On appelle cela la réponse du berger à la bergère. Ce lundi 18 mars 2019 l’état-major de l’aviation militaire russe a confirmé avoir ordonné le transfert sur la base de Gvardeyskoye d’une escadrille de bombardiers stratégiques Tupolev Tu-22M3. Ce sont donc entre six et huit avions d’armes aptes à l’emport de missiles nucléaires Kh-47M2 qui se trouvent désormais dans l’ex-territoire ukrainien de Crimée. Selon le Kremlin ce déploiement fait suite à l’arrivée en Roumanie de nouveaux systèmes de défense de l’OTAN.
Cependant on ne peut pas s’empêcher de penser que ce déploiement arrive pile-poil au moment où l’US Air Force a envoyé en Angleterre des bombardiers stratégiques Boeing B-52H. Et dire que Moscou criait alors à l’escalade militaire en Europe.
Aujourd’hui on peut aisément se dire que ces six à huit bombardiers lourds Tupolev Tu-22M3 ne jouent pas la désescalade. Pis Moscou les a placé exactement dans le plus polémique de ses territoires : la Crimée. Militairement annexée cette péninsule est toujours reconnue par le plus gros de la communauté internationale comme appartenant légalement à l’Ukraine.
On n’est plus à une provocation près dans les allées du Kremlin !
Mais au fait pourquoi les déployer maintenant ?
Sûrement pas pour calmer le jeu avec les forces aériennes, armées, et navales ukrainiennes. Non la raison est plus profonde.
Moscou admet assez mal la volonté des pays de l’OTAN voisins de la Mer Noire de disposer de leurs propres moyens de défense anti-aérienne. Et c’est notamment l’arrivée en Roumanie de nouveaux missiles sol-air de facture américaine qui semble avoir profondément énervé l’autocratie moscovite. Mais surtout les Russes encaissent mal que des navires de guerre de l’US Navy fréquentent ce qu’ils considèrent comme leur mare nostrum. Le mois dernier le bâtiment américain de guerre amphibie USS Arlington (ou LPD-24) a réalisé une série de manœuvres en Mer Noire allant jusqu’à catapulter son drone embarqué de surveillance Boeing RQ-21 Blackjack. Au même moment le destroyer USS Donald Cook, déjà survolé par la chasse russe par le passé, s’exerçait avec la frégate turque Fatih. Forcément ça faisait beaucoup (trop) pour la Russie.
Peut-on vraiment considérer en fait que ces bombardiers représentent une menace claire contre les forces de l’OTAN ? En fait oui et non. Oui si on considère qu’avec ces biréacteurs supersoniques à géométrie variable la Russie dispose désormais d’un avion capable de violer l’espace aérien d’à peu près toutes les nations atlantistes dans un rayon de 2500 à 3000 kilomètres autour de la presqu’île ukrainienne. Et non si on considère tout aussi logiquement que jamais la Russie contemporaine n’irait titiller de trop près les forces atlantistes, au risque de causer un incident diplomatique trop lourd pour elle.
Du coup le seul véritable évènement dans ce déploiement de Tu-22M3 c’est bien qu’il ait lieu en Crimée. Et rien qu’à ce titre il mérite qu’on s’y attarde. Il n’y a pas eu de pilotes russes de bombardiers stratégiques en dans la presqu’île depuis la fin de l’ère soviétique. À l’époque la Russie et l’Ukraine n’existaient plus… ou pas encore. Désormais la situation est sensiblement différente.
Photo © OTAN
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3 Responses
Pourquoi l’ONU n’exige pas que Putin rende la Crimée aux ukrainiens?
Parce que la Russie a un droit de veto au Conseil de Sécurité de l’ONU et bloquerait ainsi toute tentative « motivée » de la part de l’ONU. Je en sais pas si les autres membres ont même tenté de faire passer cela, mais dans tous les cas, je ne vois pas Moscou laisser passer un truc pareil.
Réponse du berger à la bergère, B52 d’un côté, Tu22 de l’autre……
Le jour où l’ONU pourra exiger quelque chose de la Russie, on sera dans un autre monde…… Taper sur la France pour des « pseudo violences policières » c’est plus facile….
Pour en revenir à l’aéro, on se croirait revenu au temps de la guerre froide et de celui qui à « la plus grosse », l’industrie de l’armement à besoin d’aide? Alors on s’invente des « conflits, ou des menaces » qui n’existent pas?