FUNU: les ailes de la paix au Moyen-Orient

Les évènements récents dans la bande de Gaza et en Syrie illustrent combien une paix durable Moyen-Orient semble encore illusoire. Depuis plus d’un demi-siècle, l’Organisation des Nations unies (ONU) ne ménage pourtant pas ses efforts à cette fin. Il est désolant de voir le peu d’ascendant de l’ONU dans cette région aujourd’hui, mais il n’en fut pas toujours ainsi.

Deux missions furent déployées par l’ONU dans ce coin troublé du monde sous le nom de Force d’urgence des Nations unies (FUNU) (United Nations Emergency Force ou UNEF). La première mission (FUNU I) fut décidée lors de la crise du canal de Suez et dura de 1956 à 1967. La deuxième (FUNU II) fit suite à la guerre du Kippour et s’étendit de 1973 à 1979.

Dans le cadre de l’accord secret de Sèvres, la France, la Grande-Bretagne et Israël envahissent conjointement le territoire égyptien en 1956, suite à la nationalisation unilatérale du canal de Suez par l’Égypte. La tension monte rapidement lorsque l’URSS menace les envahisseurs d’une riposte nucléaire afin de défendre son nouvel allié égyptien. L’Assemblée générale des Nations unies, réunie en session extraordinaire d’urgence, adopte des résolutions qui font appel à un cessez-le-feu et, sous l’instigation du représentant du Canada, Lester B. Pearson, à la mise sur pied de la FUNU. Première force onusienne de maintien de la paix, la FUNU I aura pour mandat de superviser le retrait des forces étrangères des territoires occupés et de s’interposer entre l’Égypte et Israël. Dès lors, les « Casques bleus » sont nés puisque, pour la première fois, cette couleur sera utilisée par le contingent onusien constitué de militaires provenant du Brésil, du Canada de la Colombie, du Danemark, de la Finlande, de l’Inde, de l’Indonésie, de la Norvège, de la Suède et de la Yougoslavie placés sous le commandement du général canadien E.L.M. Burns. En plus de fournir une unité de blindés légers de reconnaissance, le Canada va également assurer l’appui aérien nécessaire au contingent de la FUNU I.

ONU ATC 115 El Arish

Sous les couleurs de l’ONU, l’armée de l’air canadienne (RCAF) effectue, dans un premier temps, le déploiement des casques bleus et du matériel grâce à ses Fairchild Flying Boxcar et Canadair North Star. Suite au retrait d’Israël de la bande de Gaza, le 115 ATU (Air Transport Unit) du RCAF s’installe en 1957 à l’aéroport d’El Arish pour remplir ses missions de transport de troupes, de soutien logistique, de livraison postale et d’évacuation sanitaire auprès des 80 postes onusiens déployés en Égypte le long de la frontière israélienne. À des fins d’observation, les avions du 115 ATU survolent quotidiennement la ligne de démarcation qui s’étend de la Méditerranée au nord jusqu’au golfe d’Aqaba au sud. Pour ces missions, le 115 ATU utilisait des DHC-3 Otter ainsi que de vieux Dakota remplacés quelques années plus tard par une nouvelle recrue au sein du RCAF, le DHC-4 Caribou parfaitement adapté à ces tâches. Quant aux North Star, il feront graduellement place aux Canadair Yukon à compter de 1960.

ONU Dakota
RCAF DC-3 Dakota
ONU DHC-3 Otter
RCAF DHC-3 Otter

Pendant dix ans, les Casques bleus réussirent à préserver la paix le long de la frontière israélo-égyptienne. Mais en mai 1967, le président égyptien ordonna à la FUNU de se retirer alors que l’Égypte et ses alliés arabes s’apprêtaient à attaquer Israël.  Les israéliens prirent les devants et la Guerre de six jours éclata trois semaines plus tard. Quinze Casques bleus encore présents dans la bande de Gaza furent tués dans les feux croisés des belligérants. Au total, 109 militaires perdirent la vie durant la mission de la FUNU I.

ONU Otter
RCAF DHC-3 Otter

Suite à la guerre du Kippour en 1973, une nouvelle force de Casques bleus fut déployée dans le cadre du FUNU II afin de s’interposer entre l’Égypte et Israël. La Force des Nations unies chargée d’observer le dégagement (FNUOD), encore active aujourd’hui,  fut également mise sur pied par l’ONU en 1974 afin de contrôler l’application du cessez-le-feu entre les forces israéliennes et syriennes sur le plateau du Golan. Dans le cadre de ces deux missions des Casques bleus, le Canada s’engagea encore une fois à offrir le soutien aérien grâce au 116 ATU (Air Transport Unit) du RCAF doté d’appareils DHC-5 Buffalo. Le 9 août 1974, le 116 ATU déplora la perte tragique d’un de ses équipages lors du vol 51 de l’ONU reliant Beyrouth et Ismaïlia en Égypte. Alors que le vol 51 traversait la frontière syrienne tel que prévu au plan de vol, l’appareil Buffalo fut atteint par un missile sol-air. Selon les témoins, l’appareil effectua une descente contrôlée malgré une épaisse trainé de fumée. Deux minutes plus tard, alors qu’il n’était plus qu’à 300 mètres du sol, le Buffalo fut complètement détruit par deux autres missiles. L’enquête sur cette tragédie fut particulièrement difficile compte tenu du peu de coopération des autorités syriennes qui ne voulurent jamais admettre leur responsabilité. Délibéré ou accidentel, le décès des 9 canadiens à bord du vol 51 constitue dorénavant une date de commémoration de la perte de plus d’une centaine de militaires canadiens dans diverses missions des Casques bleus dont les FUNU I et II furent les plus meurtrières.

ONU DHC-5 Buffalo 1
RCAF DHC-5 Buffalo
ONU Memorial UNEF Vol
Commémoration du Vol 51 en Syrie

Quant à Lester B. Pearson, le prix Nobel de la paix lui fut décerné en 1957, en reconnaissance de son rôle diplomatique dans le règlement de la crise du canal de Suez. Considéré comme le père du concept des missions onusiennes de maintien de la paix et donc des Casques bleus, il devint Premier ministre du Canada de 1963 à 1967. Depuis 1984, l’aéroport international de Toronto porte son nom. Ce bref rappel historique est également un hommage à mon père qui,  jeune homme, a porté le casque bleu au sein du 115 ATU.


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Marcel
Fils d’un aviateur militaire (il est tombé dedans quand il était petit…) et biologiste qui adore voler en avion de brousse, ce rédacteur du Québec apprécie partager sa passion de l'aéronautique avec la fraternité francophone d’Avions Légendaires.
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