C’est un sujet que nous couvrons depuis maintenant presque pile-poil deux ans, et il revient sur le devant de la scène. Depuis quelques semaines le microcosme de la défense irlandaise revient à la charge sur la nécessité de disposer rapidement d’un élément de chasse axé autour d’une quinzaine d’avions. C’est le retour en force de l’aviation stratégique russe en Atlantique nord qui dicterait cette réaction. Au final les Irlandais sont t-ils vraiment partant pour un tel avenir militaire ?
Et tout est parti fin février 2020 des déclarations de Ralph James, un général en retraite qui fut numéro 2 de l’Irish Air Corps et un fervent défenseur de la création d’une branche de chasse. Il déclara lors d’une conférence internationale sur la défense que son pays était «probablement le plus vulnérable d’Europe». Ce n’est pas rien. Mais Ralph James n’est pas non plus totalement neutre dans cette histoire puisqu’il plaida longtemps pour un rapprochement de la défense irlandaise avec l’OTAN et les États-Unis.
Pour mémoire l’Irlande n’est malgré sa position stratégique pas membre de l’alliance Atlantique. Surtout sa défense est entière axée autour de deux entités désormais séparées : le Royaume-Uni et l’Union Européenne. Un accord de défense bilatérale offre la défense aérienne du pays à la Royal Air Force. Il n’a pas été remis en question par le Brexit. Dans le cadre d’un accord européen l’Armée de l’Air et la Marine Nationale peuvent également intervenir en Irlande, à la demande.
Il faut dire que ce ne sont pas les sept Pilatus PC-9M armés de nacelles M3P de calibre 12.7mm et de roquettes de 70mm montées par sept en paniers LAU-7 qui permettraient d’efficacement défendre l’espace aérien irlandais. C’est donc le rôle de la chasse de Sa Majesté.
Pourtant en novembre dernier les parlementaires de Dublin avaient fermé la porte à l’opportunité d’une aviation de chasse irlandaise. Alors pourquoi un revirement est t-il envisageable quatre mois plus tard ?
Parce que depuis la situation géostratégique en Atlantique nord a grandement changé, et elle prend la forme de bombardiers stratégiques Tupolev Tu-95 et Tu-160 russes. Ces avions flirtent de plus en plus avec l’espace aérien souverain de la république d’Irlande, mais également avec la zone économique exclusive partagée de l’UE.
Du coup quels avions seraient envisageables pour les Irlandais ?
Là encore députés et sénateurs irlandais n’arrivent pas à se mettre d’accord sur le type d’avions qui pourrait un jour voler sous la fameuse cocarde tricolore orange, verte, et blanche. Les députés voudraient un chasseur monoréacteur tandis que les sénateurs préféreraient un avion plus léger dérivé d’un appareil d’entraînement avancé.
Alors quels avions ont leurs chances aujourd’hui ?
D’emblée les machines biréacteurs comme les Airbus DS Typhoon, Boeing F/A-18E/F Super Hornet, et Dassault Aviation Rafale n’ont aucune chance. Idem sans doute pour le Lockheed-Martin F-35A Lightning II car il est trop onéreux pour le budget très restreint de la défense irlandaise. Les avions de chasse contemporains comme le Lockheed-Martin F-16V Viper et le Saab JAS 39E/F Gripen semblent les plus en vue. Mais d’autres pourraient tirer leur épingle du jeu comme le Korean Aerospace Industries FA-50 dérivé du jet d’entraînement T-50 Golden Eagle.
Les avions adaptés au combat aérien à partir de jets d’entraînement justement pourraient tirer leur épingle du jeu à l’image du BAE Systems Hawk Mk-165 britannique ou encore bien sûr de l’Aero L-159 ALCA tchèque. Il est impossible également de ne pas aborder le cas du très réussi Leonardo M-346 Master italien.
Pour des raisons évidentes les avions russes n’ont aucune chance.
L’ambitieux ex-général James (certains lui prêtent des intentions politiques) avance que douze monoplaces et quatre biplaces de transformation opérationnelle seraient nécessaires dans un premier temps. Il se place ainsi plutôt du côté des députés et non des sénateurs. Ce sont pourtant ces derniers qui auraient le fin mot de l’histoire en cas d’accord sur une renaissance de la chasse irlandaise.
Ralph James est également un atlantiste convaincu pour qui l’adhésion de son pays à l’OTAN serait une nécessité. Et sur cette question là il est en total désaccord avec une très grande partie de la classe politique irlandaise qui préfère l’Europe à l’Amérique.
Au final donc le débat semble relancer à Dublin. Sans cependant que l’on ne sache vraiment s’il aboutira cette fois ou si le pacifisme totalement assumé du peuple au shamrock l’emportera encore. Les Irlandais de la rue ont toujours été très réticents aux questions de défense. Alors l’acquisition d’avions de combat et d’une chaîne de défense aérienne allant forcément de paire avec, autant dire que ça leur passe au-dessus de la tête.
Photos © Irish Air Corps.
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