Le torchon brûle entre Boeing et le principal client de son biréacteur mono-couloir. Alors que ce lundi 11 novembre 2019 les porte-paroles de l’avionneur annonçait un retour aux vols commerciaux du 737 Max pour janvier 2020 le transporteur Southwest se voulait plus prudent. La compagnie aérienne intérieure américaine estime de son côté que cela ne pourra pas être envisagé au plus tôt avant mars 2020. Les dirigeants de la compagnie American Airlines semblent sur la même longueur d’onde que leurs concurrents.
Pourtant la confiance semble revenir peu à peu concernant l’avionneur américain, son action ayant pour la première fois regagnée un peu plus de 4.5% de sa valeur à la bourse de New York. C’est donc que les efforts entrepris depuis la découverte des failles du système MCAS semblent porter leurs fruits. Sauf que celle ci n’est qu’artificielle car elle ne concerne que les marchés financiers, et pas les professionnels de l’aéronautique commerciale.
Il faut dire que la mauvaise prestation ce mardi 29 octobre 2019 du patron de Boeing devant la commission des transports du sénat américain est encore dans toutes les têtes. Dennis Muilenburg a eu toutes les peines du monde à répondre aux attaques des parlementaires tant démocrates que républicains. Pis il s’est retrouvé incapable de riposter lorsque le sénateur du Connecticut Richard Blumenthal a accusé le biréacteur d’être un «cercueil volant». Une expression lourde de sens dans le domaine aéronautique et qui n’a rien d’un hasard dans la bouche de ce très proche du couple Clinton. Cet ancien avocat général est un spécialiste de la question, et selon ses propres mots un passionné d’aviation.
Aussi quand moins de quinze jours après l’avionneur ose annoncer dans tous les médias que son avion sera prêt pour janvier 2020 cela ressemble presque à un mantra. Hormis les marchés personne ne semble dupe. Et surtout pas les compagnies aériennes à qui Boeing avait déjà promis il y a quelques semaines un retour à la normale entre fin novembre et début décembre 2019. À chaque fois le constructeur semble renvoyer aux calendes grecques la remise en service de son 737 Max.
Surtout que dans ce dossier un silence semble assourdissant : celui de la FAA.
Il faut dire que les sénateurs américains ont aussi pas mal étrillé la Federal Aviation Administration et sa trop grande proximité avec Boeing, un fait déjà souligné dans ce dossier par les médias spécialisés. Du coup l’agence fédérale de l’aviation civile fait profil bas pour l’instant et ne valide ni ne conteste les déclarations du constructeur. Il en va désormais de sa réputation aux États-Unis, mais aussi ailleurs dans le monde.
Et le doute a été médiatisé par rien moins que la compagnie Southwest. Ce transporteur intérieur possède une flotte composée exclusivement par le biréacteur mono-couloir américain. Des Boeing 737-700 et 737-800 forment le gros de sa flotte, à hauteur d’un total de 716 machines mais également une trentaine de 737 Max 8 désormais clouée au sol. Sans compter qu’en plus la compagnie aérienne doit faire face aux problèmes récemment découverts sur les «fourchettes à cornichons» des 737-700 et 737-800 les plus anciens.
En fait pour de nombreux américains le Boeing 737 et Southwest sont intimement liés, la compagnie aérienne n’ayant jamais eu d’autres modèles d’avions même dans le passé. Du coup sa voix sur le dossier est très écoutée.
Hormis la FAA un autre silence peut sembler étonnant sur le dossier : celui de la Maison Blanche. Le Président des États-Unis Donald Trump est habituellement si aiguisé dans l’abus des 280 caractères du petit oiseau bleu que là beaucoup s’interrogent outre-Atlantique sur sa diète médiatique autour du 737 Max. Pourtant il y aurait là matière à faire le buzz pour un type aussi prompt que lui à s’emparer de n’importe quelle info pouvant lui permettre de redorer son blason populiste. Selon plusieurs médias (démocrates reconnaissons-le) il s’agirait en fait de ne pas froisser plusieurs de ses généreux donateurs à quelques mois de l’élection présidentielle américaine.
La proximité entre les dirigeants de Boeing et le parti républicain est un secret de Polichinelle aux États-Unis.
Au final qui aura raison : Boeing ou Southwest ? La flotte mondiale des 737 Max reprendra t-elle ses vols en janvier prochain ou bien pas avant mars ? Seul le proche futur nous le dira. En attendant les avions restent immobiles sur les parkings et dans les hangars des aéroports du monde entier, et donc s’usent. Sans compter la production de l’avionneur qui en a pris un sérieux coup entraînant de ce fait des risques de chômage, même partiel, pour ses équipes et celles de ses sous-traitants partout dans le monde.
Photo © Wikimédia Commons.
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4 Responses
Plus de 700 Boeing B737 c’est énorme, vous êtes sûr qu’il n’y a pas un zéro de trop? Pourquoi ne pas avoir moitié B737 et moitié A320, ça serait plus intelligent.
Non non c’est bien ça, entre les 737-700, -800, max 7, max 8. Rationaliser la flotte permet d’avoir droit à des plus grosses remises sur le prix d’achat des appareils et un cout moindre sur la maintenance et la formation des pilotes.
Je ne vois pas ce que Trump vient faire dans cet article, c’est un patriote et ça ne serait surement pas dans l’intérêt de son pays d’en faire des tonnes sur Boeing.. Alors aller supputer une collusion voire un conflit d’intérêt me parait assez discutable en plus d’être hors sujet.
Deux choses : en premier lieu ce sont les médias américains (des deux bords politiques) qui outre-Atlantique se sont étonnés en premier du silence étrange de Donald Trump sur la question lui qui habituellement tweete tout et n’importe quoi, et en second lieu je vois mal en quoi vous prétendez que ce type est un « patriote » ce qui là est un commentaire de votre part hors sujet.