C’est une histoire aéronautique bien française, une petite histoire qui en dit long aussi sur notre vision de l’aviation militaire. Pendant un peu plus de vingt ans l’École du Personnel Volant de la Marine Nationale évolua sur une flotte d’avions d’entraînement bien particuliers et absolument pas conçus comme tels au départ : des Douglas C-47 mieux connus sous le nom de Dakota ! Des bimoteurs qui marquèrent durablement l’histoire aéronavale hexagonale.
Au début des années 1960 l’Escadrille 56S de l’aéronavale française relevant directement de l’EPV, l’École du Personnel Volant, aligne principalement des petits bimoteurs Beechcraft JRB Expeditor hérités de la Seconde Guerre mondiale. Seulement voilà en dehors d’être usés jusqu’à la corde ces avions sont totalement inadaptés à la formation des futurs équipages appelés à voler sur Lockheed P2V Neptune et encore plus sur les futurs (et ultramodernes) Breguet Br.1150 Atlantic qui doivent entrer en service dans quelques années et dont le développement a commencé.
Il faut trouver au plus vite un avion d’entraînement avancé adapté aux besoins de la Patmar. Et l’avion le plus rapidement disponible en nombre suffisamment important est le Douglas Dakota. Aussi bien dans les forces aériennes qu’aéronavales et dans la majorité des compagnies aériennes on retrouve d’anciens exemplaires de ce bimoteur militaire dérivé de l’avion de ligne DC-3. Aussi l’état-major de la rue Royale va acquérir entre septembre et décembre 1961 un lot de dix avions de ce type auprès de rien moins que sept fournisseurs différents dont trois compagnie aériennes.
Une fois réceptionnés ils sont convoyés par les airs jusqu’à l’aéroport francilien du Bourget où ils sont reconditionnés comme avions d’entraînement à la patrouille maritime. Adieu les banquettes et sièges (plus ou moins défoncés) et équipements de transport et bonjour aux consoles d’entraînement. Dans le même temps ils sont repeints et revêtus de panneaux day glow de couleur orangée et dotés du hameçon, la célèbre cocarde des marins français.
Finalement l’Escadrille 56S est déclarée opérationnelle sur ses Dakota au début de l’année 1964.
C’est sur la Base d’Aviation Navale de Nîmes-Garons dans le sud de la France que les Dakota de la 56S voleront donc, aux côtés des derniers JRB Expeditor encore en état de vol. Quand ceux ci quittent définitivement le service au début des années 1970 ils sont remplacés par quatorze Douglas C-47D offerts par l’Armée de l’Air. Cette dernière n’en a plus besoin, elle a désormais bien mieux avec les Noratlas et Transall. Ces « nouveaux » Dakota n’entreront cependant pas en service avant 1973, le temps là encore des transformations et des coups de pinceaux.
À cette époque les Dakota sont déjà de vieux avions, et malgré les talents des mécanos de la Marine ils perdent beaucoup d’huile à chaque vol et consomment bien trop de carburant à l’heure. Il faut dire que le temps est désormais aux économies, le monde vient de subir de plein fouet le premier choc pétrolier. Pour pallier aux vols de liaisons sur Dakota, souvent considérés comme onéreux et assez peu utiles l’Escadrille 56S touche deux des douze bimoteurs légers Piper PA-31 Navajo acquis. Ils assureront même quelques vols d’aguerrissement au profit des pilotes de chasse embarqués transformés sur avions de patrouille maritime. Passer du Crusader ou de l’Étendard IVM à l’Atlantic via le Navajo ou le Dakota, ça devait être un sacré choc pour les pilotes !
Pour autant pendant vingt ans les Dakota d’entraînement de la Marine Nationale vont sillonner les cieux français, et pas uniquement au-dessus du Midi et de l’arc méditerranéen. Les détachements saisonniers sur la BAN de Landivisiau rythment la vie de l’escadrille. C’est tellement chouette de voler au-dessus de la Bretagne en plein hiver…
Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin les années 1980 sonnent le glas des Dakota d’entraînement de l’Escadrille 56S. Un nouvel avion est en train de faire son apparition dans le ciel gardois : le Nord N262E Frégate. Désormais même l’entraînement se fera sur turbopropulseurs.
Si aujourd’hui vous espérez voir d’anciens Dakota de la 56S il faudra vous rendre sur la BAN de Lahn-Bihoué. Pour info le Musée de l’Air et de l’Espace possède bien un tel avion mais il démontre depuis plusieurs années sur le terrain de Dugny que les avions peuvent aussi être totalement biodégradables.
Photos © SHD
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6 Responses
bonjour, la 56s n’était pas seul en fait, il y avait sa jumelle à Lann-bihoué la 57s.
Il y avait un DC-3 sur l’ex base école de rochefort, au coté du jaguar marine. Mais suite a la tempéte de 99-2000, je ne sais pas ce qu’ils sont devenu.
Le Dc3 est toujours à Roche fort au musée de l’aéronautique navale.
Il y avait aussi des DC-3 de l’aéronavale à la fin des années 60, à Diego Suarez, à Madagascar. Mon père volait sur l’un des appareils.
Salut à tous. Pour ceux que cela intéresse j’ai été affecté comme pilote à la BAN LANN BIHOUÉ (56/S) LE 01/07/63 au 01/04/64 puis à la BAN NIMES GÂRONS (56/s) du 01/04/64 au 01/09/65 J’ai quité à cette date la marine pour devenir pilote civil dans l’aviation d’affaires etc etc. j’ai volé sur JRB 4et C 47 et j’ai fait pour ceux qui etait avec moi un vol de fin de cours qui est resté dans ma mémoire Pour info le 12/06/64 Nimes Lorient Stornoway Keyflavick et retour le 21/06/64.
j’ai été entrainé par le PM March et laché sur C47 par le CC Droneau
Bonjour à toutes et tous.
Je réponds à certaines questions, il y a toujours un DC3 à Rochefort au Musèe de l’ Aéronautique Navale, j’ en suis membre, il faut le visiter,
Un autre DC3 est exposé à l’ entrèe de la BAN Lann-Bihoué près de Lorient (Il s’ agit du n°87).
Je peux vous fournir des photos.
Je possède des documents et photos sur cette Escadrille 56S qui était basée sur la BAN Nîmes-Garons maintenant fermée.
Salutations.
Philippe.
Salut Philippe
Tu me semble toujours aussi passionné.
Amitiés
Francois RUZÉ