C’est ce qu’on appelle un dégât collatéral. En cette fin mars 2023, un peu plus d’un an après le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine, les programmes russes de développement aéronautique souffrent. Le plus symbolique est sans doute celui de l’hélicoptère multi-rôle Kamov Ka-62 et de ses dérivés au sujet duquel nous nous étions déjà penché voici presque un an et qui en est désormais au point mort. Il n’y a qu’un seul et unique responsable à cet échec industriel : celui qui a décidé d’attaquer son voisin ukrainien.
Sur le papier le Kamov Ka-62 devait permettre à l’hélicoptériste russe de s’implanter un peu plus durablement sur le marché international qu’il ne l’avait fait avec son Ka-32 Helix-C. Il avait d’ailleurs prévu un Ka-64 disposant d’une motorisation américaine signée General Electric en lieu et place des turbines françaises Safran Helicopter Engine Ardiden 3G d’origine et d’une avionique euro-américaine. Mais ça c’était avant.
Avant quoi ? Bah avant que Vladimir Poutine ne décide de bombarder puis de tenter d’envahir l’Ukraine. Bien sûr ce ne sont pas réellement les soldats russes pas plus que leurs «associés» du groupe privé Wagner ou encore leurs supplétifs tchétchènes qui ont eu raison de ce programme. En fait c’est la réaction internationale c’est à dire celle des États-Unis et des pays de l’Union Européenne qui ont lourdement sanctionné l’économie et l’industrie de Russie. L’Australie, le Canada, la Corée du sud, le Japon, ou encore la Nouvelle-Zélande leur en ont ensuite remis une couche.
Alors bien sûr les médias russes hurlent à qui veut l’entendre que les sanctions économiques internationales n’ont aucun effet sur la vie quotidienne des Russes. On ne dit pas la même chose chez Russian Helicopters, la maison mère de Kamov, pas plus qu’à Rosaviatsiya. Et manque de chance pour les propagandistes moscovites cette agence de l’aviation russe est publique et a officiellement déclaré en décembre 2022 que le programme Ka-62/Ka-64 était mis en sommeil. Plus récemment, en ce mois de mars 2023, ses porte-parole ont reconnu la fin de son développement en raison de l’impossibilité de se doter de technologies d’origines américaines et européennes.
Jusque là cela ne devrait pas trop toucher la guerre menée par Moscou. Sauf que parmi les développements du Ka-62 se cachait le Ka-65 de combat maritime. Il avait été pensé pour remplacer les vieux Ka-27 Helix datés de l’ère soviétique. Ils servent toujours en première ligne, au sein de la marine russe. Cette dernière devra donc prendre son mal en patience et chercher ailleurs un hélicoptère de lutte anti-sous-marine pour son avenir.
Pendant ce temps là les forces aéronavales de l’OTAN alignent des hélicoptères ultramodernes.
Point de moquerie dans cet article plutôt de la tristesse pour les femmes et les hommes qui se sont impliqués depuis douze ans dans le programme du Kamov Ka-62. Ils voient leur travail réduit à néant par la seule volonté de leur leader politique qui a voulu agresser et lancer ses armées contre un de ses voisins.
Photo © Keypublishing
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8 Responses
Heureusement que ce projet est au point mort. Si les principaux composants de cet appareil provenaient de l’occident, cet helicoptere n’aurait rien de la Russie
Les gens de chez Kamov avaient compris un principe à côté duquel vous semblez être passé monsieur Okon : pour vendre dans le monde entier ils devaient sortir des schémas de développement hérités de l’URSS. Les Ka-62 et Ka-64 furent pensés ainsi, visant notamment les marchés porteurs : Asie, Europe, et Océanie. L’avionique et la motorisation occidentalisées permettaient cela. Mais Poutine en décidant d’attaquer l’Ukraine a ruiné les espoirs des ingénieurs russes. Et ce sans doute pour de nombreuses années malheureusement.
Bonjour monsieur,
Vos articles sont extrêmement intéressants et bien documentés. D’un point de vue technique et journalistique et très synthétique.
Merci pour votre travail,
Cordialement,
Philippe Beuscart
Bonjour Arnaud,
Aucun rapport entre mon post et cet article, mais comme on ne peut échanger suite à un article sur vos présentations d’aéronefs, j’utilise ce moyen.
Vu mon âge et l’ancienneté de ma passion, il est très rare que je tombe sur un appareil dont je n’avais strictement JAMAIS entendu parler, alors chapeau et merci!
Sans vous commander, si vous pouviez continuer à nous étonner… 🙂
PS : je parlais du DOFLUG bien sûr…
À ce niveau là vous avez récemment le Weiss WM.21 hongrois.
C’est dommage j’aimais bien cet hélico. La version militaire était déjà présente dans le jeu vidéo BF3 en 2011.
Et qu’en est-il du programme du séduisant Mil mi 38 ? Le premier exemplaire à été livré fin 2019 mais il possède des composants occidentaux comme l’avionique de Thalès et les turbines de Pratt & Whitney Canada. Il doit lui aussi sûrement faire les frais des sanctions occidentales.
Je te dirais que tu répond a ta propre question aucune chance pour lui non plus avec des composants russes il ne sera vendu uniquement en Russie