Et si la Turquie tournait le dos à l’Amérique en achetant ses chasseurs en Russie ?

Il y a encore quelques mois cette possibilité relevait du pur fantasme anti-américain primaire, désormais la donne a changé. Depuis deux mois et demi environ Ankara et Moscou seraient en étroits et secrets pourparlers autour de l’acquisition possible d’un lot de chasseurs de supériorité aérienne Sukhoi Su-35. Mais la Russie veut aller plus loin et propose à son nouvel allié de rejoindre le programme industriel lié au développement de l’avion de combat furtif Sukhoi Su-57. Pour mémoire la Turquie est membre de l’OTAN depuis février 1952.

On parle désormais d’une signature de contrat entre la Turquie et la Russie d’ici la fin de l’année et portant sur trente-six avions de combat multi-rôle Sukhoi Su-35. Des avions de facture russe qui pourraient ainsi parfaitement remplacer les McDonnell-Douglas F-4E Phantom II encore en dotation dans la force aérienne turque. À n’en pas douter les Sukhoi Su-35 pourraient représenter, si le contrat se confirme, un véritable bond en avant qualitatif vis à vis des vieux chasseurs-bombardiers de facture américaines. Ces derniers datent de la guerre froide et ont accumulé bien plus d’heures de vol que nécessaires.
En Turquie la presse se fait largement l’écho de cet accord futur.

Mais surtout on apprend que le dirigeant russe Vladimir Poutine aurait proposé à son homologue Recep Erdogan que l’industriel aéronautique Turkish Aerospace Industries rejoigne Sukhoi sur le programme de son avion furtif Su-57. Entre autocrates en même temps ils ont toutes les raisons de bien s’entendre ces deux là. Aussi fou que cela puisse paraitre c’est finalement une proposition pleine de bon sens. On sait que la Turquie possède l’avancée technologique nécessaire pour une telle entreprise puisque jusqu’à récemment TAI était allié à l’avionneur américain Lockheed-Martin dans le cadre du programme F-35 Lightning II.

Or entre l’avion américain et l’avion russe la participation turque ne devrait pas être très différente. Surtout cela va permettre à Turkish Aerospace Industries de peaufiner son expérience en matière de furtivité dans le cadre du programme de chasseur indigène TF-X. Le premier vol de celui-ci est attendu pour la seconde moitié de la décennie à venir, avant une hypothétique entrée en service pour l’horizon 2029-2032.

Déjà après l’achat des systèmes anti-aériens S-400 auprès de la même Russie la Turquie s’était attirée les foudres de l’OTAN. Mais si ce futur contrat de trente-six Sukhoi Su-35 se concrétise il est clair que les relations entre Ankara et l’alliance atlantique vont encore plus se tendre. Au sein de l’organisation certains pays n’hésitent plus à réclamer l’exclusion de la Turquie car jugée trop proche diplomatiquement et militairement de la Russie.
Erdogan ira t-il trop loin dans sa démarche ? Nous le saurons sans doute dans quelques semaines.

Photo © Keypublishing.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

15 Responses

  1. Ou là. .là ! !!!! Ça sent mauvais ! !! On peut s’attendre à tout avec ces deux dictateurs !
    La Turquie était un’ solide allié de l’Otan. Que sera le futur ? Avec l’Iran et la Syrie comme turbulents voisins ?

  2. La Turquie fabriquait quelles pièces/parties du F-35 ? Je voudrais être une petite souris pour écouter les discussions entre ingénieurs Turcs et ingénieurs Russes !

    1. Même encore aujourd’hui Lockheed-Martin ne communique toujours pas sur la part de travail de Turkish Aerospace Industries quant au programme F-35 Lightning II. Peut-être que la Turquie vendra tôt ou tard la mèche. Qui sait ?

    2. La Turquie fabrique 7% des pièces sur le F-35. Et je crois que c’était elle qui était choisi pour assurer la maintenance des réacteurs des F-35 basé en Europe.

