront le monomoteur à pistons DHC-3 Otter, les bimoteurs Fairchild C-119 Boxcar, Bristol Freighter et DHC-4 Caribou, ainsi que les quadrimoteurs Canadair North Star. Durant cette période, apparaissent les premiers avions turbo-propulsés à arborer les cocardes unifoliées: Canadair CC-106 Yukon et CC-109 Cosmopolitan, DHC-5 Buffalo, DHC-6 Twin Otter, DHC-7 Dash 7 et DHC-8 Dash 8. Le légendaire Lockheed CC-130 Hercules deviendra le principal avion de transport tactique de l’ARC qui acquiert successivement les modèle B, E et H au fil des ans. L’ARC devint l’une des premières forces aériennes à aligner des avions de transport à réaction en se dotant d’appareils De Havilland D.H. 106 Comet, suivis par de plus fiables Boeing CC-137 Husky. Seul avion de conception française à jamais se tailler une place au sein de l’ARC, l’élégant Dassault CC-117 Falcon assuma des fonctions de transport VIP. Il sera plus tard remplacé par des Canadair CC-144B Challenger.
Avec la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’URSS, la Période moderne (1991 à aujourd’hui) sera caractérisé par la rationalisation de la flotte d’aéronefs de l’ARC tout en modernisant ses moyens de transport. Ainsi apparaissent les Airbus CC-150 Polaris, tant dans leur version Canforce One que multi-fonctionnelle (MRTT). Plus récemment, le choix du successeur du Polaris s’inscrit dans la continuité puisque l’Airbus CC-330 Husky prendra la relève. Le premier CC-330 Husky vole déjà aux couleurs du Can Force One, alors que les appareils en version CC-330MRTT seront livrés dans les années à venir. Côté transport tactique, l’ARC demeure fidèle au légendaire Hercules en remplaçant le modèle H par le CC-130J Super Hercules. Les derniers CC-130H Hercules, encore utilisés comme avions de recherche et sauvetage, prendront une retraite bien méritée lorsque la flotte des nouveaux CC-295 Kingfisher sera pleinement opérationnelle. L’ARC peut également compter sur l’impressionnant avion de transport stratégique Boeing CC-177 Globemaster III qui bénéficie de cures de jouvence régulières. Plus modestes et ne possédant pas de désignation militaire car loués à une entreprise privée, l’ARC utilise également quelques bimoteurs BE-350 Super King Air. Enfin le renouvellement de la flotte des Canadair 601 et 604 (CT-114B) Challenger est initiée avec l’acquisition d’appareils Bombardier 650 (CT-144D) Challenger. À plus ou moins brève échéance, les vénérables CC-138 Twin Otter si essentiels dans le Grand Nord seront également à remplacer par ce qui sera sûrement des DHC-6 de nouvelle génération.
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5 Responses
Toujours aussi chouette cette série de rétrospectives autour de l’Aviation Royale Canadienne. J’avais oublié qu’elle avait volé sur Comet. Et belle fidélité aussi aux élégants bimoteurs Lockheed des années 1930. Bravo Marcel, le passionné d’histoire aéronautique que je suis adore cette série.
Salut MARCEL et les passionnés,
Au même titre que l’article 2024 d’Arnaud hier, je me réjouis de redécouvrir ces avions connus ou moins connus, voir inconnus. Je teste mes connaissances et ça, ça me plait…. ! Sinon, c’est reparti pour une nouvelle recherche !
– 2 questions complémentaires MARCEL : l’ARC intègre t-elle au même titre que l’AAE, un commandement de l’Espace – si oui, quels sont les moyens matériels et humains dont disposent l’ARC dans ce domaine ? Si non, qui s’en charge ?
Et bien sur MARCEL, félicitations pour ce travail de recherche qui demande du temps, et de nombreuses vérifications.
Aéronautiquement,
Relevant de l’ARC, la Division spatiale du Canada fut mise sur pied en 2022. Elle est notamment responsable de tout ce qui touche aux satellites d’intérêt militaire, que ce soit pour la télédétection, les communications et la navigation. J’aurai l’occasion d’y revenir avec un peu plus de détails en 2024. Merci pour vos encouragements !
Je découvre que le Canada a utilisé des Dassault Falcon 20. Pourquoi ce choix alors qu’à cette époque ce pays achetait quasiment que des avions US ou britanniques ?
Le Canada n’achetait pas que des aéronefs américains ou britanniques à l’époque. L’ARC alignait aussi des avions de conception et de fabrication canadienne. Pour ce qui est du choix du Falcon 20, j’imagine que c’était le meilleur appareil disponible à coût raisonnable dans sa catégorie. Faut dire qu’il avait une belle gueule aussi !