Cela faisait quelques semaines que nous ne vous avions pas proposé un sujet historique. Voilà de quoi y remédier. Nous allons ici vous présenter le cas du programme (avorté) Northrop N-165, un étonnant avion-espion américain, qui ne dépassa pas le stade de la planche à dessin mais fut pourtant un des projets les plus ambitieux de la guerre froide. Un appareil qui faillit même empêcher l’apparition du Lockheed SR-71 Blackbird…
Au printemps 1956, Northrop était un des plus importants avionneurs américains mais aussi un des principaux fournisseurs du Pentagone. L’image de marque de ses ingénieurs était très forte et c’est dans cette logique que l’US Air Force leur confia un programme ultra-secret : la conception et l’usinage d’un avion de reconnaissance stratégique capable de voler à très haute altitude et pendant plus de douze heures au-dessus de l’Union Soviétique et/ou de la Chine.
Dans l’esprit des généraux américains il s’agissait alors de trouver un successeur au Lockheed U-2 alors en service dans le plus grand secret. Le cahier des charges prévoyait que le futur avion emporte un radar cartographique à infrarouge ainsi qu’une demi-douzaine de caméras et d’appareils photographiques de focales différentes. En outre l’avion devait pouvoir voler à plus de 70000 pieds (soit plus de 21300 mètres) d’altitude de manière à rendre inopérante la DCA soviétique.
Northrop commença très sérieusement à plancher sur le programme baptisé N-165. Pour plus de sécurité le Pentagone refusa de lui attribuer une désignation militaire, le faisant ainsi s’approcher du principe Black Project.
Les ingénieurs de Northrop se heurtèrent à plusieurs problèmes majeurs dont le premier était la propulsion du N-165. Finalement ils optèrent pour le Rolls-Royce RA.28 Avon. Pour mémoire ce réacteur britannique avait déjà été utilisé quelques semaines plutôt aux États-Unis sur le Ryan X-13 Vertijet expérimental. Il avait donc reçu l’aval du Pentagone.
Néanmoins dans des soucis de confidentialité autour du programme, Northrop réussit à convaincre le motoriste Westinghouse d’acquérir la licence de production du RA.28 Avon en tant que J54-WE-2. Le prototype du N-165 devait en recevoir six !
Sur le papier le Northrop N-165 était un géant, bien plus imposant que le Lockheed U-2. S’il n’était pas beaucoup plus long avec ses 20.72 mètres l’hexaréacteur possédait une envergure de 53.49 mètres c’est à dire bien plus que n’importe quel avion de reconnaissance américain de l’époque y compris les énormes Boeing RB-47H Stratojet.
Dans les ébauches des ingénieurs sa surface alaire était tout bonnement ahurissante avec 260m².
En mai 1960 alors qu’un prototype allait être usiné quelques semaines plus tard le Pentagone décida de mettre fin au programme du Northrop N-165. La seule très haute altitude n’était plus à l’ordre du jour, Francis Gary Powers venait d’être abattu par les Soviétiques et le monde entier avait découvert l’existence du U-2. L’US Air Force avait choisi le pari de Lockheed, à savoir celui des très grandes vitesses, sous la forme du A-12 Oxcart qui devait évoluer ensuite vers le légendaire SR-71 Blackbird.
Ainsi se terminait l’un des plus ambitieux projets de l’avionneur Northrop.
Photo © US Air Force Museum.
En savoir plus sur avionslegendaires.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
11 Responses
Je connaissait pas cet avion et j’ai voulu en savoir plus sur wikipedia. Même eux ne connaissent pas ce Northrop N 165. Ou vas tu trouver de tels avions?
« plus de 21000 pieds (soit plus de 21300 mètres) d’altitude » ???? peut être 64 000 pieds ? certainement une petite erreur due à un manque d’oxygène…
« plus de 21000 pieds (soit plus de 21300 mètres) » ???
Comme la très bien expliqué Dimitri j’ai fait une petite erreur de frappe et de relecture. En effet ce sont 70000 pieds et non 21000 pieds qu’il fallait lire. Merci pour la diligence avec laquelle vous avez tous deux réagit, vous et Philippe. L’erreur a été rectifiée. 🙂
On est d’accord il y a une erreur dans l’altitude. C’est 21300 mètres et 70000 pieds qu’il voulait dire.
Lockheed Martin travaille actuellement sur le SR-72 un avion sans pilote de la taille du SR-71 capable d’aller a mach 6, pour 2030.
Bravo Arnaud et merci pour cet article très intéressant!
Joli coup aussi car je ne trouve rien sur le net! Peut-être un vieux fana de l’aviation comme source de départ ?
En tout cas j’aurai beaucoup aimé voir les ébauches et plans de ce « monstre »!
Alors pour le coup non pas d’un vieux numéro du Fana mais de deux de mes nombreux bouquins d’aviation. Un en français sur les avions Northrop et un autre en anglais sur les avions de reconnaissance américains de la guerre froide. 🙂
Bonsoir,
C’est un peu maigre mais j’ai trouvé cet article sur Google Books. Au moins ça donne une idée de ce à quoi il aurait pu ressembler. 😉
Je mets le lien ici (il faudra peut être faire un copier coller):
https://books.google.be/books?id=BPw6DAAAQBAJ&pg=PA120&lpg=PA120&dq=Northrop+N-165&source=bl&ots=tmtckWn35L&sig=Eow8Yz6EWmNhNSqWMiBbORUtpYY&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwju1sKv6rfZAhVCPVAKHdWNALYQ6AEIYTAF#v=onepage&q=Northrop%20N-165&f=false
Très bien ce lien, merci!
Excellent ! On se rend mieux compte de la bête !
Ah oui! Génial belle trouvaille!