  3. Un peu surprenant car il m’aurait semblé que, pour des motifs purement géopolitiques la Turquie aurait plutôt pu se rapprocher de la Chine pour se fournir en avions de combat.
    En effet, la Russie (puis URSS puis à nouveau Russie) et la Turquie sont en concurrence directe depuis au moins Pierre le Grand (début XVIIIe) pour le contrôle des détroits et de la Mer Noire (voir le projet de construction d’un gazoduc russe évitant spécifiquement la Turquie, projet datant déjà d’une vingtaine d’années, ou d’une manière plus anecdotique un Su 24 russe abattu par des F 16 turcs au-dessus de la Syrie il y a 1 an ou 2…). Aucun problème de ce genre avec la Chine.
    Quand au point de vue aéronautique, on peut facilement se procurer en Chine les mêmes avions qu’en Russie et pour moins cher (les coûts de photocopie sont moins importants que des coûts de R&D).
    Mais bon, les mystères de la politique…

  4. Certain(e)s seront sans doute surpris(es) de la disparition du commentaire de Pierre Simard. Je l’ai modéré pour propos racistes, islamophobes, et d’une vulgarité clairement affichée.
    Pour mémoire la provocation publique à la haine raciale est passible d’un an de prison ferme et/ou de 45000 euros d’amende au titre de l’article 24 alinéa 5 de la loi sur la liberté de la presse de 1881. C’est donc un délit. À titre très personnel je ne laisserais jamais quiconque exposer ses propos racistes ici ou ailleurs, c’est le combat d’une vie.

  5. Si par malheur la Turquie devait sortir de l’Otan pour une raison ou une autre, on perd un beau belvédère pour savoir ce qui se passe en Mer Noire avec les Russes, de grandes oreilles avec les voisins Iraniens et Syriens. Et surtout la Grèce se trouve en première ligne sur le flanc sud de l’Otan. Avec toutes les petites îles qu’elle possède, la sécurité de cette zone de la mer Egee n’en est que plus difficile. De plus Grecs et Turques, bien que faisant partis de l’Otan tous les deux, ont souvent eu des conflits de voisinage importants. Donc on a tout à perdre dans cette affaire. Celui qui contrôle le détroit des Dardannelles et Gibraltar, contrôle toute la Méditerranée et la Mer Noire. Les Grecs, les Phéniciens, les Ottomans l’avaient bien compris.

    1. À l’heure actuelle c’est celui qui possède les AWACS les plus évolués qui contrôle le mieux la Méditerranée et la Mer Noire, et à ce petit jeu là la Turquie et la Russie ne font pas le poids.

  6. C’est marrant que la Turquie se dote de matériels russes pendant que les pays d’Europe de l’est cherchent eux à se débarrasser de leurs matériels d’origine soviétiques car incompatibles avec les standards de l’OTAN. Car quelque soit les qualité du SU-35 ou de l’hypothétique Su-457, ils ne seront jamais compatible avec la liaison 16, standard incontournable de l’OTAN …

  7. L’avenir nous dira les raisons de ce potentiel choix, mais la Turquie joue un double jeu depuis un bon moment maintenant, et seul un changement de régime chez eux pourrai remettre nos relations dans de bons rails….

  8. C’est une b9nne chose , il est fort probable qu’avec le fort taux de corruption en Turquie , qu’un Su 35/57 se retrouve aux USA dans le cadre de l’OTAN pour un quelconque exercice et se retrouve temporairement démonté à la chinoise jusqu’à la dernière vis pour le plus grand bonheur des services de renseignements.

  9. Quand est-il de l’armement de ces potentiel sukhoi ? Avec un stock de munitions made in OTAN depuis 60 ans j’espère qu’ils ont prévu le coup. Ca ferait drôle de voir un SU35 modifié par TAI pour emporter des amraam et autres GBU-12.

  10. J’aime beaucoup les commentaires de Mareth et Kalikoba. Ce serait effectivement une situation ubuesque, si cela devait se produire.
    Mais avec la Turquie, on peut s’attendre à tout, à moins comme dit Sylvain Pigelet, qu’il y ait un changement de régime et que l’armée reprenne le pouvoir. Ça c’est une autre histoire………………

  11. Ce qui me surprend le plus dans cet article , c’est le fait que la Turquie est suffisamment de ressources financières et d’ingénierie pour développer seul un avion furtif. Là où les européen unis à plusieurs n’ont même pas commencé à faire un démonstrateur. Je suis admiratif qu’ils y arrivent ou même tout simplement qu’ils en aient la volonté. Je tiens à dire qu’en aucun cas j’apprécie le gouvernement turc actuel (ou même passé). Je pense que la sortie de l’OTAN est inéluctable.

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