En 1958, l’avionneur français Morane-Saulnier commença l’étude d’un avion de tourisme et de formation pour les futurs pilotes de l’aviation civile. A cette époque cette dernière mission était remplie par de vieux biplans Stampe SV-4 d’origines belges. Les ingénieurs et designers s’orientèrent alors vers un appareil résolument nouveau, ce qui conduisit à ce que le programme intéresse les militaires français.
Le programme fut désigné MS.880 Rallye. Il se présentait comme un monomoteur monoplan à ailes basses, disposant d’un train d’atterrissage fixe, d’un cockpit triplace, d’une verrière coulissante et d’un empennage classique. Le MS.880 fut en outre doté de volets et de becs de bords d’attaques spéciaux favorisants les capacités ADAC (Avion à Décollage et Atterrissage Court) de l’appareil. Les roues du train d’atterrissage disposaient de carénages de protection. Le Rallye fut un des premiers avions civils français construit en grande partie en matière plastique. Cela représentait à l’époque une véritable révolution technologique. Le prototype effectua son vol inaugural le 10 juin 1959.
L’avion connut un succès immédiat auprès des clients civils, si bien que dix ans plus tard il était l’avion le plus répandu dans les aéroclubs hexagonaux, et le deuxième en Europe après le Cessna 172. En 1965, la société Morane-Saulnier fut absorbée par Sud-Aviation et changea sa raison sociale en SOCATA (pour SOciété de Construction Aéronautique de TArbes) alors que dans le même temps le MS.880 devint le Modèle-235 Rallye.
SOCATA chercha à développer de nouvelles versions du Rallye, et c’est ainsi qu’apparurent les séries « G », dont le Galopin biplace d’entrainement basique, le Galérien de remorquage de planeur, le Gabier quadriplace de transport haut-de-gamme, et enfin le Guerrier de lutte antiguérilla et d’appui rapproché. En outre le constructeur continuait l’assemblage du Rallye de base pour les clients traditionnels.
La première commande militaire date de 1967 et vint d’un des pays les plus puissants du Pacte de Varsovie, la Pologne. En effet celle-ci commanda une trentaine de Galopin qu’elle fit construire sous licence par le constructeur national PZL sous la désignation de Koliber. Quelques uns furent également assemblés à partir de kits du type Galérien pour le tractage des planeurs et des cibles aériennes de la force aérienne polonaise. Les PZL Koliber demeurèrent en service jusqu’en 1989.
Mais c’est sans conteste le Guerrier qui suscita le plus grand engouement de la part des forces aériennes du monde entier. Celui se présentait sous la forme d’un appareil biplace de reconnaissance armée, d’observation, de contrôle aérien avancé, et d’appui tactique léger. Dans ce cadre il pouvait emporter une demie tonne de charges divers, allant de paniers à roquettes de 68mm, au pod-mitrailleuses, en passant par des roquettes au phosphore pour le marquage des cibles, et même des pod de reconnaissance photographique.
Les premiers clients pour ce type d’avions furent les Seychelles, le Maroc, et la République Dominicaine. Dans ce dernier pays, les Rallye Guerrier remplacèrent en 1970 les derniers North American P-51 Mustang. La différence pour les pilotes dût être sévère à l’époque entre ce petit avion léger et le puissant chasseur de la Seconde Guerre Mondiale. De nos jours des Rallye Guerrier volent toujours au sein des forces aériennes centrafricaines, sénégalaises, et salvadoriennes. Au El Salvador les cinq derniers Guerrier portent une livrée au camouflage noir et vert propice aux opérations antiguérilla et anti-narcotique au-dessus des zones boisées du pays, et volent de concert avec les derniers Fouga CM.170 et quelques Cessna A-37 d’attaque légère. En outre ce pays utilise toujours de nos jours quatre Rallye pour des missions d’entrainement primaire.
Le plus gros utilisateur du Rallye demeure toutefois la France. Si l’Armée de l’Air refusa en 1968 l’achat de Galérien pour les missions de tractage de planeurs des Sections Aériennes de Vol à Voile (SAVV dans la nomenclature militaire française) au profit du Jodel 140. Toutefois au milieu des années 70, l’Aéronautique Navale fit l’acquisition d’une trentaine de Rallye pour des missions d’entrainement primaire. Ses avions furent affectés au sein de l’Escadrille de Servitude 51S où ils servent toujours de nos jours aux côtés des Mudry Cap-10 de voltige aérienne. L’Escadrille de Servitude 50S chargé de soutenir les actions du CEPA, la branche du CEV affectée auprès de la Marine Nationale, utilise toujours de nos jours une dizaine de Rallye pour des missions d’entrainement et d’essais en vol. Deux Rallye de la 50S sont détachés auprès de l’EPNER pour la formation des futurs pilotes. Les Rallye de l’Aéronautique Navale arborent tous une très étonnante livrée jaune canari. Les Rallye de l’Aéronautique Navale étant en configuration quadriplace, ils sont aptes aux missions de liaisons, voire de transport d’état-major.
Outre la France et le Salvador, le Maroc et le Sénégal utilisent encore des Rallye pour des missions d’entrainement primaire. En 1980, la Gendarmerie Nationale étudia la possibilité d’acquérir trois SOCATA Rallye pour des missions d’entrainement et de surveillance, mais suite à un accord avec Reims Aviation, elle préféra se prononcer pour le Cessna 207 plus spacieux. La production du Rallye s’arrêta en 1985 après la construction de plus de 3200 avions, dont près de 500 pour des clients militaires. Le Rallye est actuellement le dernier avion conçu par Morane-Saulnier encore en service en France, une lignée qui remonte tout de même au chasseur MS.225 des années 30 et au MS.406 de la Bataille de France.
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